Encore les Forces armées du Mali! Ce sont les premiers mots qui viennent à la bouche, au vu de l’interminable chapelet de morts, de blessés et de disparitions qui déciment les armées nationales des pays du Sahel, la Mission des Nations-Unies au Mali (Minusma), la Force française Barkhane et celle du G5 Sahel. Plus que tous les autres pays, le Mali paie le plus lourd tribut à cet appétit de l’ogre terroriste qui profite, pour la plupart du temps, de l’incurie des dirigeants, pour endeuiller la grande famille des forces armées maliennes. Démunis matériellement, financièrement et moralement, ces militaires qui peuvent peu, et même très peu, face à l’ennemi dont la puissance de feu, doublée d’une efficacité sans commune mesure de ses services de renseignement, sont comme envoyés à l’abattoir.
Le seul cœur des soldats qui bat pour la défense de la patrie que leur impose le métier des armes ne résiste pas à la fougue destructrice des barbares du désert. Pire, des fuites, involontaires ou bien pensées de la hiérarchie, contribuent souvent à la perte de ces jeunes qui offrent leurs poitrines protégées juste en apparence par des gilets pare-balles déchiquetés par la première balle des hommes sans foi ni loi. Et le scénario, tel ce guet-apens du dimanche 14 juin, dans la région de Diabaly, au nord de Bamako, non loin de la frontière mauritanienne, et dans lequel une quarantaine de soldats sont portés disparus, illustre parfaitement cette situation désolante, voire révoltante, que subit l’armée malienne.
Loin de nous toute volonté de doucher le moral des troupes, mais il faut reconnaître que la récurrence et surtout l’abandon de ces jeunes, qui laissent derrière eux des épouses éplorées et des orphelins inconsolables et livrés à eux-mêmes, ne peut laisser indifférent. Pendant que ces soldats disparaissent dans des embuscades, ou sont explosés par des roquettes de terroristes pour qui la vie humaine n’a plus aucune valeur, leurs supérieurs roulent de belles et puissantes mécaniques à Bamako. Que dire de tous ces deals honteux qui se font sur le dos de l’armée, par le biais de surfacturation de commandes de matériels de surcroît de piètre qualité. Parfois même, ces armes, chars d’assaut, hélicoptères et avions de guerre, etc., sont «payés et livrés» dans les livres d’achats, mais sont inconnus dans les armureries, la flotte et le parc automobile de l’armée. La magie de la corruption, de la cupidité et des détournements, est passée par là!
Certes, le Mali n’a pas l’apanage de ces pratiques condamnables, et malheureusement impunies à cause du poids des auteurs, mais le pays n’en n’est pas moins coutumier des faits. A cela, il faut ajouter d’autres actes crapuleux, dont l’un d’eux consiste à amputer le salaire de jeunes soldats pour des prêts qu’ils auraient contractés, mais qu’ils n’ont jamais vus. Une véritable sorcellerie, comme le disent les habitués des réseaux sociaux! Toute dénonciation de la victime est passible de son envoi dans les endroits exposés aux attaques meurtrières des terroristes. Il est temps de changer le fusil d’épaule et assurer une meilleure protection pour ceux qui assurent la défense du territoire et donc des civils et de leurs biens, sinon, plus tard sera trop tard.
Le président malien et chef suprême des armées, Ibrahim Boubacar Keïta, est-il imprégné des réalités que vivent les FAMA? En tout cas, il urge pour lui de prendre le taureau par les cornes, au nom de la protection du peuple dont la responsabilité lui incombe et pour laquelle il a solennellement prêté serment par deux fois. A défaut, il va condamner ad vitam aeternam les attaques d’individus armés non identifiés ou revendiquées par les groupes terroristes, et décréter des deuils nationaux pour la gloire de terroristes insatiables de cadavres. Il faut espérer que cet épisode de la disparition d’une quarantaine de soldats finisse en happy end, avec le retour des disparus, sains et saufs, dans leurs casernes!
Par Wakat Séra