Le journaliste Newton Ahmed Barry et ex-président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), livre dans les lignes qui suivent, ses conseils au président du Faso, le lieutenant colonel Paul Henri Damiba.
Mon conseil a Damiba!
Les images de l’investiture d’hier ont laissé un grand malaise au sein de l’opinion nationale. Ceux des Burkinabè, et ils étaient nombreux, qui s’étaient montrés bienveillants ou indifférents ont été troublés, par le caractère insolite et en certains aspects indécents de l’événement au Conseil constitutionnel. En regardant les malheureux sages du Conseil Constitutionnel balbutier les formules de la prestation de serment, nombre de Burkinabè ont senti une grande honte. Parce que même si parfois, leurs hommes politiques les insupportent, par leurs turpitudes, les Burkinabè depuis le 3 janvier 1966, sont profondément Républicains et sont viscéralement attachés à une certaine idée de leur pays. Hier, certains ont vu un sacre à la Bokassa, sur les terres de leurs aïeux, tellement le treillis et la toge blanc-rouge faisait mauvais raccord.
Le Conseil Constitutionnel dans sa forme actuelle a mangé son totem, c’est certain. Si la transition ne devrait faire qu’une réforme, ce serait de commencer par la refondation du Conseil Constitutionnel.
Revenons à mon conseil!
Désormais vous êtes homme politique, dans une arène impitoyable dont vous n’avez pas les codes. Les politiciens à qui vous avez ordonné de se tenir coi, vous considèrent désormais comme un rival. Ils ne vous laisseront pas l’avantage, surtout que vous n’avez pas dit que vous étiez en transition. Votre projet «méthodique» pour nettoyer les écuries d’augias ne semble pas avoir une limite dans le temps. Vous avez donc reçu un «billet open» du Conseil Constitutionnel pour une longueur de mandat à votre convenance. Ces choses-là ne passent pas inaperçu et dès cet instant, croyez-moi votre force, militaire disposant des armes, sera désormais votre grande faiblesse. Car vous pouvez utiliser les armes contre les ennemis, pas contre vos adversaires. Or eux ils ont des armes autrement plus létales.
C’est pourquoi :
1) Fuyez Kosyam. Je ne vous demande pas de démissionner. Prenez les rênes «du théâtre des opérations…», aux côtés du Lieutenant Colonel Bamouni et veillez vous-même à la conduite des opérations. À partir de lundi prochain, on devrait entendre de moins en moins, une mairie brûlée, un ultimatum à un village pour qu’il déguerpisse, des pylônes saccagés et des prêches sur les artères principales bloquées des heures durant.
Ceux de vos suiveurs qui vous disent que vous avez le temps, on ne doit pas vous mettre la pression.. et tutti quanti, vous mentent honteusement. Ils seront les premiers si rien ne change d’ici fin février à vous vilipender. Ils vont commencer par dire que «Damiba n’écoute pas… il n’en fait qu’à sa tête».
Donc président Damiba fuyez Kosyam et revenez-y dans quelques mois, en général victorieux des terroristes, vous savourez alors les délices exquis de ce beau palais qui sent le fantôme non apaisé de Blaise.
Mon deuxième conseil:
Formez un vrai gouvernement de civils, avec de réels prérogatives. Il peut y avoir des militaires. Mais ça ne devrait pas être un gouvernement militaire. A ce gouvernement, il faut assigner les tâches urgentes, de veiller à ce que l’économie ne s’effondre pas, de prendre les plans et les mesures pour consolider les victoires militaires; organiser le retour des PDI (Personnes déplacées internes, NDLR), organiser la sécurité civile, mettre en place des plans de réinstallation et des mesures d’accompagnement. Parallèlement, veiller à organiser les conditions pour ramener le vivre ensemble et prendre en charge les DDR. Si vous avez un bon gouvernement vous allez avoir l’esprit tranquille pour faire la guerre. Car le succès de la guerre est votre seule et unique assurance vie.
Pour le reste, laisser les bavardages oiseux de la capitale se poursuivre.
Voilà mes deux conseils majeurs. Je peux me tromper.
Allah aide, ceux qui s’aident!
NAB