La Banque africaine de développement a publié ses dernières Perspectives économiques pour l’Afrique de l’Est, qui prévoient une lente reprise dans la région à 4 % en 2022, contre 5,1 % en 2021.
Ce ralentissement est dû aux effets persistants de la Covid-19, aux impacts négatifs des tensions géopolitiques (le conflit entre la Russie et l’Ukraine notamment), aux changements climatiques et à l’invasion dévastatrice des criquets, ainsi qu’aux conflits et tensions régionaux.
Le rapport note qu’en raison de ces obstacles, les pays de la région ont connu une pression inflationniste accrue, notamment sur les denrées alimentaires et les carburants, entraînant une hausse du coût de la vie. Cette situation a entraîné un affaiblissement des monnaies nationales, des inondations et des sécheresses, une contraction de la production agricole, une baisse de l’activité commerciale et un recul de la perception des recettes – entre autres.
Toutefois, la réouverture progressive des économies au niveau mondial pourrait atténuer ces effets négatifs en 2023, avec un taux de croissance prévu de 4,7 %, qui repositionnerait l’Afrique de l’Est comme la région la plus performante du continent en matière de croissance, selon le rapport.
Ce rapport, qui a pour thème «Soutenir la résilience climatique et une transition énergétique juste», a été lancé le 28 octobre 2022.
Dans le cadre de l’élaboration de Perspectives économiques de l’Afrique de l’Est 2022, la Banque africaine de développement a étudié de manière critique divers facteurs qui affectent la croissance dans les 13 pays qui constituent la région Afrique de l’Est. La vulnérabilité de la région aux impacts des effets des changements climatiques, tels que la sécheresse et les inondations, pourrait freiner davantage la reprise, fragile.
Le rapport arrive à point nommé, au vu du coût actuel de la vie qui préoccupe tous les citoyens de la région, a déclaré le ministre des Finances de la Tanzanie, Mwigulu Lameck Nchemba, lors du lancement. La perturbation des chaînes d’approvisionnement régionales, la dette publique et les discussions publiques sur la nécessité de politiques de dépenses en faveur des pauvres dominent le débat, a ajouté M. Mwigulu. Il a souligné que, « malgré l’accélération des investissements dans les infrastructures, il faut faire davantage pour accélérer le développement d’infrastructures durables, y compris les énergies renouvelables pour soutenir l’industrialisation et catalyser une croissance inclusive. » Avant d’appeler à mobiliser des ressources supplémentaires pour élargir l’accès à l’énergie, faisant observer que la République démocratique du Congo est dotée d’immenses ressources en énergies renouvelables pour éclairer l’ensemble du continent.
La directrice générale pour l’Afrique de l’Est de la Banque, Nnenna Nwabufo, a abondé en ce sens, soulignant que la vulnérabilité de la région Afrique de l’Est aux impacts des effets des changements climatiques, comme la sécheresse et les inondations, pourrait y freiner davantage la reprise, fragile. «Cela nécessite des mesures politiques urgentes pour renforcer la résilience macroéconomique, notamment en diversifiant les économies pour résister aux chocs.»
Emmanuel Pinto-Moreira, directeur du Département des économies pays de la Banque, a mis en lumière les principaux défis du développement auxquels le continent est confronté: forte inflation, inflation croissante et changements climatiques, notamment. Il a souligné la nécessité d’approfondir la mobilisation des ressources domestiques pour financer des filets de sécurité sociale en faveur des plus vulnérables et d’infrastructures résilientes aux changements climatiques.
Bien que fragile, la reprise économique en Afrique de l’Est devrait être soutenue à moyen terme, grâce au rebond des activités de services et industrielles, à l’augmentation des dépenses publiques, à la réouverture des voyages et du commerce grâce à la vaccination contre la Covid-19, à la reprise du secteur du tourisme, au renforcement des liens régionaux dans le cadre de la Communauté économique d’Afrique de l’Est et aux politiques macroéconomiques de soutien, a noté Marcellin Ndong-Ntah, économiste principal à la Banque.
M. Ndong-Ntah a ajouté que l’augmentation des coûts du service de la dette, la dépréciation des monnaies nationales, les déséquilibres macroéconomiques, la prolongation du conflit entre la Russie et l’Ukraine, le creusement des inégalités de revenus, l’instabilité politique et la vulnérabilité aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles sont les principaux risques intérieurs et extérieurs qui pèsent sur les perspectives économiques à moyen terme de la région.
Rose Ngugi, directrice exécutive de l’Institut kényan de recherche et d’analyse des politiques publiques (KIPPRA), a invité les pays d’Afrique de l’Est à intensifier leurs efforts pour porter leur taux de croissance annuel à 7 % au moins, soit le taux minimum requis pour s’assurer d’atteindre les Objectifs de développement durable (ODD). Pour ce faire, les pays doivent parvenir à une stabilité macroéconomique interne et externe, a-t-elle ajouté.
Sur le thème du rapport – la résilience aux changements climatiques – Edward Sennoga, économiste principal à la Banque, a fait observer que l’Afrique de l’Est occupe l’avant-dernière place en matière de résilience aux changements climatiques en Afrique ; la plupart des pays de la région se caractérisent d’ailleurs par une grande vulnérabilité et une faible préparation aux changements climatiques. Il a indiqué qu’il y a un besoin urgent d’approches financières innovantes pour combler l’énorme déficit de financement pour lutter contre les changements climatiques.
A lire le rapport, le déficit de financement climatique pour l’Afrique de l’Est s’élèverait, en moyenne, à quelque 60 milliards de dollars par an pour la période 2020-2030, selon les estimations. Les partenariats public-privé, les obligations vertes, les garanties partielles de risque et de crédit, les compensations carbone et le commerce régional de l’énergie y sont présentés comme autant de mesures susceptibles de fournir un financement alternatif pour lutter contre les changements climatiques. Teddy Mugabo, directrice générale du Rwanda Green Fund, s’est fait l’écho de cette approche, en soulignant la nécessité d’instruments de financement innovants et d’une utilisation efficace du marché du carbone.
Pour en savoir plus et lire le rapport sur les Perspectives économiques de l’Afrique de l’Est 2022, cliquer ici