Au commencement était Serval. Appelée au secours par le Mali pour bloquer l’avancée des djihadistes du nord vers Bamako, la France de François Hollande n’a pas mis du temps pour s’exécuter. Les combats ont été rudes, mais l’opération portait bien son nom de Serval, ce carnivore de plus de 6 kg, classé parmi les espèces les plus dangereuses. De janvier 2013 à juillet 2014, le carnivore a dévoré bien des proies, des djihadistes qui montaient à l’assaut de la capitale malienne.
La triple mission assignée à Serval par le chef gaulois de l’époque, qui répondait ainsi au SOS de son homologue dans le temps, le président malien Dioncounda Traoré, était de bloquer l’avancée des terroristes vers Bamako, de sécuriser la capitale et de permettre au pays de recouvrer son intégrité territoriale. Car, la France, après avoir apporté, aux côtés de l’armée malienne, cet appui salvateur au Mali et à la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), n’avait pas vocation, à pousser racines sur les rives du Djoliba.
Mais cette déclaration du président français, au moment des faits, de faire partir le plus tôt possible les soldats français du Mali après leurs heures de gloire, c’était avant son séjour triomphal, en février 2013 à Tombouctou et Bamako, où il a été accueilli en héros. Sans doute toujours dans l’euphorie de la victoire, Hollande, a affirmé sa détermination à éradiquer le terrorisme. La guerre est ainsi déclarée sur la durée contre l’hydre terroriste, mais, se posait également, le piège dans lequel tombera la force Barkhane, née sur les cendres des opérations Serval et Epervier, pour en poursuivre l’œuvre de salubrité.
Si entretemps, la hache de guerre est reprise par Emmanuel Macron, les objectifs de départ demeurent les mêmes pour Barkhane. Mieux c’est toute la région du Sahel qui devient le terrain de chasse contre les groupes armés salafistes djihadistes. Sauf que la réalité du terrain sera toute autre. L’ennemi commun au Mali, au Tchad, au Burkina Faso, à la Mauritanie et au Niger, qui constituent le G5 Sahel, fait plus que de la résistance. Il est devenu un assaillant à l’appétit décuplé par ses attaques meurtrières qui endeuillent au quotidien, les populations civiles et les armées nationales.
Barkhane, malgré l’augmentation de son effectif, qui, de 4500 soldats passe à 5100, ne baisse pas non plus les canons. Au risque de la vie de ses enfants, dont 58 sont tombés dans le sable chaud du Sahel, de 2013 à nos jours, la France reste engagée dans ce combat asymétrique qui ne connaît aucune règle de guerre conventionnelle. Essoufflée, car se retrouvant seule au front, la force conjointe du G5 Sahel après avoir poussé son premier vagissement n’ayant jamais pu mettre un pas devant l’autre, a fortiori, se lancer dans une guerre meurtrière et sans fin, la France fait appel à ses partenaires européens. Et la force Takuba vit le jour au Mali.
Elle devait suppléer à la réorganisation et la réduction des effectifs de Barkhane, projetés pour tourner autour de 2500 et 3000. Mais les nouveaux maîtres de Bamako, le colonel Assimi Goïta et ses troupes, auteurs de deux putschs en moins d’une année, et accrochés à un pouvoir qu’ils devaient passer aux civils suite à des élections ouvertes prévues pour la fin de ce mois de février, en ont voulu autrement.
Les militaires et leur gouvernement, après déjà un an et demi de pouvoir, demandent une transition de 5 ans, soit la durée normale d’un mandat constitutionnel. Ce qui provoque l’ire de la CEDEAO et de la communauté internationale…moins la Russie et la Chine. Pire les putschistes pactisent avec la société privée de sécurité russe, Wagner, que les Européens et les Etats-Unis considèrent comme une bande de mercenaires. La cohabitation avec Wagner étant devenue impossible, et sous la pression des Maliens, Barkhane décide donc de plier bagage du Mali, pour aller voir ailleurs.
La demande de partenariat contre le terrorisme étant très forte, compte tenu des attaques des forces du mal qui visent, désormais, des pays du Golfe de Guinée, comme le Bénin, la Côte d’Ivoire et le Togo, avec pour cible potentielle le reste de l’Afrique de l’ouest, Barkhane ou Takuba, même si leur avenir sera loin d’être un long fleuve tranquille, ne chômeront certainement pas.
Pour le moment, l’histoire retiendra que c’est le même peuple malien qui a célébré François Hollande et les éléments de Serval comme des héros, c’est ce même peuple qui a fait des soldats de Barkhane et Emmanuel Macron, des zéro. Quelle sera la suite de ce feuilleton qui domine l’actualité du 6e sommet Union européenne (UE) et Union africaine (UA) qui ferme ses portes ce vendredi après les avoir ouvertes la veille, à Bruxelles, sous le maillet de Emmanuel Macron, l’actuel président de l’UE? Les épisodes à venir ne manqueront certainement pas de piment!
Par Wakat Séra