Des élections historiques. C’est ce que s’apprête à vivre l’Angola dont le gouvernail est tenu fermement depuis 42 ans par le Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA). D’abord seul capitaine à bord après la guerre de libération qui a abouti à l’indépendance du pays délesté des chaînes portugaises, Agostino Neto, passe le témoin à José Eduardo dos Santos en 1979. Parti unique régnant en maître sur un territoire dont le sous-sol regorge de richesses naturelles comme le pétrole et le diamant, le MPLA qui s’érige en principal artisan de la paix et du progrès social en Angola, n’a pas eu la vie toujours tranquille. L’euphorie des indépendances consommée, le parti soutenu par un bloc dit de l’Est et Cuba, croisera les baïonnettes avec l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita), qui avait derrière elle, les Etats Unis, l’Afrique du sud et le Zaïre, actuel République démocratique du Congo (RDC). Et c’est sur les cendres de cette guerre civile qui ne connaîtra son épilogue qu’avec la disparition, en 2002, de Jonas Savimbi, le leader charismatique de l’Unita, que le MPLA forgera sa suprématie qui n’est du reste pas prête de prendre fin. Le MPLA a bénéficié, durant son règne de la sympathie de nombreux militants mais il a également fondé sa gouvernance sur la crainte de répression qu’inspirait le régime de fer qu’il a instauré. Jusque dans les cellules familiales et l’administration, les faits et gestes des Angolais sont surveillés et punis avec la dernière rigueur quand ils vont contre les intérêts du pouvoir de fer en place.
Ces élections tirent leur caractère historique surtout de la décision de José Eduardo dos Santos de se retirer de la compétition, après 37 ans de présidence. Toute chose qui devrait rendre la course au fauteuil suprême plus ouverte. Mais c’est loin d’être le cas. Malgré les arguments forces telle la crise économique, brandis par les candidats de l’Unita, le challenger historique du MPLA et de la Casa-Ce, la Coalition électorale de convergence ample du salut d’Angola, nouveau venu sur l’échiquier politique, les élections sont pratiquement jouées d’avance. Et c’est ce que s’échinent à dénoncer les adversaires du MPLA qui jouit d’une forte implantation sur le territoire et détient tous les moyens de l’Etat, dont il use et abuse pour remporter ces scrutins législatifs qui lui permettront, selon la Constitution de faire sortir de ses rangs, le remplaçant de José Eduardo dos Santos. Et comme en Afrique, la règle non écrite mais établie est qu’on n’organise pas les élections pour les perdre, le MPLA, déjà accusé par ses adversaires de fraudes massives en préparation est plus ou moins sûr de son affaire. A Luanda comme dans les campagnes que sillonnent les champions des six partis qui ont pris place dans les starting blocks, le MPLA est d’une visibilité insultante, réclamant à cor et à cris un bilan socio-économique que lui contestent pourtant ceux d’en face et même une bonne partie du peuple.
Des élections ouvertes par l’absence de l’inusable Eduardo dos Santos, mais en même temps fermées par le changement dans la continuité qui se profile. Que pourront les deux mousquetaires de l’Unita et de la Casa-Ce contre la force de frappe disproportionnée du MPLA qui mettra à profit son expérience de 42 ans de règne sans partage et un maillage incontestable du territoire national. Hors course mais plus que jamais présent derrière son ministre de la Défense, João Lourenço, le poulain qu’il a choisi pour lui succéder, José Eduardo dos Santos a mis ses dernières forces dans cette bataille politique qui devrait assurer la continuité de la mainmise du MPLA sur la vie politique angolaise. MPLA «forever»? La réponse sortira des urnes angolaises ouvertes ce mercredi 23 août 2017.
Par Wakat Séra