Accueil A la une Anciens puissants devant la justice: le général Aziz allonge la liste

Anciens puissants devant la justice: le général Aziz allonge la liste

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Mohamed Ould Abdel Aziz

Le général Mohamed Ould Abdel Aziz, ancien président de la Mauritanie, accusé de «corruption, détournement de biens publics et blanchiment d’argent» et inculpé le 12 mars dernier, a été mis aux arrêts ce mardi. S’il a toujours nié les faits, l’ancien homme fort de Nouakchott, a tout de même été placé en détention par un juge du pôle de lutte anti-corruption du parquet de Nouakchott Ouest. Un harcèlement judiciaire sur fond de règlement de compte politique. C’est ce que dénonce contre sa personne, le général qui durant une décennie de pouvoir, soit de 2008 à 2019, a fait la pluie et le beau temps, embastillant ou tenant loin de la Mauritanie, ses opposants les plus teigneux. Bien des libertés dont celle d’expression, notamment la presse, ont fait les frais de ce régime de fer. Seuls étaient autorisés à vivre, les médias ayant fait allégeance au pouvoir. Les autres survivaient ou mettaient la clé sous le paillasson, mis en quarantaine d’annonce, et subissant mille et une autres tracasseries.

Il y a bien une vie après le pouvoir. Et la sienne, le général Aziz la passera à émarger presque au quotidien au commissariat et dans les couloirs de la justice, jusqu’à cette arrestation qui le conduira probablement, pour ne pas dire certainement, à un procès qu’il faut souhaiter équitable pour l’ancien chef de l’Etat mauritanien qui s’inscrit aujourd’hui, dans un registre d’opposant pur et dur au nouveau pouvoir. Le «tout puissant», seul capitaine du navire mauritanien, était, pourtant, loin de s’imaginer pareil sort, lui à qui succédait en août 2019, l’ami de quarante ans, Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, général comme lui, donc son frère d’armes. Mais l’histoire se répète souvent.

En Angola, le président Joao Lourenço n’a pu arrêter, et aurait même plutôt encouragé, la machine judiciaire à broyer l’empire des Dos Santos, la justice s’étant mis aux trousses des enfants de l’ancien chef de l’Etat angolais, et de José Eduardo Dos Santos himself. En Afrique du Sud, le truculent Jacob Zuma, s’est retrouvé à la barre, accusé de plusieurs scandales de corruption, alignés durant son règne, de 2009 à 2018. L’ancien président égyptien Mohamed Morsi, de son vivant, et qui faisait face à une avalanche de procès, a vu sa peine de 20 ans de prison, confirmée par la cour de cassation de son pays, en octobre 2016.  La liste n’est pas exhaustive et n’est sans doute pas fermée, sauf que l’Afrique ne détient pas la palme d’or des dirigeants poursuivis ou condamnés par la justice.

En France, Jacques Chirac, qui portait comme par hasard le surnom de «Chirac l’Africain», a écopé, le 15 décembre 2011, de deux ans de prison avec sursis, pour «abus de confiance, détournements de fonds publics et prise illégale d’intérêt», dans l’affaire dite des «emplois fictifs de la ville de Paris». Plus récemment, l’ancien président Nicolas Sarkozy, est embarqué dans un cycle de procès et connaîtra, le 30 septembre prochain, la sentence qui lui sera réservée dans l’affaire Bygmalion. En attendant, il est requis contre le prédécesseur de François Hollande, un an de prison, dont six mois avec sursis et 3750 euros d’amende, pour dépenses excessives de sa campagne présidentielle en 2012. En Italie, Silvio Berlusconi, «Il Cavaliere», a traîné ses procès également, tout comme en Allemagne, l’ancien Chancelier Helmut Kohl, mort le 16 juin 2017, a été poursuivi dans l’affaire des «caisses noires».

Le général Mohamed Ould Abdel Aziz, allonge donc cette liste peu glorieuse de dirigeants qui ont dû faire face à la justice, après leurs règnes respectifs. «Dura lex sed lex», dit, implacable la maxime pour dire que «dure est la loi, mais c’est la loi». Ce n’est pas moins mal que les puissants d’hier soient jugés aussi, rappelant cet article presque universel de la plupart des Lois fondamentales, selon lequel, «tous les hommes sont égaux devant la loi». Leçon que doivent méditer tous ces puissants d’hier devenus, après, aussi vulnérables qu’un ver de terre.

Par Wakat Séra