Les 49 soldats ivoiriens arrêtés ce dimanche à l’aéroport de Bamako au Mali sont à leur 5e jour de détention. La junte militaire malienne aurait voulu faire d’une grosse montagne cette affaire qui n’en n’est pas une, et qu’elle-même a montée pierre sur pierre, qu’elle n’aurait pas agi autrement. Mais comme il tient «ses mercenaires», le colonel Assimi Goïta, ne veut rien lâcher et pousse des cris d’orfraie qui, du reste n’émeuvent que peu de monde. En effet, le régime militaire malien est coutumier de ces montages qui prennent la forme de tentatives, soit de coup d’Etat, soit d’assassinat sur sa personne. En tout cas, la Côte d’Ivoire persiste et signe que ces hommes sont bel et bien de l’effectif de l’armée nationale et pas des «mercenaires» comme veulent le faire croire les autorités maliennes.
Mieux, la version officielle ivoirienne est en phase avec celles de l’Onu et de l’Allemagne. Les autorités ivoiriennes, affirment que c’est en vertu d’une convention passée entre la Côte d’Ivoire et l’Organisation des Nations Unies, et conformément à un contrat de sécurisation et de soutien logistique signé avec la société Sahel Aviation Service (SAS), que ces hommes se trouvaient à l’aéroport de Bamako. Les militaires maliens au pouvoir campent également sur leur position, manipulant avec une dextérité machiavélique, les opinions nationale et internationale.
Le maître de Bamako est visiblement décidé à faire payer à la Côte d’Ivoire sa témérité, elle qui a adopté la ligne dure dans la prise des sanctions financières et économiques par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) contre le Mali, sous coupes réglées des putschistes. De plus, la junte militaire se délecte de cette jubilation propre à un enfant qui tient son dernier jouet offert par Papa Noël, en faisant porter à d’autres le statut de «mercenaire» que certains servent, à tort ou à raison, aux éléments de la société de sécurité privée russe Wagner avec qui les colonels maliens sont en ménage depuis lors. Sinon, c’est tout de même la 8e rotation qu’effectuent, depuis 2019, ces militaires ivoiriens qui n’appartiennent certes pas à la Minusma, mais sont au Mali, du fait d’une relation contractuelle entre la Côte d’Ivoire et la société SAS, contrat couvert par une convention de l’ONU.
Les sept premiers contingents n’étaient donc pas composés de «mercenaires»? Peut-être que la Côte d’Ivoire cache bien son jeu! Sinon, à moins qu’on soit en pleine fiction ou que lesdits mercenaires ont cru être en terrain totalement conquis, comment pouvaient-ils débarquer en plein jour dans un aéroport digne de ce nom, hyper sécurisé, à bord de deux avions, les hommes dans l’un et des «armes de guerre» dans l’autre, et se présenter au poste de contrôle? Si tel était vraiment le cas, la junte militaire a toutes les raisons de s’en vouloir d’avoir été autant infantilisée!
Question: le colonel Assimi Goïta et ses hommes sont-ils conscients de jouer avec le feu dont les conséquences pourraient être dramatiques pour les deux peuples frères du Mali et de la Côte d’Ivoire qui partagent non seulement une longue frontière, mais vivent jusque-là dans une harmonie presque parfaite, loin des querelles des politiciens? De part et d’autre des limites tracées par la colonisation, se trouvent des membres de même famille, mais qui par la force des choses se retrouvent de nationalité ivoirienne ou malienne. Les militaires au pouvoir à Bamako doivent se ressaisir au plus vite pour mettre fin au risque qu’ils font à toutes ces personnes, tout comme aux fortes communautés maliennes et ivoiriennes, installées dans l’un et l’autre pays.
Le Mali doit, au plus vite libérer les soldats ivoiriens et négocier en gentleman, le contrat sans doute juteux qui lie armée ivoirienne et la société SAS. Il urge en tout cas de parvenir le plus tôt possible à un modus vivendi entre les autorités des deux pays. Sinon, plus tard sera trop tard!
Par Wakat Séra