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Cas Djibrill Bassolé: le Burkina dit attendre la décision de l’ONU pour «tirer les conséquences qui s’imposent»

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Dix-huit jours pour faire l’état des droits de l’homme dans le monde. C’est ce à quoi s’attellent les représentants des 47 pays membres du Conseil depuis le 11 septembre dernier. La voix du Burkina y a été portée par le ministre de la justice, des droits humains et de la promotion civique, Bessolé René Bagoro, dans une déclaration livrée au Conseil le 12 septembre.

Promouvoir et protéger les droits humains sont rendus plus ardus par la prolifération des conflits armés à travers le monde. Syrie, Yémen, Libye Myanmar et Mali sont autant de conflits qui occasionnent de graves violations de droits humains et de flux massifs de populations. Le Burkina qui est impliqué dans les opérations de soutien à la paix au Mali souhaite que la communauté internationale continue d’œuvrer pour soulager la souffrance des victimes de ces conflits armés.

L’autre question préoccupante de l’heure qui touche le Burkina et qui a été soulevée par le ministre René Bagoro est le terrorisme. Dans sa déclaration au Conseil, le ministre burkinabè a lancé un appel à « une mutualisation des efforts en vue de neutraliser ces groupes terroristes dont les ambitions sordides et macabres sont aux antipodes des aspirations de paix, de tolérance et de développement durable de nos nations respectives ».

« C’est dans cette dynamique qu’il faut situer l’initiative lancée par cinq pays du Sahel, appelée G5 Sahel, pour lutter contre le terrorisme. Le Burkina Faso qui, a totalement adhéré à cette initiative, veillera en accord avec les autres pays membres au respect des droits humains par les éléments des forces armées qui seront déployés dans ce cadre », a affirmé le ministre.

Bien que le Conseil des droits de l’homme tienne trois sessions annuelles, le programme de travail de cette 36e session est très chargé et passe en revue bien des aspects des droits de l’homme méconnus des profanes. Il est vrai que pour le commun des mortels, les droits de l’homme se limitent aux atteintes physiques. Et pourtant, selon le ministre de la justice, des droits humains et de la promotion civique, ces droits se catégorisent à trois niveaux.

« Il y a les droits civils et politiques comme le droit à la vie, le droit à l’intégrité physique. Il y a les droits économiques, sociaux et culturels ou l’on retrouve les questions de l’eau ou de droit à l’alimentation. Et il y a une troisième catégorie de droits qu’on appelle droits au développement. Ce sont des droits qui ne sont peut-être pas bien connus mais qui sont des besoins de l’homme et qui permettent même aux autres droits comme le droit à la vie, d’être réels parce que si vous n’êtes pas bien alimenté, si vous ne vous soignez pas bien, vous ne pouvez pas avoir la garantie que vous allez bien vivre », explique René Bagoro.

Un des points de l’ordre du jour portait effectivement sur l’eau et l’assainissement et le Burkina y a marqué son intérêt par une déclaration qui relève les efforts déployés dans ce domaine par le gouvernement. Des efforts qui ont permis de faire passer le taux d’accès à l’eau potable en milieu rural de 58,5% en 2011 à 65,3% en 2016. En milieu urbain, ce taux, selon la déclaration est passé de 80% à 91% sur la même période.

S’agissant de l’assainissement, de nombreuses réalisations telles que les latrines familiales, publiques et scolaires ont été faites faisant passer le taux d’accès à l’assainissement de 24% à 36.8% entre 2011 et 2016.

L’objectif du gouvernement étant de parvenir d’ici à 2030 à l’accès universel à l’eau potable.

Réconcilier les Burkinabè

La 36e session du Conseil des droits de l’homme a également présenté un rapport spécial sur « la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non répétition au sujet de son étude mondiale sur la justice transitionnelle ». Un thème qui intéresse le Burkina fortement engagé dans une dynamique de réconciliation nationale et qui justifie la déclaration que la délégation a faite au conseil.

« Nous venons de sortir d’une situation difficile et nous avons besoin pour notre développement de réconcilier tous les fils et filles du Burkina Faso. Et vous savez qu’au sortir de la transition il a été mis en place le Haut conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN). Il s’agit d’une instance qui va permettre à certains Burkinabè qui ne peuvent plus recourir à la justice classique de pouvoir au moins se faire entendre parce qu’il y a beaucoup de frustration qui ne peuvent pas trouver solution avec la justice. Il y a eu le rapport du comité sur les questions de la justice transitionnelle. Donc nous sommes déjà un peu dans ce processus et nous avons besoin des expériences des autres pays qui ont déjà eu ces situations pour voir comment au-delà de la justice classique, nous pouvons trouver moyen pour que les Burkinabè se réconcilient », affirme le ministre Bagoro.

Au nombre des difficultés liées au contexte post-insurrectionnel et pouvant retarder la réconciliation tant espérée, il y a l’incivisme.

René Bagoro ne méconnaît pas les cas d’incivisme et de justice privée, mais affirme que l’État seul ne peut pas venir à bout de ce phénomène.

« L’État prend les textes, l’État veille mais il faut aussi que chaque citoyen se dise que de son comportement dépendra l’avenir de notre pays. J’interpelle donc tous nos concitoyens sur la nécessité de respecter les lois de la République, sur la nécessité de recourir à la justice même si je le reconnais, la justice de par ses actions passées n’a pas toujours inspiré confiance. Mais nous sommes en train de travailler à moraliser le milieu, à faire en sorte que la justice puisse redonner confiance aux citoyens burkinabè ».

Sur un plan général, le ministre de la justice dit se réjouir de l’état actuel des droits humains et promet travailler à renforcer cette situation.

Il en veut pour preuve, la prise de plus d’une trentaine de textes renforçant le cadre juridique et la mise en place de certaines institutions. « Nous venons par exemple d’adopter une loi sur la protection des défenseurs des droits humains qui fait que le Burkina Faso en Afrique francophone est le deuxième pays après la Cote d’Ivoire, à créer ce cadre pour protéger les défenseurs des droits humains pour leur permettre de mieux exercer leurs activités. La liberté d’expression et d’opinion est une réalité au Burkina Faso. Nous avons dépénalisé les délits de presse, nous sommes en train de mettre en place la Commission nationale des droits humains qui va nous permettre de nous mettre aux standards internationaux. Je vous rappelle que dans la composition de cette commission, il n’y aura plus de représentants de l’État. Nous pensons donc qu’un effort est fait sur le plan normatif mais dans le vécu quotidien aussi, je pense qu’aujourd’hui au Burkina Faso, même si certains tentent de le faire croire, nous n’avons pas de prisonnier politique. Toutes les personnes qui sont en détention le sont sur la base de lois qui existent. Elles ont des avocats et l’État s’assure que toutes ces personnes qui sont détenues bénéficient du respect de leurs droits et qu’elles auront un procès équitable », indique-t-il.

Pas de développement sans droits de l’homme

Concernant le cas particulier de l’ancien ministre des Affaires étrangères Djibrill Bassolet dont le Groupe de travail sur la détention arbitraire avait demandé la « libération immédiate », estimant sa détention « arbitraire », le ministre Bagoro a confirmé que le gouvernement burkinabè a demandé la révision de cet avis.

« Le Burkina est respectueux des décisions qui sont prises par les instances onusiennes. La démarche que nous avons initiée ne vise pas à méconnaître la décision du groupe de travail mais c’est une voie de recours qui est offerte par les méthodes de travail du groupe. Nous avons introduit notre demande de révision et comme le dossier est en cours, nous n’allons pas en parler pour ne pas donner l’impression de vouloir influencer la décision qui va être rendue. Nous allons attendre que la décision soit rendue sur la révision et nous allons tirer les conséquences qui s’imposent », a affirmé le ministre.

Au cours de son séjour genevois, René Bagoro s’est entretenu avec le Haut-commissaire aux droits de l’homme Zeid Ra’ad Al Hussein et le Président du Conseil des droits de l’homme Joaquin Alexander Maza Martelli.

Les deux personnalités ont apprécié les efforts fournis par le Burkina pour la promotion des droits de l’homme dans un contexte marqué par des attaques terroristes récurrents.

Selon le ministre René Bagoro, le gouvernement va continuer à renforcer les institutions pour une meilleure protection des droits humains car, soutient-il, « les droits humains, c’est un élément important parce que ça a trait à la dignité humaine et là où les droits humains ne sont pas respectés, on ne peut pas atteindre le développement ».

Mathieu BONKOUNGOU

Ambassade Mission permanente du Burkina à Genève