Plus qu’une simple supplication à «Notre Père qui est aux Cieux», cette prière des chrétiens devient, une hantise pour tous les Burkinabè qui, dans leurs habitudes alimentaires, ne peuvent se passer du pain. Avec la flambée des prix qui touche presque tous les produits de première nécessité, les boulangers qui disent acheter la farine de blé plus cher que de coutume, n’avaient visiblement plus d’autre choix que l’augmentation du prix du pain ou la diminution de son grammage. Désormais, affirment-ils, la farine de blé est passée de 350 000 FCFA à 525 000 FCFA, soit une hausse de 175 000 FCFA sur la tonne. Ils ont alors décidé, unilatéralement affirme le gouvernement burkinabè, de faire passer le coût de la baguette de 150 FCFA à 200 FCFA. Ce qui n’a pas été du goût d’organisations de défense des consommateurs qui ont même envisagé le boycott du pain si les prix ne revenaient pas à la normale.
Mais, les consommateurs n’auront pas à franchir cette étape douloureuse pour certains. Depuis ce mercredi à minuit, la Coordination des boulangeries du Burkina Faso, qui regroupe les Jeunes promoteurs de boulangeries et pâtisseries du Burkina (JPBPB) et la Fédération burkinabè des patrons de boulangerie, pâtisserie et confiserie (FBPBPC), a pris la décision inattendue de fermer toutes les boulangeries, sur toute l’étendue du territoire national, à partir de ce mercredi à minuit. Les fours et autres pétrins seront donc à l’arrêt, parce que la conciliation espérée au sein du Cadre de concertation tripartite n’a pas eu lieu, a déclaré la Coordination, alors que dans le même temps, le ministère en charge du Commerce a été instruit par le Conseil des ministres, pour «prendre toutes les mesures nécessaires pour faire respecter la règlementation en vigueur relative au processus de fixation des prix». Dans la foulée des boulangeries ont été fermées, ayant décidé d’augmenter le prix de vente de la baguette.
La guerre du pain fait donc rage. Pourtant, à y voir de près, les boulangers, n’ont pas tort de faire grimper le prix du pain. A moins de leur demander de fermer boutique parce que ruinés, ils ne sauraient vendre à perte leur fournée. Aux consommateurs d’arbitrer! Ceux qui en ont les moyens peuvent se permettre le plaisir de continuer, tous les matins, à casser la bonne baguette et à tremper dans le «café au lait» ce pain quotidien. Ceux dont la bourse n’est plus en mesure de supporter ce délice se tourneront certainement vers de nouvelles habitudes alimentaires moins coûteuses, comme le «wonmi», cette bonne galette de mil qui accompagne la bouillie où le lait en petit déjeuner, en goûter et même en dîner. Une solution qui éviterait au Burkina, ce bras-de-fer qui vient en rajouter aux crises de diverses sortes que traverse le Pays des hommes intègres, pris pour cible, depuis plus de sept ans, par les Hommes armés non identifiés. Les fameux HANI sont effectivement à l’origine de la «vie chère», eux dont les attaques meurtrières ont vidé les villages de leurs habitants qui ont abandonné dans la fuite, champs, récoltes et bétails. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait le reste dans un contexte économique international difficile.
Plus que jamais, le «consommons local» doit retrouver toute son sens. A défaut de s’y mettre eux-mêmes, les Africains y seront contraints par ces grandes crises qui font adopter de nouvelles habitudes de consommation.
Par Wakat Séra