Les chauffeurs des camions et autres véhicules poids lourd exigent l’ouverture de la circulaire, le boulevard des Tansôba ralliant l’échangeur de l’Est à celui de l’Ouest, avant de mettre fin à leur mouvement d’humeur se caractérisant par le stationnement des camions au niveau des entrées de la ville de Ouagadougou qui perturbe fortement la circulation. Les manifestants dénoncent la mesure de la mairie de Ouagadougou qui, voulant par là trouver une solution au problème des accidents mortels, les contraint à ne plus circuler dans la ville entre 22H et 5H du matin. Notre constat nous a permis ce mercredi 22 mai 2019 de voir des camions stationner en file indienne depuis le feu tricolore de la commune rurale de Saaba, une intersection rejoignant la Route nationale 4 (RN4) menant à Fada N’Gourma jusqu’à la sortie, au péage.
Les étals de commerce au long de la rue jouxtant le principal feu tricolore de Saaba grouillait de monde comme à son habitude, à l’entrée Est de Ouagadougou, l’une des principales voies de transit des camions qui mènent principalement aux ports de Lomé (Togo), Cotonou (Bénin), Lagos (Nigeria) et Accra (Ghana). Cependant, au côté gauche de la voie de la sortie Est, les attroupements de personnes essentiellement constitués de chauffeurs devant leur camions garés en file indienne à perte de vue, perturbent la circulation puisque que la voie est étroite.
Notre équipe s’approche en ces lieux vers 8H30 (Gmt et heures locales) pour en savoir plus sur ce comportement inhabituel qui attire le regard des passants et force certains curieux à s’arrêter pour observer la scène. « C’est le maire de la ville de Ouagadougou (Roland Armand Pierre Béouindé) qui nous a dit de ne pas circuler et de stationner », nous a lancé furtivement dans la nervosité, un chauffeur, dans la masse qui disait ne pas comprendre la mesure de l’autorité communale.
« Il y a des pays développés plus que le Burkina Faso mais ils n’ont pas pris cette décision. A Abidjan, Lomé, Cotonou, Accra et Lagos, la circulation est plus dense et plus compliquée que celle d’ici mais il n’y a pas eu cette décision », a ajouté notre interlocuteur qui a requis l’anonymat, déplorant qu’« aucune mesure conséquente » dont les voies de contournement et les aires de stationnement n’accompagnent pas la mesure.
Selon ces manifestants, leurs responsables ont été reçus hier mardi par les autorités municipales qui disent ne pas pouvoir revenir sur leur décision. « On a dit à monsieur le maire d’ouvrir la circulaire et il a dit pas question. Pourquoi vouloir obliger les chauffeurs à rouler la nuit? La nuit est-elle faite pour se reposer ou pour travailler? », s’est interrogé avec colère Hippolyte Kaboré, membre exécutif de l’Union des Chauffeurs Routiers du Burkina (UCRB), coordonnateur du mouvement des chauffeurs sur la RN4. Comme autres raisons, M. Kaboré dit craindre aussi pour le phénomène de l’insécurité grandissante dont le terrorisme qui sèment la désolation actuellement au Burkina Faso.
De temps à autres, les manifestants interpellent leurs collègues qui quittent la ville en les demandant de se retourner. Ceux qui n’obtempèrent pas, voient purement et simplement leur permis retirer. Pour eux, cette façon d’agir est une manière d’impliquer tous les chauffeurs car la lutte vise une cause commune, celui de l’amélioration des conditions de travail du chauffeur routier. Sur ces faits qui créent instantanément des attroupements en plein milieu de la voie, des gendarmes sécurisant les lieux, interviennent pour demander à la foule d’éviter d’arrêter les véhicules en pleine voie car la route est fortement empruntée.
Après avoir stationné à la suite du décret pris par le maire central de la ville de Ouagadougou d’interdire la circulation des camions ou gros porteurs aux heures dites de pointe parce que les accidents de circulation sont causés par ces camions ou gros porteurs, ces chauffeurs n’entendent pas reculer tant que leur avis ne sera pas pris en compte.
« Pendant que la sécurité routière nous sensibilise et nous déconseille de circuler la nuit justement pour éviter les accidents mortels, la commune vient nous dire de circuler la nuit, donc nous sommes perdus finalement », a dit Hippolyte Kaboré qui, comme ses collègues, attend que « les autorités arrêtent quelque chose d’équilibrer pour tout le monde ». Certains chauffeurs, se demandant si désormais la douane travaillera la nuit, souhaite comprendre comment tout cela se passera quand ils arriveront les nuits.
D’autres par contre proposent à l’instar d’autres pays de la sous-région, que les horaires soient révues afin que les arrêts ne concernent que les matins entre 5H et 9H et l’après-midi entre 16H et 21H. D’autres par contre plus virulents, accusent les autorités et certains nantis d’acheter les grosses motos pour leur enfants sans leur apprendre le code de la route qui y va avec et s’il y a un accident, c’est automatiquement eux qu’on culpabilise.
Contrairement à certaines Organisations civiles, les chauffeurs routiers affirment ne pas être « ni en grève ni en arrêt de travail » mais juste exprimer leur mécontentement face à la mesure jugée « abusive » de Armand Béouindé qui reconnaissait sur un plateau de télévision que l’application du décret qu’on lui attribue allait rencontrer de la résistance.
Pour les manifestants qui ont pris pour refuge les kiosques installés aux abords des voies pour faire respecter leur mouvement, la circulaire étant la principale voie des camions puisqu’elle mène à la visite technique, à Ouaga-inter, à la gare routière, au centre de contrôle des véhicules et au port sec, entre autres, ils demandent « seulement à ce qu’on l’ouvre » avant d’avoir un début de fin de crise face à cette situation.
« Si tout de suite la mairie sort un communiqué pour dire que la circulaire n’est pas concernée la mesure, la seconde qui va suivre, vous allez voir que les chauffeurs des camions vont commencer à circuler. Si on nous ouvre rien que cette voie, vous allez voir que le mouvement d’humeur va s’arrêter », a martelé Marcel Kaboré, chauffeur. Même du temps de Simon Compaoré, ex-maire de Ouagadougou, malgré sa « ténacité », il n’a pas pris de telles « mesures inacceptables », s’est offusqué un anonyme.
Dans un communiqué publié ce mercredi 22 mai, la police nationale, « sans préjuger du bien-fondé des revendications des chauffeurs, invite l’ensemble des transporteurs routiers au calme et à la retenue et à reprendre convenablement le service dans le respect des textes en vigueur ». Le texte rappelle aux manifestants que le « contexte sécuritaire nous invite tous à plus de civisme et de patriotisme ».
Par Bernard BOUGOUM