Bilan du second tour de l’élection présidentielle malienne, ce dimanche 12 août 2018: un chef de bureau de vote tué, des agents électoraux enlevés, du matériel électoral volé ou saccagé, des bureaux de vote qui ferment en plein vote sans aucune explication. Et comme pour ne pas être en reste, la nature s’y est mise, en ouvrant les vannes du ciel pour arroser convenablement et faire de ce deuxième tour de la présidentielle malienne, une élection à vite ranger aux oubliettes du processus démocratique en Afrique. A en croire les informations relayées par les médias, on ne peut que s’offusquer de l’absence de rigueur sécuritaire dans certaines zones où les incidents se sont multipliés sans intervention des forces de l’ordre. Pour cause, elles étaient simplement inexistantes pour assurer la surveillance de ce vote qui pourtant était présenté comme celui de tous les dangers. Pour tout confirmer et surtout mettre en exergue la légèreté feinte ou voulue-dans quel but?-dans la sécurisation de l’élection, à Arkodia, localité située au sud-ouest de Tombouctou dans le Nord du Mali où a été tué un chef de bureau de vote par des présumés jihadistes, aucune présence des forces de l’ordre n’a été constatée pour permettre le bon déroulement de l’opération de vote. Sauf après le passage des tueurs, où les forces de l’ordre sont venues jouer les croque-morts. Pourquoi cette défaillance inexplicable?
Malheureusement, les observateurs étrangers, dont les discours sont préparés depuis leurs luxueuses chambres d’hôtel joueront encore à l’opinion, le disque jamais rayé des élections qui se sont globalement bien déroulées, en dehors d’incidents mineurs ne pouvant entacher le déroulement du scrutin et ses résultats. Si le ridicule pouvait tuer, ces observateurs qui n’ont d’yeux que pour ne pas voir, changeraient leurs rengaines, à défaut d’avoir le courage de ne plus aller…observer. C’est la démocratie qui en souffre sur le continent où des dirigeants impopulaires sont élus ou confortés dans leurs fauteuils par des deals montés sur le dos d’un peuple à qui on fait pourtant avaler au quotidien les vertus de la démocratie. Jacques Chirac l’avait pourtant dit sous la forme d’une boutade, «la démocratie est un luxe pour l’Afrique». Comment ne pas donner raison à l’ancien président français quand on met dans la balance le coût exorbitant des élections et les piètres résultats qui sont obtenus? En tout cas, il a finalement bien raison, Aliou Diallo, le candidat arrivé en troisième position au premier tour et qui a formellement refusé de porter le confortable costume de «faiseur de roi» en donnant des consignes de vote au profit de Soumaïla Cissé, 17,7% et Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), 41,7%, respectivement 2è et 1er du premier tour du vote du 29 juillet dernier. Pour Aliou Diallo, qui ne saurait continuer à cautionner un «simulacre», les dés étaient pipés d’avance.
Qu’attendre maintenant de cette élection dont les résultats ne devraient pas être connus avant quelques jours, du fait que le Mali est un pays très vaste et de l’enclavement de certaines localités? Juste, sauf miracle, la confirmation de la victoire de IBK qui, à défaut du «takoklen», soit le coup KO, dès le premier round, s’est forgé une avance considérable pour assurer son deuxième mandat. La véritable équation, dont l’inconnue est bien connue, c’est la crise post-électorale qui pourrait bien s’installer dans un pays où l’insécurité est aiguë et dont une bonne partie est sous coupe réglée des jihadistes et autres bandits du même acabit. Tout ça pour ça, est-on tenté de dire, en espérant que les uns et les autres sauront raison garder dans l’intérêt du seul Mali qui n’a nullement besoin d’un autre ingrédient de déstabilisation.
Par Wakat Séra