Comme la centaine de femmes violées en 2009, plus précisément le 28 septembre dans le grand stade éponyme de Conakry, cette victime qui a témoigné sur les ondes de la «radio mondiale» est marquée pour la vie de la souillure odieuse. Car, de l’assaut sauvage de militaires en furie et en rut, son corps en portera non seulement les traces indélébiles mais le fruit de semences dont le ou les propriétaires sont sans visage. Un enfant que la violée du 28-Septembre couve pourtant de tout son amour, malgré le traumatisme inimaginable qui est celui de toutes ces femmes qui subissent cette ignominie bestiale, qui font d’elles des bannies d’une société africaine qui les rejette sans autre forme de procès.
Contraintes à un silence rongeur, elles portent ce poids jusqu’à la fin de leur existence sur terre, sous le regard moqueur et accusateur des autres membres de la communauté, y compris de leurs propres parents. Et même du bourreau, souvent connu, parfois pas! Triste sort donc pour la centaine de femmes violées par des militaires sexes en avant, mais aussi canons en l’air! Car, les «bérets rouges» ont été envoyés en mission pour nettoyer le stade de ses occupants qui, ce jour-là, n’étaient pas des fans du Syli, la célèbre équipe nationale de Guinée.
Ce sinistre 28 septembre, l’antre des «Eléphants» guinéens était plutôt rempli de milliers de manifestants qui se sont rassemblés pour dire un «non» ferme et bruyant aux ambitions illégitimes du capitaine Moussa Dadis Camara, déterminé, lui, envers et contre tous, à garder un pouvoir qu’il a volé en décembre 2008, à la mort du titulaire, le général Lansana Conté. Et ce qui devait arriver arriva! Le carnage fut sans commune mesure! Un drame impuni depuis 13 ans, mais dont le procès s’ouvre ce mercredi. Ne serait-ce que par l’espoir de justice qu’il suscite chez les violées et les parents des morts, ce jugement doit être salué. Il commence d’ailleurs mal pour le principal accusé, le capitaine Moussa Dadis Camara qui, rentré de son long exil burkinabè dans la nuit du samedi au dimanche, pour «laver son honneur», a passé sa première des nuits sans liberté qui l’attendent tout le long du procès, en prison.
En effet, alors que lui et cinq de ses co-accusés s’attendaient à comparaître libres, ils ont vite déchanté, ce mardi, suite à leur convocation devant le greffe. Entre autres, les officiers Claude Pivi et Blaise Guémou, tout comme le ministre de la Santé au moment des faits, Abdoulaye Cherif Diaby, et bien entendu le fougueux capitaine Dadis Moussa Camara, tous des intouchables à l’époque, se sont retrouvés derrière les barreaux. Ils y ont rejoint cinq autres accusés qui étaient déjà «au frais», mis en cause dans cette horreur du 28-Septembre.
Moussa Dadis Camara, garde-t-il encore toute sa sérénité, lui qui était pourtant si sûr de son affaire, et était même devenu un laudateur transi de l’actuel chef de la junte militaire qui l’avait fait revenir au bercail, avec d’autres comme le général Sékouba Konaté? A moins que le capitaine qui pourrait bien être simplement lâché par le colonel ne soit réellement décidé à faire éclater la vérité, et toute la vérité, pour soulager les victimes et parents des victimes du monstrueux drame du stade du 28-Septembre, quitte à passer par la case prison.
Quelle sera la nouvelle stratégie de Dadis Camara, s’il se sent dans la peau du mouton de sacrifice de l’armée guinéenne, dont l’actuel chef de la junte militaire au pouvoir était déjà l’un des patrons lors du massacre à ciel ouvert du 28 septembre 2009? Celui qui, lors de sa si longue convalescence à Ouagadougou, s’il se retrouve pris au piège, offrira-t-il le grand déballage au public, quitte à mettre dans l’embarras, et plus, le colonel Mamady Doumbouya?
En tout cas, le procès tant attendu, avant même de commencer livre ses premières surprises et réserve encore, certainement, bien des rebondissements. A moins que ce ne soit une des parodies de justice dans lesquelles excellent ceux qui nous gouvernent et bien vite apprises par le colonel putschiste de Conakry!
Par Wakat Séra