Dans cette tribune, Fodé Roland Diagne s’interroge: « 60 ans après, que révèle la pandémie du Covid-19 sur nos indépendances? »
La « mondialisation » est suspendue par l’arrêt des vols qui vident les aéroports, la fermeture des frontières nationales et le chacun se débrouille chez soi pour sortir de la pandémie. C’est l’effet boomerang du retour en force de ces illusions passéistes que sont l’Etat-Nation et la souveraineté nationale.
Les mendiants au pouvoir au Sénégal et en Afrique « découvrent » que l’aumône du « monde » impérialiste ne peut plus leur être tendu, que les hôpitaux des pays maîtres ne peuvent plus les accueillir, que le shopping du tourisme à Paris, Londres, New York, Dubaï, Riyad est différé à un moment indéterminé, etc.
Ce que 60 ans de lutte pour l’indépendance nationale n’ont pas obtenu prend la forme d’une certaine réalité en ce 4 avril 2020 à travers malheureusement la litanie du nombre toujours en hausse des infectés du Covid 19. Le président du Sénégal instaure la loi d’habilitation qui lui confère les pleins pouvoirs pendant qu’il palabre sur « l’union sacrée ».
Le discours libéral présidentiel d’une « économie ouverte » sur le monde, d’une économie qui doit attirer les investisseurs étrangers dans laquelle c’est le privé qui crée des emplois cède la place à l’appel à l’effort collectif national, à la contribution des opérateurs économiques nationaux, à la priorisation et à la non marchandisation de la santé et de l’école, à la nécessité de l’autosuffisance alimentaire, voire à la production industrielle nationale, etc.
Le discours ambiant redécouvre qu’au moment des indépendances formelles dans les années 60, les pays d’Asie qui combattent victorieusement la pandémie du Covid 19 avaient globalement un niveau de sous développement équivalent aux pays d’Afrique.
Les thuriféraires néocoloniaux de l’Occident impérialiste se retrouvent orphelins de leurs « modèles » étatsunien, français, britannique, allemand en faillite pour s’en trouver d’autres qui leurs sont désignés par les mêmes maîtres impérialistes : Corée du Sud, Japon, Taïwan et même, tenez vous bien, la région administrative spéciale de Hong Kong présentée comme un pays à part. Ceci tout simplement pour éviter de réfléchir sur les expériences victorieuses contre l’épidémie de Covid 19 et plus généralement contre les pandémies de la Chine Populaire, du Vietnam, de la Corée du Nord et de Cuba qui volent au secours y compris des pays « modèles » de nos bourgeoisies néocoloniales.
La subordination culturelle à l’Occident impérialiste ou pour paraphraser Frantz Fanon l’aliénation idéologique néocoloniale est consécutive à la dépendance économique et politique à l’impérialisme.
Cette oppression néocoloniale de l’impérialisme se traduit par la propriété privée de l’essentiel des moyens de productions industrielles, des moyens d’échanges et des richesses du sous-sol par les capitalistes étrangers, principalement français au Sénégal.
N’est ce pas là tout simplement une des principales causes de l’échec de l’appel du Président Macky Sall aux opérateurs économiques nationaux à abonder le fond de 1000 milliards de francs Cfa dans le cadre de la lutte contre le Covid 19 ? Au Nigeria pour le moment, il n’y a pas eu appel au capital étranger (qu’il faut taxer plus sérieusement), la bourgeoisie nationale a mis la main à la poche tout comme pour la lutte contre le terrorisme.
Au regard de la réalité de l’indigence néocoloniale, ne faut-il pas, dès à présent, poser la question décisive de la NATIONALISATION ou de la RENATIONALISATION avec contrôle des travailleurs et des usagers des secteurs stratégiques de l’économie nationale comme leviers indispensables à « l’Etat stratège » qui revient, après une longue hibernation, dans le programme politique de la jeunesse en rébellion contre la mal gouvernance libérale néocoloniale ?
Le premier test pour le pouvoir libéral est de mettre en adéquation sa nouvelle parole et ses actes en commençant par la NATIONALISATION de l’entreprise pharmaceutique MEDIS qui fabrique justement les médicaments dont la chloroquine permettant de médiquer les malades du Covid 19.
En tout cas, la crise pandémique du Covid 19 aura un avant et un après géopolitique qui va faire évoluer le monde dans la direction de se débarrasser de l’hégémonie unilatérale de l’Occident impérialiste (USA, UE). On doit douter que la servilité néocoloniale soit en capacité de prendre cette donne en devenir en compte ?
Le Président Macky Sall demande les « pleins pouvoirs » et « l’union sacrée », n’est-ce pas à lui de mériter cela par des actes comme ceux que le Président Nicolas Maduro du Venezuela a décidé en annonçant le confinement et la massification des tests pourtant dans un pays qui subit le diktat criminel du blocus des USA le 22 mars dernier : – « La suspension des loyers pour les PARTICULIERS et les commerçants durant 6 mois – L’interdiction des licenciements jusqu’au 31 décembre 2020 – La suspension des factures d’eau et d’électricité pendant 6 mois – La suspension des remboursements d’emprunt à la consommation ou hypothécaire – La massification du programme public de distribution d’aide alimentaire à domicile – La généralisation des bons d’ajustement salariaux (revenu universel) – L’État prend en charge les salaires des PME pendant 6 mois – Des crédits d’État pour les entreprises des secteurs santé, alimentation, pharmaceutiques, hygiène ».
Mesures de salubrité publique d’un pays en voie de développement qu’aucun pays impérialistes (USA, UE) n’est capable de prendre en faveur des populations parce que le capitalisme c’est le profit avant l’humain.