«Zida n’a dupé personne». C’est la déclaration qu’a faite le colonel Abdoul Karim Traoré, ce jeudi 4 octobre 2018, lors de la deuxième journée de son audition devant la chambre de jugement du tribunal militaire burkinabè. Cette affirmation vient remettre en cause les accusations portées contre l’ex-Premier ministre de la transition Yacouba Isaac Zida, comme étant «un traitre».
Le 31 octobre 2014, à la suite des manifestations contre la modification de l’article 37 de la Constitution burkinabè, le président Blaise Compaoré s’est vu obliger de rendre le tablier et s’exiler en Côte d’Ivoire. Dans la foulée le chef d’état-major général des armées, de l’époque, Honoré Nabéré Traoré s’est proclamé chef de l’Etat. Cette proclamation n’a pas été du goût des manifestants et certains militaires, notamment de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP). C’est dans cette cacophonie que le lieutenant-colonel Isaac Zida, le n°2 de l’ex-RSP, a retiré le pouvoir des mains du premier responsable des armées du pays.
Après sa prise du pouvoir, des remous contre M. Zida, ont émaillé ses 21 jours de présidence et le reste de la période de la transition. Ces manifestations de colère constatées au sein de son corps d’origine, ont abouti au coup d’Etat manqué du 16 septembre, durant lequel le Premier ministre Zida, le président Michel Kafando, deux autres ministres et deux aides de camp, ont été retenus en détention. Au cours de cette période transitoire, des voix se sont élevées pour accuser cet officier supérieur de l’ex-RSP, de «traitre» car ayant «dupé» ses ex-camarades militaires et le peuple. Une chose que le colonel Abdoul Karim Traoré a réfuté.
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«Zida n’a dupé personne. Les gens ont composé avec lui pour leurs intérêts et c’est au moment qu’ils n’avaient plus besoin de lui qu’ils l’ont laissé couler seul», a soutenu M. Traoré, magistrat militaire mis en cause dans le dossier du putsch manqué du 16 septembre 2015.
Au cours des interrogatoires devant la chambre de jugement, des militaires de l’ex-RSP, n’ont pas manqué d’affirmer que ce sont eux qui ont «mis Zida là où il était (au pouvoir)».
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Selon plusieurs accusés qui sont déjà passés à la barre, c’est l’ex-Premier ministre qui serait à la base des différents remous au sein de leur corps. M. Zida aurait voulu toujours contrôler le RSP, malgré qu’il occupait une fonction politique. Pour ses accusateurs, il aurait avec lui des éléments acquis à sa cause.
Le colonel Abdoul Karim Traoré, analyste politique et écrivain, a également soutenu, durant son audition, que les événements des 30 et 31 octobre 2014, les remous des militaires du RSP et le putsch sont liés. Il a imputé cet état de fait à « une insuffisance de dialogue ». Quant aux différentes crises qu’a connues le Burkina, le colonel Traoré a pointé un doigt accusateur aux magistrats. Pour lui, la justice a failli dans le traitement de certains dossiers notamment, celui du journaliste d’investigation Norbert Zongo.
Par Daouda ZONGO