Ils l’ont promis, ils l’ont fait! Depuis cette nuit du mercredi au jeudi, aux alentours de 3h, le président malien, démissionnaire ou démissionné, c’est selon, est libre de ses mouvements. Ibrahim Boubacar Keïta, qui était retenu à Kati, par les nouveaux hommes forts du Mali, a même retrouvé sa résidence privée de Sebenikoro, d’où il a été extrait, le mardi 18 août dernier, sous bonne escorte militaire. Mieux, la junte militaire qui a arbitré la crise politique aiguë qui plongeait le Mali dans un chaos dont il se relèverait, peut-être, avec des stigmates profonds, permet même à l’ancien président de se rendre à l’extérieur, probablement à Abu Dhabi, aux Emirats arabes unis, pour y poursuivre un protocole sanitaire.
Toutefois, avec d’autres dignitaires du régime dont la justice malienne pourrait avoir besoin dans l’œuvre de salubrité que le Comité national pour le salut du peuple (CNSP) compte engager pour faire rentrer le Mali dans les fonds détournés des caisses de l’Etat, IBK devrait pouvoir se rendre disponible. A ce titre, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) se porte garante, elle qui a été désavouée et décontenancée par la démission du même IBK dont elle exigeait la réinstallation.
Comme quoi, les militaires de Kati font montre d’une ouverture d’esprit bien au-dessus de la moyenne et d’un sens du dialogue poussé, pour une grande muette que l’imaginaire populaire présente comme fermée et n’agissant qu’avec la force ou la barbarie selon certains. En tout cas, ils sont loin des diablotins enragés, inhumains et sans culture politique, que la CEDEAO voulait jeter en pâture au monde. Les dirigeants de la sous-région, plus précisément l’Ivoirien Alassane Ouattara et le Guinéen Alpha Condé, la ligne dure de la CEDEAO qui voulait faire passer au bûcher les militaires de Kati, sont certainement confus, après cette belle leçon d’humilité et surtout d’humanisme que viennent de leur infliger leurs «fistons».
Mais les présidents ivoirien et guinéen, dont le premier court vers le fameux troisième mandat anticonstitutionnel, alors que le second est fortement suspecté de vouloir y aller également, pouvaient-ils agir autrement? Dans leur opposition sans concession aux événements du 18 août au Mali, ils étaient loin de défendre un quelconque tort fait au processus démocratique, mais pleuraient plutôt ce sort que le peuple réserve, tôt ou tard, aux dirigeants pour qui le pouvoir est un moyen d’oppression qu’il faut garder à vie, et à tout prix.
Il est temps que la CEDEAO des chefs de l’Etat, pas celle à laquelle aspirent les peuples, et tous ces pays et institutions qui continuent de mettre le Mali en quarantaine, en l’excluant, entre autres, de leurs instances ou en suspendant leurs relations avec ce pays, mettent balle à terre. Les sanctions et embargo, ne serviront qu’à étouffer un peuple malien qui a toujours serré la ceinture pour permettre à IBK et son clan de porter leurs bretelles.
Et pendant ce temps que la corruption, le népotisme, la gabegie, le clientélisme, le viol des droits de l’homme, l’absence de toute liberté d’expression, en somme, la mal gouvernance, s’étaient érigés en mode de gouvernement au Mali, où donc étaient les censeurs et les parangons de démocratie d’aujourd’hui? Et sans cette intervention de l’armée qui est, comme, venue parachever les manifestations très populaires du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), le peuple malien, serait contraint encore, pendant trois années, à subir le pouvoir IBK.
Il faut que le CNSP, continue sur la lancée des décisions judicieuses, dans l’intérêt du peuple et que les dirigeants africains qui se réunissent une fois de plus sur le cas malien, ce 28 août, fassent preuve du même tact et de la même souplesse que les militaires, afin que la transition politique inévitable qui attend le Mali, soit le fruit de négociations bien pensées, que ce soit dans sa durée que des hommes, militaires ou civils, qui vont la porter. Le Mali n’a plus droit à l’erreur? Et ce serait dommage que les pressions extérieures, venues de toutes parts, imposent à ce pays, une transition qui, pourtant est très déterminante pour son retour dans le train de la démocratie et du développement. Il faut aider le Mali au lieu de le couler!
Par Wakat Séra