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Burkina: après le procès historique, l’épreuve de la réconciliation historique

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Le leader de la Révolution burkinabè, le capitaine Noël Isidore Thomas Sankara

Comment transformer l’essai du procès historique de l’assassinat de Thomas Sankara et Douze de ses compagnons en réconciliation autant historique pour le Burkina? C’est le nouveau défi qui attend les Burkinabè qui, après 35 années d’une si longue attente ont assisté au jugement d’un dossier que même les plus optimistes de nature n’imaginaient plus dans un prétoire. Non seulement le procès a eu lieu, durant 6 mois, mais il s’est dénoué sur des sentences au-delà des peines requises par le parquet militaire, et sans doute dépassant les attentes des parties civiles. Peut-être que des recours seront déposés par des condamnés, mais en attendant, c’est une page de l’histoire de la justice burkinabè, et de l’histoire du Burkina tout court, qui vient d’être tournée.

Va-t-elle s’ouvrir sur une autre, celle de la réconciliation tant souhaitée par des Burkinabè en quête d’une cohésion sociale et d’une paix qui semblent fuir le Pays des hommes intègres mis en joue depuis plus de 7 ans par les jihadistes et autres Hommes armés non identifiés? En tout cas, plus que la satisfaction des uns et l’amertume des autres, du fait du quantum des peines distribuées par le tribunal, la vérité judiciaire a été dite et la mémoire du père de la révolution burkinabè et héros de la jeunesse africaine réhabilitée.

Certes, les affaires de crimes de sang et de crimes économiques ne finissent jamais dans un pays. Mais il serait plus que salutaire pour le Burkina, à défaut de se débarrasser pour de bon de son statut de «république des procès» qui lui va assez mal, d’opter pour une accalmie afin d’affronter dans l’unité, les terroristes qui font plus que grignoter des pans entiers d’un territoire national dont l’intégrité n’a jamais été autant éprouvée. Aujourd’hui, si par peur des mots, la situation du Burkina n’est pas jugée dramatique, elle est tout de même plus que préoccupante. Les morts ne se comptent plus, tant dans les rangs des forces armées qu’au sein de populations civiles désemparées, et les vagues des déplacés internes qui déferlent sur les villes et villages encore en sursis, ne cessent d’enfler.

Ceci découlant de cela, la vie chère s’est installée en reine et le Burkina pourrait difficilement échapper à cette famine que les experts craignent qu’elle s’abatte bientôt, si rien n’est fait, sur l’Afrique de l’ouest et le Sahel. Et même si les nouveaux maîtres de Ouagadougou ont donné rendez-vous dans cinq mois pour évaluer le chemin parcouru, il n’en demeure pas moins que l’inquiétude est grande. Surtout que les dirigeants par intérim sont pris en sandwich par des populations noyées dans un puits sans fond de problèmes et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui les tient à l’œil sur la durée de la transition qui est trop longue, vue d’Accra, capitale de la présidence tournante de l’organisation sous-régionale.

Mais les clins d’œil du destin, bien interprétés, sont prometteurs pour le Burkina Faso, qui, ce même 6 avril où justice a été rendue à un ancien président du Faso, icône de tout un peuple, connaissait la libération d’un autre ancien président du Faso, lui renversé par le coup d’Etat du 24 janvier. En effet, Roch Marc Christian Kaboré, maintenu en résidence surveillée dans une villa de l’Etat depuis sa chute, est retourné auprès des siens, même s’il doit encore supporter, la présence de militaires devant sa maison de la Patte d’oie, un quartier populaire de Ouagadougou, où il ne pourra recevoir que des visites filtrées, sur autorisation des autorités.

En tout cas, soudés comme 15 rugbymen solidaires sortant d’une mêlée bien serrée, les près de 21 millions de Burkinabè doivent pouvoir transformer l’essai du procès de l’assassinat de Thomas Sankara et ses Douze compagnons, pour la victoire de la réconciliation sur la haine et la division. Mais pour cela, il faudra parvenir au désarmement des cœurs!

Par Wakat Séra