Ainsi donc, le colonel Assimi Goïta, le chef de la junte militaire au pouvoir au Mali, n’ira pas à Accra pour le énième sommet de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui se penche sur l’état de son pays. Il pourra juste, intervenir dans les débats, grâce à la magie de la visio-conférence, si, bien entendu, les chefs de l’Etat de l’organisation sous-régionale y consentent. Sinon, le Mali n’aura pas droit à la parole durant cette rencontre qui, pourtant, pourrait constituer un tournant déterminant pour son avenir. Alors qu’il entendait y faire participer une délégation au niveau ministériel, le Mali doit renoncer à cette option, parce que le format du conclave d’Accra répond à celui d’un huis-clos entre chefs de l’Etat. Or, le colonel Assimi Goïta qui est loin de n’avoir que des amis parmi ses pairs qui, eux, sont légitimés par les urnes, ne voudrait pour rien au monde, sauf revirement de dernière minute, se retrouver seul face à autant de regards hostiles.
Qui pis est, Assimi Goïta se rendrait à Accra alors que se refermait à peine la tombe de l’ancien Premier ministre malien, Soumeylou Boubèye Maïga, inhumé ce jeudi, suite à son décès ce lundi dans une clinique de Bamako alors qu’il croupissait dans les geôles de la Transition. Une Transition qui l’a accusé de détournement de l’argent public, mais n’a pas daigné, le faire évacuer dans un centre de santé en mesure de soigner le mal dont il souffrait et qui était bien connu des autorités maliennes. Pourtant, ce ne sont pas les SOS qui ont manqué, venant de l’épouse du défunt, des proches du patient, et des chefs de l’Etat de la CEDEAO ceux même qu’aurait retrouvés, en face de lui, comme des juges, le colonel Assimi Goïta.
L’épreuve aurait pu être bien insupportable pour le colonel, qui porte déjà la triste réputation de double putschiste. Or, le colonel aurait fait le déplacement dans la capitale ghanéenne, avec, dans la poche de sa vareuse, la décision de la cour de justice de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), demandant la suspension des sanctions économiques en vigueur contre le Mali. Une victoire d’étape qui doit pouvoir renforcer les chances d’une entente entre le Mali et la CEDEAO, l’institution présidée par le chef de l’Etat ghanéen, Nana Akufo-Addo étant dans des prédispositions certaines pour accompagner les transitions politiques d’après putsch, que ce soit au Mali, en Guinée, ou au Burkina Faso sous certaines conditions.
En tout cas, s’il faut applaudir la suspension de ces sanctions et espérer, à l’instar des frontières fermées entre les pays de la CEDEAO et le Mali, leur levée pure et simple, afin d’alléger les souffrances des Maliens et même des autres peuples de la sous-région, il faut également exiger des putschistes qu’ils reviennent à une durée de transition plus raisonnable. Peut-être que le sommet d’Accra de ce vendredi trouvera le juste milieu entre les deux ans que proposeraient désormais les autorités maliennes qui doivent savoir raison garder, et les douze mois qu’impose maintenant la CEDEAO.
Un compromis qui serait salvateur pour tous, cette crise provoquée par l’entêtement des hommes en kaki qui ont profité de deux coups d’Etat pour s’accrocher aux lambris dorés du palais de Koulouba, n’ayant que trop duré pour un Mali asphyxié par les attaques terroristes.
Par Wakat Séra