Ce jeudi, par le biais d’un de ses tours dont il détient la clé, le destin a mis en fête, le même jour, musulmans et chrétiens au Burkina, en France et dans d’autres pays du monde! L’aïd El Fitr qui sanctionne 30 jours de jeûne, et l’Ascension qui marque l’élévation miraculeuse au ciel de Jésus-Christ, 40 jours après sa résurrection à Pâque, ont coïncidé, amenant les Burkinabè, à l’imagination fertile à qualifier, avec humour, cette commémoration de Ramascension! Une «ramascencion» qui, loin d’être le fait du hasard pour les croyants, constitue le ciment de la consolidation de la tolérance religieuse, et plus, de la cohésion nationale. La Ramascension a précédé, du reste, la rupture de jeûne collective, accueillie, il y a quelques jours, par l’Archevêché de Ouagadougou, avec à sa tête, le pasteur des catholiques du Burkina Faso, le Cardinal Philippe Ouédraogo. C’est donc depuis ce territoire hautement catholique de la capitale que les prières des musulmans, installés sur leurs tapis de prière, s’étaient élevées vers Allah.
En tout cas, c’est presque dans l’ordre normal des choses que chrétiens et musulmans se rassemblent au nom de Dieu, dans un Burkina où le dialogue interreligieux est la chose la mieux partagée. Régulièrement, pour ne pas dire presque toujours, les responsables des deux confessions religieuses se rencontrent autour des diverses célébrations. Mieux, la tolérance religieuse, est profondément ancrée dans la vie de tous les jours. Il est difficile, voire impossible, de trouver une famille large, et même nucléaire, où ne cohabitent pas des membres de professions religieuses différentes. Même que des mariages sont célébrés le jeudi à la mosquée et le samedi à l’église, dans la joie d’enfants qui portent allègrement le prénom catholique doublé de celui musulman. Véritable régulateur de tensions sociales, le phénomène est un facteur déterminant pour le vivre-ensemble dont le Pays des hommes intègres recherche, par tous les moyens, à recoller les morceaux, suite à des crises socio-politiques. L’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, avec les incendies et destruction de biens publics et privés, constitue, sans doute, l’un de ces événements majeurs qui ont mis à mal, la cohésion nationale.
Sur les sentiers de la réconciliation nationale dans lesquels le Burkina marche de nos jours, certainement que des fêtes comme la Ramascension pourraient être salutaires dans l’optique qu’elles, sont, pour les croyants, des signes des temps. D’ailleurs, la religion, qu’elle soit révélée ou non, est amour, selon les prescriptions de la Bible, du Coran, de la Torah ou des dieux de nos ancêtres incarnés par diverses représentations en fer, en bois, ou en terre. Et, c’est vers le même être supérieur et surnaturel que s’élèvent toutes les prières. Seules diffèrent donc les voies, du reste dites impénétrables, qui mènent à ce «Très Haut». Il importe pour le Burkina de demeurer ce havre de paix religieux où il fait bon vivre pour tout croyant, le temps où il était imposé aux populations, «le chemin à suivre» pour accéder au paradis, étant révolu. Plus que tout, la liberté de croire ou non, de choisir sa religion ou ce que certains qualifient, souvent sans les connaître réellement, de sectes, doit être universelle.
Tant que ce choix de la croyance est libre, conscient et n’entrave pas la bonne marche de la société ou ne porte pas atteinte à la cohésion sociale, il mérite respect.
Par Wakat Séra