Le président de l’Association nationale des agences de voyages du Burkina (ANAVB), Issa Drabo, dans un entretien à Wakat Séra, a déclaré que «c’est l’insécurité même le problème» du tourisme qui est dans l’agonie dans le pays des «Hommes intègres», plus que la Covid-19 qui avait emmené les autorités à fermer les frontières aériennes.
Wakat Séra: Qu’est-ce qui a motivé la création de l’ANAVB?
Issa Drabo: Cela remonte à un an et demi depuis l’apparition de la maladie de la Covid-19. Les agences de voyages ont eu des difficultés à pouvoir toucher les autorités en vue de déposer leur demande de soutien suite aux fermetures administratives de leurs entreprises. Donc il y a eu un regroupement d’agences de voyages que j’ai piloté et enfin de compte, il nous a été demandé la création d’une structure bien reconnue (par la loi) afin de pouvoir répondre à nos attentes. C’est dans cette optique que l’association est née afin de pouvoir être un interlocuteur légal et légitime du gouvernement.
Quelles les actions que l’ANABV compte mener après l’atelier qu’elle a organisé du 13 au 14 avril 2021?
Déjà je suis content de signaler que l’Etat est au courant de notre existence car on a eu à adresser des correspondances avec notre récépissé d’existence à des structures étatiques. Cela a pris en compte presque toutes les autorités impliquées dans le secteur du voyage et du tourisme. Il s’agit des ministères concernés par notre secteur et d’autres structures administratives et associatives telles que la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina (CCI-BF) et le patronat dont la FOPAD, la Fédération des organisations patronales, hôtelière et touristique de Ouagadougou, une organisation interafricaine siégeant à Dakar. Et donc on leur a fait part de notre intention de faire partie de cette fédération et on attend leur réponse.
Quelles sont vos attentes vis-à-vis des structures étatiques et privées?
D’abord, ce que nous demandons à nos membres. Nous leur disons que nous ne sommes pas un syndicat qui est né pour formuler des revendications qu’on adressera à l’Etat. Nous sommes nés dans le but de promouvoir le tourisme. Nous sommes nés pour apporter notre contribution à ce que l’Etat fait déjà. Même si on peut supposer que ce que l’Etat fait est important, n’empêche qu’il y a toujours des insuffisances que nous pouvons relever et leur faire part. Donc nous voulons travailler de sorte à ce que nos membres aient des connaissances, des aptitudes d’entrepreneurs, car nous sommes un maillon fort de l’économie nationale.
Maintenant pour l’Etat, nos attentes sont nombreuses et lors de notre formation, nous avons recensé certaines préoccupations que nous allons formaliser pour porter à l’intention des autorités. Nous voulons surtout que l’Etat nous accompagne dans notre volonté de faire comprendre les textes réglementaires à nos membres à qui, ces lois s’appliquent. Les textes réglementaires du tourisme qui existent actuellement au Burkina Faso, sont peut-être connus par pas mal d’agences de voyages ayant du vécu, mais il ne faut pas aussi oublier que de nouvelles agences se créent chaque jour. Donc il faut apporter ces textes-là à leur connaissance et aussi les opportunités qui existent sur le marché que nos membres peuvent profiter avec cette structure. C’est-à-dire qu’il y a les banques, les fonds d’investissements, les micro-finances et autres qui ne sont pas le plus souvent exploités par les entreprises en général au Burkina Faso, et en particulier les agences de voyages.
Nous travaillons avec beaucoup d’argent qui ne nous appartient pas. Généralement les agences de voyages se basent sur les marges sur lesquelles elles prennent pour pouvoir faire leurs activités. Donc toutes ces sommes d’argent peuvent être utilisées de façon optimale lorsqu’on est accompagné par une institution financière.
Quel est l’avenir du tourisme au Burkina Faso?
Le tourisme est déjà un avenir. Le tourisme est radieux et a un avenir radieux. Le tourisme existe depuis très longtemps mais ce n’était pas marchand. Maintenant, c’est devenu commercial et il est même considéré comme une industrie. Donc on doit tout faire pour que ce secteur soit dynamique.
Depuis la crise qui a eu lieu en 2011 en Libye, cela a eu pour conséquence, un afflux massif des terroristes vers le Mali et par la suite ses pays voisins dont le Burkina Faso. Depuis ce temps, le tourisme dans cette région (subsaharienne) a commencé à souffrir puisque notre tourisme est carrément étranger. Au début, certains pensaient que c’est le Mali et ça ne touche pas le Burkina Faso. Or non! Les touristes pour aller au Mali, notamment Tombouctou et autres, ils passent par le Burkina. Donc c’est pour dire que quand le Mali est affecté sur son plan touristique, le Burkina en pâtit. Donc depuis ce temps, le tourisme a commencé à souffrir de ces aléas de guerres qui n’en finissent pas.
Et même avant la crise libyenne, en 2011, notamment, il y avait eu une mutinerie qui avait créé une instabilité. Il y a eu une période ici où lors des mutineries, certains mutins ont débarqué dans un hôtel où il y a eu des saccages et cela a commencé à décourager les touristes. Donc sans sécurité, il n’y a pas de tourisme. C’est vraiment à partir de cet instant que notre secteur a commencé à décliner. Tous les feux verts ont commencé à devenir oranges et subitement rouges depuis que le conflit djihadiste s’est généralisé et nous a atteints.
A vous écouter, l’insécurité a plus joué négativement sur le tourisme que la pandémie du coronavirus?
C’est l’insécurité même le problème. S’il y a l’insécurité, le tourisme meurt. Si fait qu’après 2012, la situation du tourisme a commencé à décliner. Tous les feux verts ont commencé à devenir oranges et subitement rouges depuis que le conflit djihadiste s’est généralisé et nous a atteints jusqu’à ce qu’il y ait un attentat ici à Ouagadougou en 2016. Et c’est pendant que nous faisions face à cette situation que la pandémie du coronavirus est venue nous terrasser carrément puisque les pays africains ont suivi les pays européens dans la prise des mesures sanitaires dont des restrictions qui empêchent les voyages transfrontaliers. Donc toutes les frontières aériennes comme terrestres étaient fermées et même une année après, le transport routier n’a pas encore repris. Et aussi, la culture qui est connexe au tourisme était touchée avec les couvre-feux qu’on avait institués. Donc le tourisme est un tout et si un pan de ce tout-là est touché, ça affecte immédiatement le tourisme.
Par Bernard BOUGOUM