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Burkina: « La Kompienga (…) risque de disparaitre de la carte »

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Des ressortissants de la province de la Kompienga (Est du Burkina Faso) vivant à Ouagadougou, face à la gravité de la situation sécuritaire dans cette partie du pays des « Hommes intègres, ont animé une conférence de presse le dimanche 13 mars 2022 pour interpeller une fois de plus, les plus hautes autorités. « La Kompienga, s’amenuise, s’étiole, et risque de disparaitre de la carte du Burkina Faso », a prévenu leur porte-parole, Bassirou Badjo dit le « Commandant ». Nous vous proposons in extenso, la déclaration liminaire lue à ce rendez-vous avec les femmes et hommes de médias.

DECLARATION LIMINAIRE DE LA COALITION DES RESSORTISSANTS DE LA PROVINCE DE KOMPIENGA A OUAGADOUGOU DU 13 MARS 2022

Mesdames et Messieurs les Journalistes,

Soyez les bienvenus. Nous vous remercions pour l’honneur que vous faites à la coalition des ressortissants de la province de la Kompienga par votre présence.

Mesdames et Messieurs les Journalistes,

La province de la Kompienga, s’amenuise, s’étiole, et risque de disparaitre de la carte du Burkina Faso si rien n’est fait dans les jours qui suivent. Jadis réputée pour ses immenses potentialités agro-sylvo pastorale, cynégétique, halieutique et ayant le plus grand barrage hydro-électrique du pays, la province de la Kompienga, située à 105 Km de Fada, capitale de la région de l’Est, est aujourd’hui un sanctuaire des terroristes. L’administration publique a foutu le camp des trois communes que compose la province, laissant le libre champ aux terroristes qui imposent leur diktat.  L’éducation est morte depuis longtemps dans la province, les élèves sont livrés malgré eux au vagabondage risquant du coup de gonfler le rang des terroristes. Même la direction en charge de l’action sociale a fermé ses portes.

Mesdames et Messieurs les Journalistes,

Désormais la quasi-totalité de cette partie Est du Burkina Faso est devenue un nid des groupes armées terroristes qui y pullulent sans être inquiétés par qui que ce soit. Après avoir conquis la commune de Madjoari, Nadiagou, depuis l’année dernière, les terroristes continuent leur progression triomphale vers le chef-lieu de la province en l’occurrence, Pama situé à environ 105 km de Fada N’Gourma, la capitale de la région.

Depuis quelques semaines, l’étau se resserre au niveau de la ville de Pama du fait du blocus de ces hommes armés. Après avoir sauvagement procédé à l’’interruption totale de tous les réseaux de téléphonie mobile, orange, Telecel et Telmob, les terroristes sont montés d’un cran en sabotant des poteaux électriques, plongeant de ce fait les populations dans une obscurité totale et dans une anxiété jamais vécue. La joie de vivre s’est mue en cris de détresse. Impossible de joindre au téléphone un parent sur place, difficile de se nourrir car les femmes sont obligées de recourir aux meules pour écraser le mil.  Et comme si cela ne suffisait pas, les terroristes se sont arrogé le droit de vie et de mort sur ces populations qui vivent sous leur férule.

Oui, les groupes armés décident de comment et de qui doit vivre dans la province de la Kompienga. En témoigne, des exécutions sommaires, des enlèvements de jeunes, des viols et des pillages de bétail et de tous biens matériels. La scène la plus obscène et récente, est le viol de deux femmes PDI sur l’axe Nadiagou-Pama alors que ces dernières se rendaient à Pama à la recherche de vivres. Il est difficile, voire très périlleux de sortir à 500 m de la ville de Pama sans risque de se faire pendre par les terroristes. Les villages environnants de la commune de Pama ont été sommés de rejoindre la ville de Pama, d’autres Nadiagou et certains Kompienbiga. On s’interroge sur le dessein de ces personnes armées qui orientent la destination de chaque déplacé.

Ainsi contrôlent-ils tous les axes routiers de la province. Le trafic routier a été arrêté et tout individu empruntant ses axes est soumis à un strict contrôle de son identité. Désormais « les capitales des terroristes » sont Kompienbiga, Nadiagou et bientôt Pama ? Nous n’osons et ne voulons pas croire à de tels scénarios si réellement nous sommes Burkinabè ayant des autorités.

Mesdames et Messieurs les Journalistes,

Face à ce sombre tableau qui fait planer le spectre de l’apocalypse sur ces populations qui ne cherchent qu’à survivre, il est inconcevable, inadmissible en tant que natifs de la province, de garder le silence. Nous avons cru, nous avons espéré des solutions urgentes de par nos multiples cris à la rescousse à travers les médias, les réseaux sociaux et biens d’autres canaux. Mais vaines est de constater que nos lamentations n’ont aucun écho ou même semblent être dissonantes au niveau des gouvernants d’hier et même ceux d’aujourd’hui.

Mesdames et Messieurs les journalistes,

L’horizon semble être bouché, nos cœurs de plus muselés face à cette tragédie qui s’abat dans toute notre province sous le regard passif des forces de défense et de sécurité et le laxisme des plus hautes autorités qui laissent entrevoir un désaveu manifeste de leur part. En témoigne, le 07 mars 2022, à quelques encablures du détachement militaire et de la Brigade de gendarmerie de la ville de Pama, alors qu’il était allé paitre le reste de son troupeau, une personne déplacée interne a été froidement abattue par les terroristes et son bétail, emporté. Que dire de cette femme enceinte et son enfant tués par l’explosion d’une mine sur la route de Tibadi.

Mesdames et Messieurs les journalistes

Nous taire, face à cette situation critique, intenable, c’est rendre un hommage mérité aux forces du mal ;

Nous taire c’est traduire notre complicité passive face à l’inaction de nos plus hautes autorités,

Nous taire, c’est participer activement au suicide et à la disparition des milliers de vies humaines et la  perte progressive du territoire burkinabè, pourtant unique et indivisible. Les populations se sentent délaissées, voire trahies car à défaut de les défendre il eu aurait fallu les apprendre à se défendre.

Mesdames et Messieurs les journalistes

C’est pourquoi, nous demandons à nos plus hautes autorités avant qu’il ne soit trop tard, car il est déjà tard, de sauver, le reste des populations dont les âmes sont encore en vie en donnant des réponses urgentes à la catastrophe humanitaire qui y sévit. Elle est non une supputation mais un fait majeur, une réalité, du fait de rupture d’eau ;  l’ONEA, n’est plus fonctionnelle, seuls les puits et les pompes à usage manuels fonctionnent. Des aliments de premières nécessités manquent dans les boutiques. Les services publics sont aux arrêts, exceptées quelques ONGs, qui essaient encore tant bien que mal de récupérer certaines vies en voie de succomber. C’est le lieu pour nous de leur dire merci.

Sans être des spécialistes de guerres, nous demandons une seconde opération « OTAPOUANU » ponctuelle et durable afin de nettoyer et purifier la zone pour qu’elle retrouve sa quiétude d’antan. Qu’à la suite de cette opération, des volontaires pour la défense de la patrie (VDP) en nombre important, soient recrutés, formés et armés conséquemment afin d’assurer une auto-défense pérenne et travaillant en synergie avec l’ensemble des forces de défense et de sécurité. Que les autorités rendent fonctionnel le CMA afin de pouvoir soigner convenablement ceux qui sont dans le besoin. Que les autorités acheminent une aide alimentaire d’urgence au profit se ces déplacés.

Mesdames et Messieurs les Journalistes

D’ores et déjà, au regard de la catastrophe humanitaire et de la fulgurance des morts enregistrés au quotidien, nous, Ressortissants de la province de la Kompienga, avons mis en place une chaine de solidarité afin de venir en aide à nos parents.

Nous profitons donc, lancer un appel à toutes les bonnes volontés de ne point hésiter même un seul instant afin que nous puissions, dans notre élan patriotique, sauver des vies humaines que nul n’a le droit d’ôter impunément et que malheureusement les terroristes foulent au pied.

Mesdames et Messieurs les Journalistes,

Nous voulons appartenir à ce merveilleux pays qu’est le Burkina Faso. Mais avant tout cela, il faut vivre et pour vivre, il faut être sécurisé. Donc nous voulons être sécurisés, nous voulons aussi vivre et nous sentir citoyens burkinabè.

Mesdames et Messieurs les journalistes,

Tel est le cri de cœur des ressortissants de la province de la Kompienga sur la situation sécuritaire qui y prévaut.Nous restons à votre disposition pour vos questions spécifiques.

Nous vous remercions!

Pour la coalition des Ressortissants de la province de Kompienga à Ouagadougou, Le porte-parole,

Bassirou BADJO