Elu pour son premier mandat, Roch Marc Christian Kaboré, avec Paul Kaba Thiéba comme Premier ministre, forme, le mercredi 13 janvier 2016, avec 29 ministres (dont sept femmes) la nouvelle équipe gouvernementale. Ce gouvernement n’avait pas encore pris fonction quand est intervenu l’attentat du 15 janvier 2016 où des hommes armés ont attaqué le bar Taxi Brousse, le restaurant Le Cappuccino et l’hôtel Splendid dans le centre de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. Attaque revendiquée par Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI). Le bilan fait état de trente morts. Pour un accueil, du genre, en sang et en décompte macabre, on s’attendait à ce que le régime de Kaboré change ses plans, mais hélas !
Certes, il fallait éviter la précipitation, mais la situation exigeait une réorganisation pour adapter la gouvernance à la nouvelle donne. Que nenni! Le président Kaboré a continué, comme si rien ne s’était passé. « Le pays est gouverné », comme dirait l’autre. Rien n’a changé, à part la couleur et la texture des Faso Dan Fani portés lors des cérémonies pour donner bonne mine! Tout va bien, circulez! S’il y a eu des mesures, elles n’ont pas été efficaces, puisque les attaques ont continué, mieux, elles ont touché tout le pays, du Nord, au sud, d’Est à l’Ouest. Le pays s’est retrouvé encerclé.
Acculé, le président Kaboré, fin décembre 2016, nomme le colonel-major Oumarou Sadou chef d’état-major général des Forces armées (CEMGA) du Burkina Faso en remplacement du général Pingrenoma Zagré. Ensuite, le chef d’état-major Oumarou Sadou est limogé le 10 janvier 2019 et remplacé par le colonel Moïse Miningou élevé par la même occasion au grade de général de brigade, tout comme ses prédécesseurs. Du coup, on voit le régime du Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP) aller chercher des colonels-majors pour les nommer CEMGA, et les bombarder généraux. Non seulement, cela n’a pas encore changé la situation sécuritaire du pays, mais ça contribue plutôt à alourdir les charges de l’Etat, dans la mesure où, un général pèse sur le budget national.
De la même manière qu’il a changé la hiérarchie militaire, Kaboré a aussi essayé plusieurs ministres de la Sécurité et aussi ceux en charge de la Défense nationale, sans plus de succès. Il s’est lui-même limogé, une fois, du poste de ministre en charge de la Défense. Ce remue-ménage amène à se demander si le problème se trouve au niveau du choix des hommes. Mais tout porte à croire que c’est plus une question de stratégie, d’objectif, car en même temps cet objectif oriente et permet de faire un casting efficace en retenant l’homme de la situation. C’est donc dire que ce régime a un problème à avoir une stratégie face à cette situation. Le constat réel est qu’il peine à faire face aux attaques qualifiées de terroristes. Et le pire, c’est qu’on ne voit rien venir, comme si le président du Faso n’a pas encore véritablement pris la mesure de la situation. Ou peut -être que ce régime est incapable de trouver la solution. Surtout que l’on cesse de dire que le terrorisme existe partout dans le monde!
Il est vrai que les fous d’Allah cherchent à pourrir la vie des Burkinabè, mais la réaction, c’est de continuer à vivre, or ça ne va pas au Burkina Faso. L’hymne aux morts n‘émeut plus ! Et c’est évident, l’organisation du dernier FESPACO a été forcée et la tenue du Tour du Faso aussi, pour donner bonne impression. Mais si l’on ne veut pas aller à Canossa, il faut agir et de la bonne manière pour que le peuple continue d’espérer, de croire que l’on ne perdra pas le pays.
Dans ce sens, une enquête menée par nos confères de Africa Intelligence, parue le 22 avril 2019, avait fait savoir que les autorités burkinabè ont entamé des négociations ultrasecrètes avec des groupes djihadistes qui sévissent au Nord et au Sahel. Cela est une option et il existe bien des options si tant est que le président Kaboré et son équipe réfléchissent sur une stratégie. Le président nigérien, Mohamed Bazoum, en nommant Moustapha Chafi en septembre dernier, semble avoir la sienne.
Si la situation n’a pas changé, c’est que le président Kaboré n’a pas encore réellement pris la vraie mesure de la situation sécuritaire de son pays. C’est ainsi que raisonnent les populations, qui ont ras-le-bol, sont déçues et en colère, et qui veulent vivre en quiétude.
Par Wakat Séra