«J’ai décidé de ne plus donner des coups, parce que le temps de donner les coups est passé (…) Je demande aux présidents Bédié, Ouattara et moi-même, de travailler pour les générations futures, pour un pays pacifié». Foi de l’ancien président de Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, après sa réclamation auprès de la CEI pour la réintégration de son nom sur les listes électorales. Il a tout de même ajouté que «le combat n’est pas terminé». C’est donc clair, l’ancien président ivoirien, après son séjour à la Cour pénale internationale (CPI) d’où il est sorti acquitté de tous les crimes qui lui ont été reprochés, n’entend pas continuer à faire dans la figuration. Il ne veut plus rester sur le banc de touche alors que son équipe a besoin de lui sur le terrain où le match est intense, entre l’opposition et le pouvoir. Il conteste avec véhémence le carton rouge qui lui a été infligé pour une faute, en l’occurrence le «braquage de la BCEAO en pleine crise postélectorale», qu’il ne reconnaît pas.
Même la VAR, l’assistance vidéo, à suivre les arguments avancés par le capitaine du PPA-CI (Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire), contre sa radiation des listes électorales, lui donnent raison. Sans oublier que les arbitres de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) qui suivent, sans passion, cette compétition…passionnée entre opposition et pouvoir, ont demandé le retour du métronome du PPA-CI sur la feuille de match, dont son nom a été rayé. Pourtant, en attendant la grande finale de la présidentielle qui se prépare pour 2025, et dont les grandes manoeuvres sont déjà en cours, les municipales et régionales, c’est dans trois mois, c’est-à-dire en septembre. Mais, Ibrahime Coulibaly-Kuibert, le président de la Commission électorale indépendante (CEI), et sélectionneur national, jusqu’à la réclamation officielle de Laurent Gbagbo ce jour, demeure inflexible. La faute de «braquage de la BCEAO» pour laquelle le feu-follet du PPA-CI a été, en son absence, jugé et condamné pour 20 ans de prison, le disqualifie pour de bon.
Qui donc peut ramener Laurent Gbagbo dans le jeu, si ce n’est le président ivoirien qui, malheureusement joue en face et a trouvé ainsi, l’occasion de mettre hors-jeu un adversaire coriace? En effet, après avoir évité d’accorder l’amnistie à son prédécesseur dont il a facilité le retour au bercail dans son œuvre louable de réconciliation nationale, Alassane Ouattara garde sur la tête de son «jeune frère Laurent» cette épée de Damoclès qui peut tomber à tout moment. Déjà, le jugement pour lequel Laurent Gbagbo dit n’avoir jamais reçu de convocation, encore moins de décision de justice, alors que «tout le monde, tout l’univers» sait qu’il logeait à la CPI, le dépouille de ses droits civiques, d’où son éviction des listes électorales.
Que va-t-il se passer, maintenant que le leader du PPA-CI a fait une réclamation en bonne et due forme, dans le cadre du contentieux électoral? Tout est dans les mains d’Alassane Ouattara qui demeure, en réalité, le seul maître du jeu. Cependant, s’il veut rester dans la logique du retour de la cohésion nationale qu’il prône, le chef de l’Etat ivoirien, devrait bien permettre à tous ces opposants, qui sont hors ou dans le pays, dont Laurent Gbagbo, mis à l’écart, de revenir dans le match qui n’en sera que plus ouvert et palpitant pour un public ivoirien qui est lassé des violences électorales causées par des politiciens qui ne se font aucun cadeau.
Certes, la politique est, par excellence, le terrain de tous les coups bas, mais Alassane Ouattara, le président de tous les Ivoiriens doit se mettre au-dessus de la mêlée et donner la preuve de sa sincérité dans son combat pour la réconciliation nationale. Et si la réinscription de Laurent Gbagbo et de bien d’autres opposants doit passer par là, il faut y aller! Après la guerre, il faut aller à la paix!
Par Wakat Séra