Après le coup KO de son champion, Roch Marc Christian Kaboré, à la présidentielle avec 57,87% des suffrages exprimés, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), continue dans sa lancée victorieuse, en s’adjugeant 56 des 127 sièges de l’Assemblée nationale. Comme dans un respect de logique, les résultats provisoires de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), positionnent le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), loin derrière le parti au pouvoir, avec 20 députés, après avoir fait occuper la même deuxième marche du podium à son porte-étendard, Eddie Komboïgo, à la présidentielle, avec 15,48% des voix. Mais les points de ressemblance dans les classements de la présidentielle et des législatives ne vont pas plus loin.
Si le leader de l’Union pour le changement (UPC), Zéphirin Diabré, a pris la troisième place dans la course au palais présidentiel de Kosyam, à l’hémicycle, le sans doute désormais ex-chef de file de l’opposition, a été relégué au quatrième rang, par le Nouveau temps pour la démocratie (NTD), 13 sièges, un parti de la majorité présidentielle. Son président, Vincent Timbindi Dabilgou, est membre du gouvernement et proche du président du MPP et directeur de campagne de Roch Kaboré, l’inénarrable Simon Compaoré. Ce n’est donc plus un secret, les pions changeront de place sur l’échiquier politique ; avec le CDP qui rafle mathématiquement parlant, le titre de chef de file de l’opposition.
Certes, le MPP, n’a pu opérer la razzia nécessaire pour s’octroyer la majorité absolue, mais le jeu des alliances, comme lors de la législature qui s’étiole inexorablement pour faire la place à la nouvelle, s’annonce sans nuage pour le parti orangé, qui pourra compter sur les 13 élus du NTD et sans doute, de nouveau, sur les 3 représentants de l’Union pour la renaissance (Unir/PS). Si pas de bourrasque imprévue du côté de ceux qui font les lois, Roch Marc Christian Kaboré pourra donc gouverner sans crainte d’un quelconque blocage venant du parlement. De plus, les scores anecdotiques des autres partis ne pourront pas être d’un grand secours pour le CDP qui prend désormais, le flambeau de patron de l’opposition, avec ses 20 députés et peut exhiber sa fierté avec la prouesse de son candidat, qui, pour sa première à la présidentielle ne doit pas rougir de sa deuxième place.
Il faut le reconnaître, Eddie Komboïgo et le CDP, reviennent de loin, après la loi d’exclusion qui a éloigné des ténors de l’ancien parti au pouvoir des élections présidentielle et législatives de 2015. L’insurrection populaire d’octobre 2014 est passée par là! Mais, malgré cette traversée du désert et les récentes crises internes qui auraient pu sonner son glas, le parti a retrouvé des couleurs et a fait mieux que résister à la vague orange. Maintenant, quelle gestion le CDP et son chef feront-ils de cette remontée des ténèbres, où leurs contempteurs les avaient, visiblement, enterrés trop tôt? Tout dépendra de l’option choisie par le CDP, d’être un chef de file de l’opposition républicain, contribuant, sans complaisance mais sans être va t’en guerre, à la bonne marche de la nation ou aller, avec empressement, à la soupe.
Si Roch Marc Christian Kaboré vient d’avoir sa victoire qu’il ne doit plus à feu Salifou Diallo, ancien président de l’Assemblée nationale, bête politique considérée comme le métronome du MPP de son vivant, il est conscient, face aux nombreuses attentes de son peuple qui lui a apporté un soutien sans faille, qu’il n’aura pas d’état de grâce. L’insécurité, le chômage, la gestion du Covid-19, les affres de la vie chère, les effets dévastateurs de la petite comme de la grande corruption, l’accès difficile à l’eau potable et à l’assainissement, en somme l’aspiration de plus en plus forte des Burkinabè à un mieux-être, sont des défis dont le président du Faso a mesuré l’ampleur durant son premier quinquennat. Et auxquels il doit pouvoir apporter les remèdes idoines lors de son second mandat, pour lequel il a toutes les cartes en main.
Par Wakat Séra