Après l’insurrection, les incertitudes. Ainsi va l’Algérie où la présidentielle annoncée pour le 4 juillet prochain est reportée sine die, après le rejet par le Conseil constitutionnel des dossiers des candidats potentiels, deux illustres inconnus. Plus qu’un simple mauvais casting, c’est un camouflet pour le président par intérim, Abdelkader Bensalah, le patron du Conseil constitutionnel. Un revers de plus, est-on tenté de dire, infligé au pouvoir en réalité aux mains des généraux, et plus particulièrement du chef d’état-major des armées, le général Ahmed Gaïd Salah, le véritable homme fort d’Alger, depuis la houle populaire qui a balayé Abdelaziz Bouteflika. Une fois de plus, le régime provisoire a subi la loi des insurgés dont la mobilisation ne faiblit point malgré les dures contraintes du mois de Ramadan. Mieux, les manifestations organisées pour le nettoyage définitif du système Bouteflika ont comme été nourries par la programmation de cette présidentielle avortée. Vent debout contre cette élection qu’ils ont, à tort ou à raison, suspectée de moyen pour les anciens caciques de se maintenir au pouvoir, les manifestants, les étudiants en tête, n’ont pas concédé le moindre répit aux nouveaux dirigeants. Pire, ils ont été confortés dans leur démarche par l’absence de candidats à ce scrutin qui se présentait comme celui de tous les dangers.
Et voilà l’Algérie en train de s’engouffrer inexorablement dans un tunnel sans issue. Le mandat de président provisoire qu’exerce, Abdelkader Bensalah, sous le couvert de la Constitution arrive à son terme début juillet. De ce fait, le pays pourrait bien se retrouver dans l’impasse constitutionnelle, ce qui contraindra sans doute le président du Conseil constitutionnel à demeurer à conserver ses attributs de président par intérim. A moins que dans les jours prochains, qui seront décisifs pour l’avenir politique de l’Algérie, de nouvelles mesures soient instaurées et qu’elles rencontrent surtout l’adhésion du peuple insurgé. Jusqu’où iront donc ces manifestants déterminés à balayer jusqu’au dernier, tous les hommes politiques qui ont eu à flirter avec le régime Bouteflika? Nul ne saurait le dire. Ce qui est certain, c’est l’affrontement inévitable qui se dessine, les militaires ayant décidé de siffler la fin de la récréation. Malgré des concessions bien importantes, mais qui restent sans effet devant la conviction des insurgés à aller jusqu’au bout de leur œuvre de salubrité, les militaires restent droits dans leurs bottes. Pour les hommes en kaki, rien ne se fera hors constitution. Et on a bien envie de leur donner raison, mais la bataille entre la légalité et la légitimité a commencé à faire rage. Une fois de plus, le déficit de confiance entre le peuple et ses dirigeants fait son œuvre dévastatrice et se conjugue avec la radicalité des positions pour placer l’Algérie dans le registre des pays qui après les fameuses insurrections populaires sont menacés par le chaos.
Quelle chance pour l’Algérie de redresser la barre avant d’aller aux récifs? Les jours à venir seront déterminants pour l’Algérie à la croisée des chemins.
Par Wakat Séra