Mort ce dimanche 3 octobre à 78 ans, Bernard Tapie, après des hommages bien mérités, dont ceux de son antre, le Stade Vélodrome de Marseille, rejoindra sa dernière demeure, ce vendredi. C’est toujours le choc, dans les mille et un foyers où, traînent, forcement quelque part, ne serait-ce qu’un vieux poster jauni de l’Olympique de Marseille, le club français qui a toujours joui, le plus, de sympathie sous les tropiques. La douche a été aussi froide en Afrique, que sur le Vieux Port. Homme-orchestre, il l’aura été, durant son passage sur cette terre, qui aura fait voir toutes les facettes de la vie au monstre des affaires, à l’ancien ministre de la ville du gouvernement de Pierre Bérégovoy, au chanteur, au comédien, au voyou, au bonimenteur, au héros, au menteur, à l’ami, à l’ennemi à abattre, etc. Il a porté tous les qualificatifs, l’enfant né dans le 20è arrondissement de Paris, qui s’est entiché de l’Olympique de Marseille, club qu’il a racheté en 1983 et dont il fit, en 1993, le seul a inscrire le nom de la France sur un trophée de la ligue européenne des champions.
Cette aventure fantastique qui arrachera des pleurs à ce dur à cuire, à la mâchoire carrée, a été vécue en Afrique comme la victoire d’une équipe nationale locale. La raison en est toute simple: c’était la bande à Basile Boli et Abedi Ayew Pelé, le premier ayant été le seul buteur sur un coup de tête rageur, de cette finale historique, suite un corner savamment botté par le second. L’Ivoirien d’origine et le Ghanéen, venaient de concrétiser le bonheur rêvé pendant des années, par l’une des 20 plus grandes fortunes de France des années 1990. Mais la «success story» écrite depuis la Cité phocéenne, par un battant, et même un combattant, de pure race, deviendra vite une histoire de coups durs. La troisième partie du match de sa vie, Bernard Tapie la vivra, plus ou moins, en cauchemar. S’il a donné des coups dans la vie, il recevra également bien des coups de la vie. Plusieurs mois de prison pour corruption et subornation de témoins dans l’affaire du match OM contre Valenciennes qui a défrayé la chronique en son temps, ont vite sifflé la fin de l’ascension du président du club qui a également été dirigé par une autre «grande gueule» africain, l’inénarrable sénégalais, Pape Diouf, mort lui, du Covid-19 le 31 mars 2020. Et ce n’était que le début de la fin. Le calice, Bernard Tapie le boira jusqu’à la lie, traqué par la dette financière, harcelé par les affaires judiciaires et poursuivi par la déchéance politique.
Les uppercuts et les crochets, «Le Boss» en encaissera, se relèvera de certains, mais tombera finalement sur cette pelouse de combats épiques qu’il a fait de sa vie, terrassé par un cancer qui le mettra KO, malgré sa farouche résistance de lutteur. Les chats aux 9 vies, c’est de la pure légende qui remonte jusqu’à l’Egypte ancienne. Mais la légende Bernard Tapie, elle a bel et bien existé et survivra à la disparition tragique du charismatique et controversé artiste touche-à-tout qui a laissé derrière lui, une oeuvre comme savent en fabriquer des hommes hors-pairs qui se comptent sur les doigts d’une main dans leur époque. Et comme l’a dit le célèbre poète, Birago Diop, pour ne pas le citer, en Afrique, «les morts ne sont pas morts». Bernard Tapie sera dans les rebonds de balle, même sur les terrains de fortune de latérite qui fabriquent les célèbres footballeurs africains qui ont fait et continueront d’écrire l’histoire glorieuse de l’OM, aujourd’hui orphelins de Bernard Tapie. Abedi Pelé, Didier Drogba, Taye Taiwo, Mamadou Niang, Stéphane Mbia, Charles Kaboré, Pape Fall, pour ne citer que ces champions, pleurent ta mort, mais à l’instar de nombreux africains ils peuvent être fiers d’être allés «Droit Au But» avec l’OM, avec ou sans toi.
Salut «Le Boss»!
Par Wakat Séra