C’est dans une ferveur compréhensible que quarante-quatre pays africains viennent de signer à Kigali, l’accord établissant la Zone de libre-échange continentale. Dans la capitale rwandaise où la Zlec vient de franchir, le mercredi 21 mars, une étape décisive dans sa réalisation. Les chefs d’Etat africains ou leurs représentants, ont simplement réussi la prouesse de susciter l’espoir pour l’Afrique de se constituer un marché commun lourd d’1,2 milliard d’habitants. L’exploit est d’autant plus à saluer que le projet d’un passeport commun pour l’Afrique fait également son petit chemin, certains Africains, politiques comme hommes d’affaires, étant déjà détenteur du précieux document de voyage. Cette initiative, l’une des plus ambitieuses dit-on du côté de ceux qui nous dirigent lorsqu’ils évoquent l’agenda 2063 de l’Afrique, mûrissait depuis 2015, bien couvée par le Nigérien Mahamadou Issoufou. Abouti, le projet de la Zlec devrait faire de l’Afrique, lorsque toutes les barrières tarifaires s’effondreront pour booster la circulation des biens et services, le plus vaste espace de libre-échange au monde. Ce sera, un pas de géant qu’auront réalisé les Africains en faisant tomber plus de 80 000 frontières qui se dressent comme des obstacles devant les hommes d’affaires, les fonctionnaires et surtout les industriels africains qui ont besoin de grands ensembles pour prospérer. En somme, l’intégration et l’unité africaines ne seront plus chimères. Et ça, ce n’est pas rien, car aujourd’hui ce sont deux leviers essentiels de ce développement qui échappe depuis plus de 60 ans à des pays africains qui jouissent d’une indépendance dans la dépendance, après avoir subi, esclavage ou colonisation, ou les deux pour certains.
Mais, le chemin est encore long pour que la Zlec soit opérationnelle et sorte le continent africain de ses misères économiques. En plus de la donne lutte contre le terrorisme dont il faudra tenir compte dans les priorités, les réticences du Nigeria à embarquer dans le train ne sont pas un moindre obstacle. A lui seul, le pays de Muhammadu Buhari, constitue un marché important, compte tenu de son influence politico-économique, mais surtout de sa forte démographie. Toutefois, l’espoir est permis que ce poids lourd prenne le train en marche. De même, la Zlec doit attendre d’avoir la caution des parlements des pays membres qui la composent avant de prendre le large. Ce qui n’est pas forcément un facteur bloquant, si tant est que les élus nationaux défendent les intérêts des peuples, eux qui ont déjà une bonne longueur d’avance sur leurs dirigeants en matière d’intégration. Les dirigeants africains! Eux qui ont signé allègrement l’accord de la Zlec mais en constitueront les premiers ennemis! Chacun, comme on le dit trivialement, préférant être tête de rat que queue de lion. L’image est loin d’être flatteuse pour l’Afrique, mais elle résume à elle seule, tous les problèmes du continent où chaque chef d’Etat, règne jalousement sur une portion congrue, craignant de perdre son leadership dans un ensemble plus grand, qui pourtant est accélérateur de développement. Toute chose qui donne longue vie à l’aberration de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation, qui se dresse souvent contre l’intégration des peuples. Que dire du racket érigé en mode de contrôle par certains éléments des Forces de sécurité en mode sur les axes routiers et postes frontaliers africains? La pratique à la peau si dure qu’aucune mesure des organisations sous régionales ou africaine n’a pu l’éradiquer. Elle prend même de l’ampleur, malheureusement!
La Zlec, salut de l’Afrique? Le challenge est lourd mais pas impossible. Il suffira juste de dépasser les égos surdimensionnés de dirigeants ne se préoccupant que de leurs intérêts égoïstes et très personnels et en manque surtout de vision pour un Afrique très courtisée mais tenue éloignée des grandes sphères de décision mondiales. En tout cas, les dirigeants africains ont marqué un point à travers ce premier pas de Kigali et devront s’encourager pour aller plus loin. La Zlec, pourvu que ça marche pour que l’Afrique décolle!
Par Wakat Séra