L’Empire du Milieu est visiblement devenu la ruche des dirigeants africains qui s’y bousculent dans l’espoir de décrocher des prêts pour financer des infrastructures. La plupart des Etats africains ont en effet besoin de cash pour calmer la grogne encore en sourdine ou manifeste de leurs populations excédées par les affres de la pauvreté et du chômage endémique qui en ont fait pour la plupart des loques vivantes. De plus, la démocratie et surtout l’alternance au sommet, encore moins le respect des droits de l’homme constituant les cadets des soucis de la Chine continentale, c’est la ruée des dirigeants africains vers Pékin. Le constant est plus que clair avec cette bousculade des chefs d’Etat africains vers la Chine où se tient du 3 au 5 septembre 2018, le 7è Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC).
Excepté le Swaziland, seul pays à flirter encore avec Taiwan, après le divorce fulgurant et considéré «inélégant» par certains du Burkina Faso avec Taipeh, aucun des poids lourds du continent n’a voulu rater ce rendez-vous qui mobilise même plus que les sommets de l’Union Africaine (UA). Le président ivoirien, Alassane Ouattara, a devancé tout le monde en déposant ses valises depuis le 28 août 2018 au pied de la Grande muraille.
Bien lui en prit, il est ressorti de sa visite d’Etat et de son tête-à-tête avec son hôte Xi Jin-Ping les poches pleines d’accords de financement de projets. Le 31 août 2018, neuf accords de coopération ont été signés au Grand palais du peuple, par le président ivoirien pour la création du port sec de Ferkessedougou, l’extension de l’aéroport d’Abidjan ou la conception et la construction de la centrale thermique de San Pedro, la construction d’usine pour la transformation du cacao etc.
Le Togo, Burkina Faso, le Cameroun, le Gabon, le Bénin, le Nigéria, le Sénégal, le Gabon, le Congo, le Rwanda, la Guinée, l’Afrique du sud, le Mali, pour ne citer que ces pays attendent également leur part du gâteau. Plusieurs chefs d’État du continent sont aussi venus au FOCAC pour y solliciter de l’aide afin de les aider à maintenir l’équilibre de leurs finances publiques. Selon les dernières évaluations de l’institut américain The China Africa Research Initiative (CARI), la dette contractée par l’Afrique auprès de la Chine s’élève à près de 132 milliards de dollars.
En moins de 20 ans, la Chine est devenue le premier partenaire commercial de l’Afrique au grand dam des anciennes puissances coloniales qui rechignent de plus en plus à mettre la main au portefeuille en plus de poser de nombreuses conditions considerées par les dirigeants comme une atteinte à leur souverainté. «Le rétablissement des relations avec la Chine n’aura pas d’impact sur nos rapports avec la France », a tenté de rassurer le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Alpha Barry.
La Chinafrique est-elle devenue plus juteuse que la Françafrique? La question semble même incongrue, tant les Africains, en l’occurrence leurs dirigeant croient désormais dur comme fer en l’axe Pékin-Afrique. Conviction juste ou simple revirement lié à l’accoutumance congénitale des chefs d’Etat africains à tendre la sébile?
Or, la Chine est reconnue comme un pays très avare en partage d’expertise, donne pourtant importante pour l’Afrique qui vise le développement. L’adage ne conseille-t-il pas que mieux vaut apprendre à pêcher que donner du poisson»? La Chine qui, paradoxalement a compté sur la force de sa nombreuse population et ses piliers culturels pour prendre son essor, est visiblement plus partisane du «poisson cadeau» pour les Africains qui ont toujours préféré, du reste, vivre des dons et dettes injectées à doses homéopathiques par des partenaires techniques et financiers qui sont loin d’être si altruistes.
D’ailleurs, la Chine est reconnue pour son impérialisme commercial et surtout son envahissement des secteurs porteurs de ses partenaires. Les Chinois vendent même les galettes de mil, commerce privilégié des femmes en Afrique pour acheter les fournitures scolaires de leurs enfants. En tout cas, si l’Afrique voit jaune aujourd’hui, pourvu qu’elle ne rit pas jaune demain.
Doumbia Mamadou