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Mali: une double attaque terroriste et beaucoup de questions

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Le Mali frappé en plein coeur de la capitale Bamako (Ph. d'illustration)

C’est par une double attaque que les djihadistes se sont rappelés au bon souvenir des populations de Bamako. Hasard de calendrier ou actes minutieusement calculés et programmés, les attaques qui ont simultanément ciblé, dès l’aube de ce mardi 17 septembre, un bâtiment de l’école de gendarmerie de Faladié et la zone militaire de l’aéroport international Président Modibo Keïta-Senou, interrogent plus d’un, parce que sonnant comme un symbole. En attendant de mieux appréhender les intentions et contours réels de ces attentats, leurs auteurs sont déjà connus, l’acte barbare ayant été reconnu par le Jnim, le groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, une des tentacules de la pieuvre Al-Qaïda.

Les attaques intervenaient, seulement 48 heures, après le discours, le 15 septembre, du colonel Assimi Goïta, le premier président en exercice de la jeune confédération de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), formée par le Mali, le Burkina Faso et le Niger, et qui commémorait l’An I de sa naissance. Autre circonstance troublante, les terroristes ont commis leurs ignobles attentats, quelque six jours avant la célébration de la fête nationale du Mali, qui marque l’accession, le 22 septembre 1960, à la souveraineté internationale, du pays de Modibo Keita. Troisième fait qui ne peut que soulever des interrogations, l’école de gendarmerie de Faladié, l’un des sites visés par les terroristes, est le lieu où, étaient gardés, selon plusieurs sources, les personnes accusées dans l’affaire dite de l’achat de l’avion présidentiel et d’équipements militaires surfacturés. Et comme par une étonnante coïncidence, c’est dans la matinée de ce mardi sanglant pour le Mali, que ceux-ci devaient, comparaître, devant une cour d’assise. Enfin, comment des sites aussi stratégiques et hautement sécurisés ont-ils été touchés? En somme, un faisceau de questions, pour l’instant sans réponses, mais qui pourraient bien être en lien avec ce double attentat terroriste qui a réveillé et tenu en haleine les riverains de Faladié, et tout le Mali.

Longtemps tenus éloignés de la capitale, depuis l’attaque de Radisson de Bamako, le 20 novembre 2015 et celle contre la base militaire de Kati, en juillet 2022, c’est la première fois que les terroristes s’attaquent, de nouveau, au coeur du pouvoir malien. Ils étaient, ce mardi dans la capitale qu’ils n’approchaient plus, tenus en respect par les Forces armées maliennes (FAMa) dont les communiqués officiels louent régulièrement les prouesses et le professionnalisme. Les assauts des terroristes qui, certes endeuillaient l’armée et les populations civiles, étaient régulièrement repoussés par les Forces de défense et de sécurité (FDS) qui font subir, toujours selon la voix officielle, de lourdes pertes humaines et matérielles à ces hommes sans foi ni loi qui se sont enkystés dans le Sahel.

Pire, les terroristes ne se contentent plus de ce territoire sahélien, mais opèrent des incursions, tout autant meurtrières, dans les pays de la région du Golfe de Guinée. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ne sont donc plus les seuls pays dans l’œil du cyclone terroriste, la Côte d’Ivoire, le Togo et le Bénin, ayant également été frappés, sans oublier, le Nigéria et le Cameroun où la nébuleuse Boko Haram dicte sa loi aux gouvernants et aux populations, par le biais de tueries et d’enlèvements en masse. Tout porte à croire que la guerre asymétrique et lâche que les terroristes imposent aux pays, a des mobiles qui ne sont pas que ceux religieux que les combattants des groupes terroristes brandissent.

En tout cas, il est temps de se demander quelle option ajouter à celle du tout militaire qui, si elle n’a pas montré ses limites, ne fait pas la preuve de toute son efficacité, malgré la bravoure des armées régulières. De même, ne faut-il pas que les pays comme le Mali, lancés dans la reconquête totale du territoire national, ne mettent pas tous leurs œufs sécuritaires dans le seul panier russe, et s’assurent d’abord la cohésion nationale, qui rassemblera davantage de patriotes contre l’hydre terroriste dont chaque tête coupée repousse aussitôt? Dans ce combat d’envergure internationale, qui touche toute la nation, aucune flèche contre l’ennemi ne sera de trop.

En attendant, les ratissages se poursuivent du côté de Bamako qui révèle avoir interpellé des terroristes, neutralisé d’autres et saisi de l’arsenal de guerre. Si l’Etat-major des FAMa et les terroristes se contredisent, comme à l’accoutumée, sur les bilans des victimes, ce sont de nombreuses familles qui viennent d’être endeuillées et des dégâts matériels énormes commis par les forces du mal, notamment, avec la destruction d’aéronefs de l’armée malienne. Il urge donc, pour les pays ciblés par le terrorisme, d’unir leurs forces pour s’attaquer au fléau, et se donner les chances de lui porter l’estocade finale, ou tout au moins réduire sa capacité de nuisance.

Par Wakat Séra