Dans le processus de réconciliation et de la cohésion sociale amorcé au Burkina Faso avec la nomination le 10 janvier de l’ancien leader de l’opposition, Zéphirin Diabré, à la tête du ministère chargé de ces questions, les commentaires fusent de partout. Ainsi, ce mardi 19 janvier 2021, c’est avec une grande surprise que certains Burkinabè ont appris que M. Diabré et le président du parti au pouvoir, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), Simon Compaoré, qui s’étaient « trimbalés » en justice en 2017, se sont « pardonné». Et comme il fallait s’y attendre, cette information depuis son annonce a anime les débats des internautes qui sont divisés sur la toile par rapport à l’approche qu’a adoptée Zéphirin Diabré, président de l’Union pour le progrès et le changement (UPC).
Dans une note, le ministre d’Etat, ministre de la Réconciliation nationale et de la Cohésion sociale, après avoir rappelé qu’il avait déposé une plainte en décembre 2017 contre Simon Compaoré, à l’époque ministre de la Sécurité intérieure, lors de la crise qui secouait l’UPC à la suite de la démission de 13 députés du groupe parlementaire du parti du Lion, a indiqué qu’il a eu une « rencontre fraternelle avec monsieur Simon Compaoré, et qu’(ils) ont décidé tous les deux de (se) pardonner et de (se) réconcilier ».
M. Diabré a poursuivi dans son texte qu’il a demandé à son avocat d’« engager » les démarches pour retirer sa plainte. « Je demande aux uns et aux autres de considérer avec nous que cet épisode est désormais clos et oublié », lit-on dans le communiqué de l’ex-chef de file de l’opposition burkinabè.
L’approche de Zéphirin Diabré considérée comme une forme d’impunité vis-à-vis des dossiers judiciaires
Pour Rasmané Zinaba, activiste, membre du mouvement « Le Balai citoyen », une organisation de la société civile qui a milité activement lors de l’Insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 ayant renversé le régime de 27 ans de Blaise Compaoré, avec le mot : « Zephirin Diabré et moi, nous nous sommes réconciliés » qu’a dit ce même mardi, face à la presse, Simon Compaoré, président du MPP, la réconciliation tant demandée par bon nombre de Burkinabè dont le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, sera confondue à « l’impunité ». Pour cet internaute, depuis la nomination de Zéphirin Diabré en qualité de ministre, il n’a « cessé de dire que la réconciliation chez eux (les politiciens) c’est faire table rase et marcher sur la justice. La réconciliation c’est l’impunité. La réconciliation n’a de contenu que passer l’éponge sur les délits, les crimes et les assassinats ».
Point de vue que partage aussi Kouamé Bako, un autre fidèle de la toile. « D’autres actes vont suivre. D’autres plus graves. Et c’est au peuple de savoir sur quel pied danser sinon, ce sera le règne de l’impunité », affirme-t-il. M. Bako estime que « même avec le retrait de la plainte, la justice devait et peut toujours s’auto-saisir » de l’affaire dans laquelle l’ex-ministre de la Sécurité, Simon Compaoré est accusé de « détention illégale d’arme ». Pour lui, sur cette affaire, « le problème sera plus la dépendance de notre justice dans le fond ».
Gaston Mopti Convelbo, demande aux autorités avec l’acte que viennent de poser Diabré et Compaoré pour régler leur différend, de « libérer tous les militaires et civils incarcérés (parce qu’) ils ont demandé pardon à leurs différents procès ». « Libérez-les au nom de cette même réconciliation », insiste-t-il.
Comme Convelbo, Alino Sawadogo pense qu’avec la voie que Zéphirin Diabré a empruntée pour faire la réconciliation n’est pas bonne. « Vous donnerez certainement raison à ceux qui pensent que votre véritable mission serait uniquement de réconcilier les hommes politiques », se justifie-t-il tout en voulant attendre de voir la suite.
Le pardon entre Simon Compaoré et Zéphirin Diabré, signe de l’amorce du processus de la réconciliation nationale
L’acte de réconciliation entre les leaders de l’UPC et du MPP est compréhensible et a même été salué par certains adeptes de la toile. Parmi eux, il y a celui qui se fait nommer Dao le Juriste. Visiblement militant de l’UPC, Dao le Juriste a commenté : « C’est nous on avait déposé notre plainte depuis quatre ans déjà et la justice n’a jamais daigné examiner le dossier encore moins statuer, il faut le préciser parce que ça aura sont pesant d’or. C’est nous encore on est allés retirer notre plainte. Où se situe le problème? », s’interroge-t-il enfin. « On n’est plus libre de ses actes et mouvements selon ses humeurs dans ce pays », s’est-il défendu tout faisant observer Zéphirin Diabré et Simon Compaoré sont « libres en démocratie » de se trimbaler en justice et de décider de régler la même affaire par une autre voie comme ils le souhaitent.
Les internautes Joseph Pissiga et Heliot Saba sont du même avis que Dao le Juriste. Si pour le premier, sur la réconciliation nationale, par cet acte des deux leaders politiques, « ça commence bien », pour Heliot Saba, plus convaincu, « c’est ça la réconciliation » qu’attendent des Burkinabè qui sont divisés sur des questions socio-politiques et économiques.
L’internaute Siriki Aboubacard Kobré ne dira pas autre chose sur la polémique que : « réconciliation en marche! Soutien à vous (car) l’homme n’est jamais parfait. Ils te critiqueront quelle que soit ta position aujourd’hui mais l’histoire retiendra de toi (Zéphirin Diabré) un homme politique fort qui a incarné l’alternance ».
Lassane Baguian quant à lui salue l’acte de M. Diabré qui montre le chemin de la réconciliation aux Burkinabè. « Vraiment bel exemple monsieur le ministre d’Etat. La charité bien ordonnée commence par soi-même. On vous croit on vous suit », s’est réjoui M. Baguian.
Par Bernard BOUGOUM