TAC. Trois petites lettres mais qui symbolisent de grands liens d’amitié et surtout de fraternité profonde, marqués par une histoire coloniale unique et un présent politico-économique presque confondu. Le Traité d’amitié et de coopération qui régit depuis une décennie les relations entre les deux pays voisins, et frères pour faire dans le jargon des diplomates, vient de refermer les portes de sa 6è édition à Ouagadougou. Tic-TAC, tic-TAC, tic-TAC, comme une horloge fait tourner inexorablement ses aiguilles, les dirigeants du Burkina Faso et de la Côte d’Ivoire ont feuilleté les pages de la vie commune de leurs deux pays, revisité les projets envisagés pour leurs deux peuples et renforcé les perspectives d’avenir. Tic-TAC, tic-TAC, tic-TAC, le mécanisme de l’horloge est si bien huilé depuis que Blaise Compaoré et Laurent Gbagbo, l’ont déclenché le 29 juillet 2008, que leurs successeurs, Roch Marc Christian Kaboré et Alassane Ouattara, le densifient au fil des éditions. Les deux chefs d’Etat et leurs gouvernements placent dans cette initiative une réelle confiance pour booster le décollage économique de leurs pays respectifs, mais sont surtout conscients que c’est «ensemble qu’on est fort». La TACtique, est de faire de ce couple naturel, le moteur de développement qui va tirer le train économique de la sous-région. Plus d’une vingtaine de nouveaux projets examinés et surtout onze accords bilatéraux signés. Le bilan du 6è TAC est éloquent pour ne pas être salué.
Les résultats sont encre plus louables qu’ils sont le fruit de la concertation entre deux pays dont les relations fraternelles ont failli voler en éclat suite à la survenue au Burkina de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et surtout du putsch militaire avorté de septembre 2015. Les nouvelles autorités, n’ayons pas peur des mots, étant persuadées que le danger venait pour eux de la Côte d’Ivoire qui a accordé gite et couvert à Blaise Compaoré, l’ancien président burkinabè et certains de ses proches. Comme quoi, le tic-TAC peut facilement devenir celui de la minuterie d’un explosif dont les déflagrations n’auraient fait que des dégâts inimaginables pour les deux pays, surtout pour le Burkina Faso qui, a-t-on coutume de le dire ici, s’enrhume dès que la Côte d’Ivoire éternue. Non seulement le pays enclavé qu’est celui de Roch Kaboré est très dépendant du port de son voisin, mais ce dernier abrite, officiellement, plus de 4 millions de Burkinabè qui s’y sont installés depuis la nuit des temps. L’absence de barrières linguistiques aidant, les ports ivoiriens sont les débouchés naturels des produits burkinabè, à l’import comme à l’export. Certes la courbe est en train d’infléchir avec les ports ghanéens comme alternative pour les opérateurs économiques burkinabè, surtout avec la longue crise militaro-politique post-électorale de 2010-2011, qui a fait des Burkinabè des persona non grata au pays de Laurent Gbagbo.
Tant mieux si les stratégies de lutte contre le terrorisme, la réhabilitation du chemin de fer Abidjan-Ouagadougou-Kaya-Tambao, la construction de l’autoroute Yamoussoukro-Ouagadougou, l’approvisionnement du Burkina Faso en électricité ivoirienne grâce à l’interconnexion, la facilitation de la libre circulation des biens et des personnes, etc., peuvent renforcer davantage l’axe Ouagadougou-Yamoussoukro. Les deux pays sont si liés par la géographie et l’histoire que toute secousse, de quelque nature qu’elle soit, ne peut que nuire à leurs populations, voire à la sous-région entière qui traverse une «période difficile» comme l’a souligné l’Ivoirien Alassane Ouattara, lui-même confronté à une situation socio-politique très précaire, sur fond de mutineries militaires sans fin. Du reste, le TAC ivoiro-burkinabè pourrait inspirer bien d’autres pays car il est un véritable espoir pour une intégration africaine en panne. Les accords signés, toute la place doit être maintenant faite à leur mise en oeuvre. Et ça c’est un autre challenge! Tic-TAC, tic-TAC, tic-TAC…
Par Wakat Séra