477 et bientôt 747 millions de locuteurs de la langue française à travers le monde, pour 300 millions de francophones sur les cinq continents. Sans constituer un record, les chiffres sont assez éloquents et permettent à la langue de Molière d’occuper la cinquième place de la langue la plus parlée sur la planète, après le chinois, l’anglais, l’espagnol et l’allemand. Et loin d’être figés ou de subir un recul dans le temps comme le lui prédisent ses détracteurs, le français, selon des statistiques optimistes fera un grand bond en avant, notamment grâce au boom démographique auquel est promis l’Afrique, le continent berceau de la Francophonie. Et la logique ne sera que respectée, l’ancêtre de la Francophonie, l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) ayant vu le jour à Niamey au Niger, le 20 mars 1070. Mieux, le français qui sert de pont et surtout de trait d’union entre de nombreux Etats de l’univers continue de raffermir les liens entre les nations, et surtout de vecteur important de transmission de valeurs linguistiques et culturelles entre les civilisations. Première langue d’enseignement et de l’administration dans beaucoup de pays africains, le français cohabite dans une harmonie parfaite avec les autres langues, qu’elles soient nationales où entrées sur le continent noir par le fait du colonialisme. C’est reconnu, sans le français, bien des peuples de la même Afrique, et même d’un même pays se comprendraient difficilement entre eux, la multiplicité des nationalités étant comme la marque déposé du continent noir.
Mais l’Afrique qui porte en réalité la Francophonie en tire-t-elle tous les bienfaits pour son développement socio-économique? Rien n’est moins sûr car la colonisation française qui a essaimé la langue française sur le continent, n’a pas fait que du bien aux Africains. Ceux-ci, en effet, ont subi, entre autres, une aliénation culturelle sans commune mesure, du fait du «direct rule», cette méthode de l’administration directe qui a servi au colon dans son entreprise de soumission du noir aux valeurs importées, considérées comme de la «civilisation». Comme si l’Afrique était une terre sauvage sur laquelle tout était à construire. De même, envoyer leurs enfants à l’école du blanc pour y apprendre «à lier le bois au bois» et «comment gagner sans avoir raison» a plutôt desservi les Africains. Ce qu’ils ont appris chez le blanc vaut-il ce qu’ils ont perdu? C’est ainsi que l’Afrique s’est enfermée dans le piège de «L’Aventure ambiguë», le célèbre ouvrage de Cheikh Hamidou Kane, devenu un grand classique de la littérature africaine. Aujourd’hui, le français, malgré son charme et sa qualité d’unir les peuples, tient difficilement la dragée haute devant le chinois et l’anglais qui se présentent comme les langues de l’avenir. Si grâce à son appétit gargantuesque, la Chine enlace de ses tentacules géantes le continent africain, et impose de ce fait sa langue comme indispensable dans le commerce avec l’Empire Céleste, l’anglais lui sert de langue à la rédaction des meilleures oeuvres scientifiques et l’implantation du High Tech. Last but not least, les pays anglophones prennent de plus en plus le pas sur ceux francophones dans la course au développement, eux n’ayant pas été contraint au pillage systématique de leurs richesses naturelles et surtout de leurs âmes.
En tout cas, la langue française tient bien sa place dans le monde et ne s’érige pas en adversaire des autres langues, mais ces dernières lui laissent désormais peu de place pour s’épanouir à son aise. Même Emmanuel Macron, le premier des Français, tout comme nombre de ses compatriotes manient maintenant avec dextérité la langue de Shakespeare dans leur quotidien. Etre ou ne pas être? That is the question.
Par Wakat Séra