C’est ce samedi que le cinéma africain et de la diaspora prend ses quartiers à Ouagadougou, et ce pour une semaine. Après une première infidélité de la biennale qui devait se tenir du 27 février au 6 mars, cette 27è édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco) qui déroulera finalement, du 16 au 23 octobre, le tapis rouge aux cinéastes, acteurs, réalisateurs, acheteurs et autres professionnels du 7è art venus des quatre coins du monde, devra s’adapter à la double contrainte sécuritaire et sanitaire que vit le Burkina Faso, à l’instar d’autres pays, notamment ceux du Sahel, confrontés au Covid-19 et aux attaques armées.
Un Covid-19 qui fait de la résistance, et pire, prend des visages différents, comme pour ruser avec l’homme. Mais que ce soit sous sa forme simple ou ses variants les plus mortels, il n’a pas pu conforter les prévisions macabres qui avaient fait de l’Afrique, un vaste champ de cadavres avant l’heure. Sauf qu’avec le non respect des gestes barrière qui s’érige de plus en plus en sport national et la réticence prononcée pour le vaccin, sans oublier le nombre très réduit des tests, le continent noir pourrait bien faire face à cette hécatombe à laquelle il a pu échapper jusqu’à maintenant. Et ça, ce n’est pas du cinéma!
Et s’il faut ajouter à la pandémie à coronavirus, la menace terroriste qui pend comme une épée de Damoclès sur la tête des Burkinabè, il y a bien de quoi craindre pour la fête du cinéma africain! Mais la résilience légendaire des Africains qui en ont vu d’autres, alliée à la vigilance des autorités sanitaires et des Forces de défense et de sécurité devrait faire l’affaire. Qui plus est, si un homme prévenu en vaut deux, un festivalier informé en vaudra certainement quatre pour que la 27è édition du Fespaco, soit une réussite, grâce à la prudence des uns et des autres. En attendant de connaître le successeur de «The mercy of the jungle» du Rwandais Joël Karekezi, détenteur du prestigieux Etalon d’or de Yennenga du Fespaco 2019, c’est le Fespaco lui-même qui est le premier vainqueur de la compétition, en réussissant à se tenir, si tout va bien, malgré la météo sanitaire et sécuritaire menaçante.
En tout cas, le cinéma sera bien masqué, Covid-19 oblige, et engoncé dans un gilet pare-balles à toute épreuve, le risque d’attaques armée étant incontournable. Tout compte fait, les salles noires partageront le monde des festivaliers avec la célèbre rue marchande du Fespaco, où se dégustent brochettes succulentes et poulets bicyclettes, dans un vacarme de rythmes musicaux, vomis par des enceintes braillant à tue-tête.
Si au soir du 23 octobre, les rideaux tomberont sur cette édition qui sera bien différente de toutes les précédentes, il faut espérer que le cinéma africain reçoive un souffle nouveau après confinement. Et, surtout, que les salles obscures qui ont été remplacées pour la plupart, par des lieux de prière sur le continent, retrouvent ce public si friand de ses films qui ont d’ailleurs évolué en qualité. Plus aucune rubrique n’a de secret pour les jeunes réalisateurs africains qui profitent à merveille du numérique pour produire des œuvres, certes à moindre coût mais tout autant de qualité.
Le cinéma de case oublié, les productions fort prisées de «Nollywood», les westerns, les films de science-fiction, d’amour, des réalités sociales de l’heure, des documentaires, etc., concoctés par des Africains et Africaines devenus de véritables stars du 7è art, font le bonheur de cinéphiles qui en veulent toujours plus. Du reste, ils ne sont plus contraints «d’aller au cinéma», ayant la latitude de suivre leurs films et séries préférés sur le petit écran de télévision, et sur leurs ordinateurs et smartphones, grâce à la magie de l’internet. En clair, comme ailleurs, le cinéma africain sait qu’il n’a plus d’autre choix que de devenir une véritable industrie. Au risque de périr!
Et que vive le Fespaco, pour que vive le cinéma africain!
Par Wakat Séra