Prévu pour se dérouler sur la journée du mercredi 20 décembre, le vote pour la présidentielle, les législatives, les provinciales et les communales a tiré en longueur, au mépris des dispositions électorales. La République démocratique du Congo vit, sans aucun doute, ces pires élections de son histoire. Même les partisans de Joseph Kabila, qui ont boycotté le processus, ont joint leurs voix aux candidats de l’opposition pour dénoncer ce chaos qui a été servi aux Congolais en guise d’élections. Des images insupportables d’une vidéo virale sur la toile montrent même une femme à moitié nue, subissant la bastonnade sauvage d’une foule qui lui reproche d’avoir voté pour un candidat, Moïse Katumbi, pour ne pas le nommer. L’horreur était à son comble durant un mois de campagne électorale et ce le jour des élections. Comme si les élections c’était la guerre!
Tout était réuni pour jeter le discrédit sur ces élections dont les résultats seront, sauf miracle, rejetés par une opposition qui aura servi, inconsciemment peut-être, de caution morale à une réélection en téléchargement du président sortant, Felix Tshisekedi, candidat à sa propre succession. Des prolongations hors-la-loi du vote, selon les opposants et des mouvements de la société civile, causés par, entre autres, des retards d’ouverture de bureaux de vote, des saccages d’urnes, des pannes de machines à voter, des frustrations de déplacés internes se retrouvant dans l’impossibilité de voter. Une situation de chaos, dénoncée par l’opposition, notamment Ensemble pour la République dont le candidat dans la course à la présidentielle n’est autre que Moïse Katumbi.
Tout comme Martin Fayulu, l’autre opposant en vue, Denis Mukwege, qui lorgne également le fauteuil présidentiel, se place dans la même logique et s’indigne de la décision de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de prolonger le vote, craignant du coup que les résultats de ce processus «chaotique» ne soient pas l’expression réelle du vote des électeurs. La seule femme des 19 candidats au scrutin présidentiel, Marie-Josée Ifoku, manifestant un sentiment de déception, est persuadée que la Céni n’était pas prête pour tenir ces élections.
Certes, la date de ce scrutin aux enjeux multiples, était connue depuis bien longtemps et la musique devait être sans fausse note. Ce qui est loin d’être le cas pour l’instant. Mais pourquoi donc tenir ces élections au forceps? Le report d’élections en RD Congo ne serait pas une nouveauté pour des Congolais, habitués à cette situation sous le mandat élastique à souhait de l’ancien président Joseph Kabila. Face aux divers défis, dont celui très exigeant de la logistique, la Céni aurait pu repousser, de quelques jours, voire de quelques semaines ou mois, ce vote qui a été précédé d’une campagne endeuillée et au cours de laquelle tous les coups étaient permis!
Nul n’ignore, surtout pas la Céni, les difficultés de transport du matériel électoral sur cette vaste étendue de 2,3 millions de Km2. Mais, c’est cette même Céni qui, comme prise au piège du temps, s’est mise à lancer des SOS à la veille des élections. Si l’armée nationale, l’Egypte, le voisin de la République du Congo et la Monusco ont répondu favorablement à ces appels de détresse de la Céni, la RD Congo n’a pu tenir le pari d’organiser des élections sans ces couacs auxquels il fallait s’attendre.
En tout cas, la Céni, seule structure habilité à publier des chiffres du vote a promis les premières tendances des ces élections. Une précipitation qui peut paraître bien suspecte pour des élections aussi laborieuses dans leur organisation. A moins que le désordre n’ait été quelque chose de bien organisée pour atteindre un but bien précis, facile à deviner. Mais qu’attendre de ces élections qui ont joué des prolongations, comme dans un match de football à l’issue indécise, et émaillées de doutes et inquiétudes quant à la proclamation des résultats?
Sans risque de se tromper, on peut dire que la Céni en rajoute aux incertitudes dans un pays-continent déjà confronté à la guerre et à l’insécurité chronique.
Par Wakat Séra