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L’UE juge «inquiétante» la suspension de comptes Twitter de journalistes par Elon Musk

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Le patron de Twitter, Elon Musk

L’Union Européenne a averti vendredi 16 décembre Elon Musk que Twitter pourrait faire l’objet de sanctions dans le cadre d’une future loi sur les médias, après la suspension « inquiétante » de plusieurs comptes de journalistes sur le réseau social.

Elon Musk fait de nouveau parler de lui pour sa gestion de Twitter. Cette fois, le patron du réseau social est pointé du doigt pour avoir suspendu, jeudi 15 décembre, les comptes de plusieurs journalistes américains, dont des reporters de CNN, du New York Times et du Washington Post ayant écrit ou eu des propos critiques à son égard.

Le milliardaire, patron de Telsa, qui a acquis la plateforme il y a quelques mois en se posant comme le garant de la liberté d’expression, a justifié ainsi sa décision dans un post qu’il a épinglé sur son compte :« Me critiquer toute la journée est tout à fait acceptable, mais révéler ma position en temps réel et mettre ma famille en danger ne l’est pas (…) Les mêmes règles s’appliquent aux ‘journalistes’ comme à tout le monde. »

Musk dénonce le partage « de coordonnées d’assassinat »

La veille, mercredi 14 décembre, Elon Musk avait commencé par suspendre un lot de comptes Twitter destinés à suivre les déplacements des jets privés de plusieurs milliardaires, dont le sien, au nom de la protection de la vie privée et de la mise en danger de sa famille. « Tout compte révélant les informations de localisation en temps réel de quiconque sera suspendu, car il s’agit d’une violation de la sécurité physique. Cela inclut la publication de liens vers des sites contenant des informations de localisation en temps réel. Publier des lieux où quelqu’un s’est rendu avec un léger retard n’est pas un problème de sécurité, donc ça va».

Si Twitter n’a pas précisé pourquoi ces comptes avaient été suspendus, ni la durée de leur suspension, Elon Musk a toutefois livré quelques indications dans une rafale de tweets postés dans la nuit de jeudi à vendredi. « Les comptes impliqués dans du doxing reçoivent une suspension temporaire de 7 jours. » On y apprend que le patron de Twitter reproche aux reporters suspendus le partage « des données de localisation en temps réel». Il les qualifie de « coordonnées d’assassinat ». CNN et le Washington Post ont démenti la diffusion par leurs journalistes de telles informations.

Dans son dernier tweet avant la fermeture de son compte, l’un des reporters visés, Drew Harwell dénonçait néanmoins la suspension par le réseau social au petit oiseau bleu du compte de l’une de ses plateformes concurrentes, le dénommé Mastodon. Tous les liens présents sur Twitter, renvoyant vers les serveurs Mastodon, ont d’ailleurs été bloqués.

Une définition mouvante de la liberté d’expression

Il paraît loin le temps du 7 novembre dernier où Elon Musk affirmait pourtant ceci: «Mon engagement envers la liberté d’expression s’étend même à ne pas interdire le compte suivant mon avion, même si c’est un risque direct pour la sécurité personnelle. » Un mois et demi plus tard, sa définition de liberté d’expression semble avoir évolué.

Une situation étonnante ? Pas vraiment. Depuis plusieurs semaines, le patron de Twitter enchaîne les postures contradictoires : après avoir rétabli des comptes auparavant bannis par le réseau social, dont celui de Donald Trump, il a suspendu celui de Kanye West après la publication de plusieurs messages antisémites.

Une décision « inquiétante » pour l’UE

Ce vendredi, plusieurs personnalités et organisations ont condamné la suspension des comptes de ces journalistes. « Il est impossible de concilier les aspirations de Twitter en matière de liberté d’expression avec la purge de comptes de journalistes critiques », a notamment commenté le responsable de l’Union américaine pour les libertés civiles. « La liberté de la presse ne doit pas être activée et désactivée à convenance », a dénoncé le ministère allemand des Affaires étrangères dans un tweet. « Pour cette raison, nous avons un problème avec Twitter », a ajouté la diplomatie allemande.

Le ministre français de la Transition numérique, Jean-Noël Barrot, s’est dit « affligé par la dérive dans laquelle Elon Musk précipite Twitter : La liberté de la presse est au fondement même de la démocratie. Attenter à l’une, c’est attenter à l’autre. »

L’UE s’est également positionnée. « Les nouvelles concernant la suspension arbitraire de journalistes sur Twitter sont inquiétantes», a indiqué la commissaire européenne Vera Jourova sur le réseau social.

«Elon Musk devrait en être conscient. Il y a des lignes rouges. Et des sanctions, bientôt. » Vera Jourova, commissaire européenne. «La loi sur les services numériques de l’UE exige le respect de la liberté des médias et des droits fondamentaux. Cette exigence est renforcée par notre loi sur la liberté des médias », a-t-elle conclu.

Source : RFI