De gros nuages de xénophobie ou plutôt d’afrophobie ont pris la place de l’arc-en-ciel en Afrique du sud ! Intolérance et violence, sont devenues le quotidien des Sud-africains qui ont remis au goût du jour les heures chaudes et sanglantes de lutte contre l’apartheid. Depuis quelque temps, les vieux démons ont donc refait surface, mais cette fois-ci réveillés par des noirs contre d’autres noirs. Comme s’ils sont subitement frappés d’amnésie, les Sud-africains qui ont vaincu le joug de la minorité blanche grâce à la solidarité des peuples du monde entier, particulièrement ceux du continent noir. Comment alors des migrants avec qui ils vivaient jusque-là en harmonie ont-ils pu devenir des cibles pour leurs hôtes ? Le chômage endémique et les bagarres de politiciens en mal de publicité sont sans doute passés par là. Tout comme l’économie stagnante et les inégalités sociales prennent des proportions hallucinantes. Résultat, ce sont les étrangers, les plus vulnérables, qui sont pris pour des souffre-douleurs.
En tout cas, les compatriotes viennent de tuer pour la deuxième fois, Nelson Mandela, dont la sagesse après 27 années de geôle a servi à construire une nation arc-en-ciel dont les fondations étaient le pardon et la réconciliation. Mais preuve que ces piliers étaient loin d’être solides, la cohésion de l’Afrique du sud, singulièrement au sein des familles biologiques et politiques de Madiba, a volé en éclats, aux lendemains de la disparition de celui-ci le 5 décembre 2013. Du reste, il ne fallait pas être devin ou savoir lire dans une boule de cristal pour savoir que l’héritage laissé par Mandéla serait vendangé. Il était trop lourd à porter par un quidam, ne jouissant pas de l’aura du père de la nation arc-en-ciel. Qui plus est, la minorité blanche qui avait lâché du lest parce qu’acculée dans ces derniers retranchements et par peur de voir détruire ce beau pays où les intérêts sont toujours énormes, n’a jamais lâché le pouvoir économique. Elle est consciente, après avoir évité le chaos à l’Afrique du sud que le pouvoir politique, non soutenu par celui économique est difficile, voire impossible à tenir. Ce fut très vite un facteur de division entre des noirs toujours confrontés aux problèmes existentiels, alors que l’économie du pays et donc ses richesses surtout minières sont demeurées aux mains des anciens maîtres.
Si on n’y prend garde, la forte poussée de xénophobie qui s’est emparée de la Nation arc-en-ciel embrasera tout le pays et donnera du grain à moudre à ceux qui ont affirmé, à tort, il n’y a pas si longtemps, que l’homme africain n’est pas assez rentré dans l’histoire. L’Etat sud-africain qui parait frileux face à cette situation porteuse de germe de déstabilisation profonde est pourtant le seul qui doit arrêter ce poison qui s’instille lentement dans le corps social. Il doit se dresser pour éviter cette seconde mort à Nelson Mandela.
Par Wakat Séra