Onze militaires tués au Mali, cinq gendarmes abattus au Niger et un enseignant et un parent d’élève envoyés ad patres au Burkina. C’est le bilan des dernières tueries orchestrées par les terroristes dans cette série sombre qui aurait pu être intitulée « le cycle sans fin », si et seulement si on était dans une fiction destinée aux écrans du dernier Fespaco, la biennale panafricaine de cinéma et de la télévision de Ouagadougou, dont les projecteurs se sont éteints rien que ce samedi 4 mars 2017. Malheureusement, c’est l’amère réalité imposée ces derniers jours aux populations du Sahel par des djihadistes, dans un modus operandi dont les similitudes vont jusqu’à se croiser au niveau des cibles et des comptabilités macabres. Unis géographiquement pour le malheur et pour le pire, le Burkina Faso, le Niger et le Mali sont frappés presque sans répit par des groupes islamistes radicaux dont les objectifs sont visiblement de semer la panique et la psychose au sein des communautés visées.
Même l’état d’urgence décrété récemment dans cette zone du Niger qu’ils ont attaquée ce lundi 6 mars, n’est point un facteur dissuasif pour eux. Que dire des raids de Serval ou de Barkhane, et des réunions du G5 Sahel qui sont encore loin de décourager les velléités des hommes du Burkinabè Ibrahim Malam Dicko et du Malien Hamadoun Koufa, ces deux nouvelles terreurs sans frontière ? Si les Forces de défense et de sécurité paient actuellement un lourd tribut aux offensives répétées des « fous de Dieu » dans au Mali, au Burkina Faso et au Niger, qui sont tous sur le point de perdre le nord, au propre comme au figuré, il n’en demeure pas moins que ces pays, dans leur entièreté sont visés par une déstabilisation de leur tissu socio-économique. Visiblement en quête d’un espace qui leur servira de base arrière et surtout de territoire d’où ils lanceront leurs lâches assauts meurtriers et où ils replieront en toute impunité chargés de leurs butins d’enlèvement et autres trafics de toutes sortes, les djihadistes ont jeté leur dévolu sur ce Nord du Burkina. Tout comme ils l’ont fait avec un nord du Mali que l’administration de ce pays peine à reconquérir, en témoigne l’impossibilité d’installer, ce lundi, les autoritaires intérimaires à Tombouctou au Mali.
Dans cette guerre asymétrique qu’ils imposent à des armées réduites à l’impuissance malgré la bravoure des troupes, les terroristes font feu de tout bois. Souvent mieux équipés que leurs adversaires et passés maîtres dans la connaissance de ce sahel dont ils maîtrisent les moindres oueds, les assaillants opèrent presqu’en terrain conquis. Pire, en matière de stratégie, les terroristes qui pratiquent, en fait, une logique enseignée dans aucune école de guerre ont toujours montré qu’ils ont une longueur d’avance sur des armées peu équipées, et dont les éléments, malgré toute leur volonté peuvent peu. Souvent pris au dépourvu par des terroristes plus informés qu’eux, les militaires, gendarmes et policiers chargés de défendre les positions avancées ou non, opposent une résistance vaine, quand ils ne sont pas obligés de battre « dignement » en retraite. Il urge de procurer aux armées burkinabè, malienne et nigérienne, les moyens de défendre leur territoire grâce à un service de renseignement à la pointe. Car, l’information, c’est la seule arme dont l’efficacité est prouvée, car dotant les armées d’une forte capacité d’anticipation. Sans oublier que le droit de poursuite, bien encadré évidemment, mais délesté de tout formalisme trop lourd, devrait bien constituer un atout pour des hommes chargés de veiller sur des frontières africaines aussi poreuses que les mailles d’un filet de chasse au gros gibier.
En tout cas, les populations, et surtout les familles des victimes, en ont marre des décorations à titre posthumes et des déclarations qui frisent l’indécence, et dont seules les autorités politiques agissant de façon éhontée en médecins après la mort, ont le secret. Excédées par l’impuissance des dirigeants désarmés et visiblement à court de plans crédibles et efficaces contre la détermination de djihadistes de plus en plus menaçants, les populations locales prennent la poudre d’escampette. A un rythme qui pourrait s’accélérer si rien n’est fait, c’est toute l’administration qui déménagera des zones placées dans l’œil du cyclone, laissant ainsi le champ libre à des djihadistes qui pourront installer leurs pénates en toute tranquillité. Vite le sursaut salvateur, car un mort de plus est un mort de trop et demain risque d’être trop tard !
Par Wakat Séra