Encore une injustice qui vient renforcer les errements de la justice camerounaise dans la détention d’un journaliste ! Les juges du tribunal militaire du Cameroun ont prononcé ce lundi 24 avril 2017, le verdict inique de 10 ans de prison ferme et près de 56 millions de francs CFA soit environ 85 000 euros. Les avocats de l’accusé rejettent cette décision judiciaire martiale, aux antipodes d’un monde moderne où l’information est une denrée de première nécessité. Dire que Ahmed Abba, le correspondant haoussa de Rfi, dont le calvaire a commencé depuis juillet 2015. Après son arrestation et sa détention secrète pendant plusieurs mois au cours desquels il a connu la torture de la part de ses geôliers déterminés à cassé du journaliste, notre confrère a même frôlé l’emprisonnement à perpétuité. En total déphasage avec l’avancée déjà timide en Afrique de la démocratie et de son pilier le plus important qu’est la liberté d’expression, la justice militaire met en péril l’exercice de ce noble métier qui peut amener le journaliste à être en contact même avec le diable, n’en parlons pas de terroristes aux desseins noirs et sanglants. A voir l’engagement avec lequel ces juges d’une autre époque compte régler leurs comptes avec un pauvre journaliste qui ne demande qu’à faire son métier avec professionnalisme que peut-on espérer de l’appel qu’ont interjeté les avocats de Ahmed Abba ? Il faut simplement libérer Ahmed qui a déjà trop soupé des atrocités du goulag de la justice militaire camerounaise ! Libérez Ahmed ! Tel doit être, jusqu’à la mise en liberté de ce journaliste qui n’avait pour arme que son micro pour défendre le droit des populations à sortir de l’obscurantisme et de la désinformation, le refrain de tout mouvement de défense des droits de l’homme digne de ce nom.
« Le dossier est vide » ! Un des avocats de Ahmed Abba l’avait déclaré dès les débuts de ce honteux marathon judiciaire qui a duré près de deux ans. Accusé de « complicité d’actes de terrorisme » et de « non-dénonciation », alors qu’il assurait la couverture des attaques de Boko Haram, le correspondant de Rfi en Haoussa à Maroua au Cameroun, a vécu avec la menace de peine de mort planant sur lui, mais avec l’espoir que ses bourreaux retrouveraient un brin de raison qui les aurait amenés à la…raison. Et pourtant, « le dossier est vide » ! Et mille et une voix, se sont élevées pour exiger la libération du journaliste de 38 ans dont la vie a été mise en danger plusieurs fois suite à des sévices corporels inhumains qui lui auraient été infligés lors durant sa détention. Dans quel but veut-on maintenir un innocent en prison alors que la secte assassine à tous vents, semant, impunément, mort et désolation sur son passage ? Près de deux ans, et l’accusation qui a peiné en vain à trouver des preuves sérieuses de tout lien, sans doute inexistant, entre le prisonnier et Boko Haram ne veut pas se remettre en cause. Plus de dix audiences, des renvois à n’en pas finir, et un verdict des plus incompréhensibles.
Et pourtant « le dossier est vide » ! Si l’Etat camerounais bandait autant les muscles contre les terroristes de la secte islamiste, nul doute qu’il aurait obtenu des résultats meilleurs dans la lutte qu’il a engagée contre les disciples de Abubakar Shekau, le semeur de mort en chef. On s’en vient à se demander si cet acharnement contre un pauvre journaliste qui ne fait que son job, ne sert pas à masquer quelque part, l’impuissance des autorités camerounaises à venir à bout de Boko Haram. En tout cas, il est encore temps pour le Cameroun de se débarrasser de son armure et de son glaive des temps sombres et surannés des prédateurs de la liberté de presse et d’expression. Il faut libérer Ahmed !
Par Wakat Séra