Le président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, a affirmé que « si une mauvaise décision (de justice) est prise », son pouvoir va « s’opposer » mais fournira des explications nécessaires au peuple. Pour le chef de l’Etat qui a fait cette déclaration lors d’un face-à-face avec les forces vives du Burkina, ce jeudi 11 juillet 2024, au Palais des Sports de Ouaga 2000, son régime travaillera « a carrément changé le modèle de la justice ». Pour le capitaine Ibrahim Traoré, « l’injustice est un fléau qui détruit (la) société » burkinabè.
Le président de la transition burkinabè dont le mandat a été prolongé pour cinq ans, n’est pas allé du dos de la cuillère pour dire ce qu’il pensait de l’appareil judiciaire de son pays. A l’entendre, beaucoup de décisions de justice qu’il qualifie de mauvaises, ont ruiné la vie de plusieurs Burkinabè.
« J’ai laissé le domaine de la justice en dernière position parce que nous avons un sérieux problème dans ce volet. Nous avons entamé des reformes il n’y a pas longtemps au niveau du Conseil supérieur de la Magistrature (CSM). Nous avons vu des écrits et des comportements de certains syndicats du monde de la justice. Certains ont tenté de boycotter tout ce qu’ils peuvent », a relaté le capitaine Traoré qui a ajouté que « mais avec ou sans eux, nous allons avancer ».
La transition « a plaidé pour une justice juste si on peut le dire ». « Nous avons sensibilisé beaucoup les gens, mais nous nous sommes rendu compte qu’il y a beaucoup de brebis galeuses dans leur rang malheureusement », a-t-il continué. Le chef de l’Etat burkinabè dit ne pas comprendre que malgré tout le discours que son pouvoir tient, qu’il y ait une justice pour le pauvre et une autre pour le riche.
« Ça ne peut pas continuer. Lorsqu’un citoyen lambda qui ignore la loi d’ailleurs, même si on dit que nul n’est sensé ignoré la loi, a un problème à la justice, on peut l’attraper et le mettre en prison sans jugement pendant longtemps. Mais, lorsqu’un autre citoyen à un problème en justice, pour peu qu’il puisse mobiliser, un, deux ou trois avocats, son dossier est rapidement pris en compte et jugé pendant que le pauvre, lui, il croupit en prison d’abord », a-t-il déploré.
Pour lui, cela ne saurait être accepté désormais. « Ça ne peut pas continuer comme ça. Il faut que les gens changent de manière d’être. Beaucoup de gens sont toujours en prison sans jugement. Nous allons lancer une campagne bientôt pour juger ces gens-là qui sont en prison pendant des mois sans être jugés », a-t-il laissé entendre à son auditoire qui ovationnait fortement la prononciation de chaque phrase forte. « Nous ne pouvons pas payer des gens et qui veulent encore être payés lorsqu’il y a un jugement. Ça fait partie du fonctionnement », a-t-il ponctué.
C’est pourquoi il a invité donc les magistrats qui sont « sincères a donné le ton aussi et à quitter dans une certaine logique parce qu’il y a beaucoup de brebis galeuses dans leur rang ». « Il y a des magistrats corrompus qui se cachent derrière des syndicats pour poser un certain nombre d’actes », a-t-il déclaré, poursuivant que « jusque-là, nous sommes restés dans une certaine logique d’essayer de respecter certaines règles ».
« Mais, je veux qu’ils comprennent que s’ils continuent dans cette logique, à chaque instant, nous serons devant le peuple pour lui expliquer pourquoi nous avons violé telle décision de justice tant que ça ne va pas rencontrer l’assentiment du peuple. La patrie d’abord, la patrie avant tout. Si une mauvaise décision est prise, soi-disant pour protéger certains individus, qui nuisent à la patrie, nous allons nous opposer et nous n’allons pas permettre que la décision soit exécutée. Et nous allons expliquer pourquoi nous nous opposons », s’est-il exprimé.
« Une mauvaise décision est prise, soi-disant pour protéger certains individus, qui nuisent à la patrie, nous allons nous opposer et nous n’allons pas permettre que la décision soit exécutée. Et nous allons expliquer pourquoi nous nous opposons », a-t-il soutenu.
A suivre le président Traoré, sa vision de la justice qu’il décline devant les millions de Burkinabè qui le suivaient au Palais des Sports et en direct sur les chaines publiques, est une forme de mise en garde en même temps au niveau CSM qui sera mis en place pour qu’il prenne au sérieux tous les dossiers.
« Le CSM a été modifié dans son architecture. Nous allons changer carrément notre modèle de justice. Tous les magistrats qui avaient été pris la main dans le sac, qui ont des dossiers, on va remettre tout à jour et ils seront jugés aussi comme les autres », a-t-il lancé sous les ovations du public. « Il n’y aura rien d’impuni. Certaines personnes ont été forcées à la corruption, certains opérateurs économiques ont été escroqués par certains membres de la justice », a-t-il enchaîné, signifiant que ceux qui subissent ces pressions seront invités les jours à venir à dénoncer les mauvais acteurs de la justice burkinabè.
Par Bernard BOUGOUM