Dans ce communiqué, le Procureur du Faso près le Tribunal de Grande Instance Ouaga 1, revenant sur l’affaire KAMAO, explique que cinq manifestants ont été interpellés suite à la bagarre entre militants du Balai Citoyen et du mouvement « Sauvons le Burkina». Ils sont « poursuivis suivant la procédure de flagrant délit pour « participation à une manifestation illicite, participation à une rixe et coups et blessures volontaires ».
Le lundi 05 septembre 2022 une publication sur le réseau social Facebook comportant des propos adressés au Président du Faso était portée à notre connaissance par la Brigade Centrale de Lutte contre la Cyber criminalité (BCLCC). A la lecture il est ressorti que ces propos pouvaient recevoir une qualification pénale et nous avons jugé opportun d’instruire ladite unité de police judiciaire d’ouvrir sans délai une enquête contre l’auteur de la publication et de procéder à son interpellation. La Section de recherche de la gendarmerie de Ouagadougou, étant informée des mêmes publications, a procédé à l’interpellation de son auteur et nous a rendu compte. Instruction lui a été donnée de mettre le mis en cause à la disposition de la brigade spécialisée.
Ce dernier a été entendu et déféré à notre parquet dès le mardi 06 septembre. Il a été poursuivi selon la procédure de flagrant délit pour les faits « d’outrage contre un dépositaire de l’autorité publique » tels que prévus et punis par l’article 352-1 du code pénal, et placé sous mandat de dépôt.
Le mardi 06 Septembre 2022 un groupe de personnes se réclamant du mouvement « Balai Citoyen » s’est retrouvé devant les locaux de la BCLCC pour manifester leur soutien au mis en cause. Ces personnes ont été rejointes plus tard par un autre groupe se réclamant du mouvement « Sauvons le Burkina » qui entendait manifester contre les manifestants du « Balai Citoyen ». Il s’en est suivie une rixe au cours de laquelle au moins une personne a reçu des coups et blessures. Pour faire suite à cette situation, nous avons instruit dès le 07 septembre 2022 l’ouverture d’une enquête par la police judiciaire. Ladite enquête aboutissait, sur nos instructions, à l’interpellation et au déferrement de cinq (5) personnes. Elles ont été poursuivies suivant la procédure de flagrant délit pour « participation à une manifestation illicite, participation à une rixe et coups et blessures volontaires ». Ces faits sont prévus et punis par les articles 354-6, 354-7, 512-19 et 512-25 du code pénal. Elles ont été placées sous mandat de dépôt. Les responsables des deux mouvements (« balai citoyen » et « sauvons le Burkina ») ont été convoqués pour être poursuivis pour organisation de manifestations illicites.
A la faveur de ces deux procédures il nous parait important de faire quelques mises au point :
– Le Ministère public ou « Parquet » est l’instance judiciaire chargée d’exercer l’action publique, de représenter et de défendre les intérêts de la société. Il s’agit de défendre les intérêts de la société et non d’un groupe de personnes ou d’intérêts quelconque.
– Contrairement à certaines allégations, Il est aisé de noter que notre action dans les cas d’espèce n’est guidée que par le seul souci d’exercer nos attributions. Notre rôle est la préservation des valeurs communément admises par la société, notre outil est la loi, et notre limite est celle des moyens humains et matériels dont dispose notre chaîne pénale. Notre parquet exerce sans complexe l’opportunité des poursuites qui est une prérogative reconnue à l’autorité poursuivante.
A titre d’illustration, il sied de faire les rappels suivants :
– Le 21 décembre 2019, monsieur Stélio CAPOCHICHI dit Kemi Séba était poursuivi d’initiative par notre parquet devant le tribunal pour « outrage contre un dépositaire de l’autorité publique ». Il a été reconnu coupable et condamné à une peine d’emprisonnement de deux mois et à une amende de deux cent mille francs le tout assorti de sursis. Cette poursuite avait été stigmatisée par une certaine opinion sans que cela n’entame notre détermination.
– Le 23 mars 2020, pour faire suite aux actes de maltraitance dont certains membres des forces de défense et de sécurité, faisaient preuve vis-à-vis de certains citoyens à l’occasion du couvre-feu décrété pour lutter contre la covid 19, nous avions publié un communiqué. Dans le texte dudit communiqué, nous avons mis en garde les auteurs de ces actes contre les conséquences pénales de leur comportement.
– Le 24 Juillet 2020 nous avons enclenché des poursuites contre monsieur BAYIRE Raouf et quatre autres dont certains étaient reconnus pour être des militants du parti au pouvoir d’alors, pour des faits d’outrage à magistrat, d’injures publics, le tout commis sur les réseaux sociaux. Ils avaient été reconnus coupables et condamnés par la chambre correctionnelle du TGI Ouaga1 à des peines allant de 36 mois dont 12 fermes à 12 mois d’emprisonnement avec sursis.
– Le 21 Février 2022, nous avons saisi la BCLCC d’un message suivi d’un soit transmis l’instruisant d’interpeller et d’entendre le sieur MAIGA Ibrahima, de passage à Ouagadougou entre autres sur des faits d’outrage contre un dépositaire de l’autorité publique, atteinte aux données à caractère personnel, publication de procès-verbaux d’une procédure judiciaire sur Facebook…D’autres sous unités de police judiciaire avaient été aussi instruites de procéder à l’interpellation de la personne mise en cause. Malgré la mobilisation de notre police judiciaire, le mis en cause parvenait à quitter le territoire national dans des conditions non encore déterminées.
La liste n’est pas exhaustive.
A l’heure où notre pays traverse des moments difficiles, notre parquet, à l’instar des autres compartiments de la justice, entend apporter sa contribution au retour de la paix et de la quiétude en jouant son rôle sans parti pris. Nous saisissons cette occasion pour appeler les justiciables de notre zone de compétence à s’abstenir d’avoir des comportements contraires à la loi qui ne feront qu’assombrir davantage un tissu social déjà fort altéré. En tout état de cause notre parquet en tirera les conséquences de droit.
C’est avec un grand intérêt que nous recevons les critiques des justiciables pour peu qu’elles soient constructives, objectives et fondées. Nous n’avons d’autres ambitions que celle de poursuivre les manquements à la loi pénale pour lesquels nous sommes compétents, et ce, dans le seul intérêt de la société.
Fait au Parquet, le 22 Septembre 2022 Le Procureur du Faso YODA Harouna