Accueil Communiqué de presse Condamnation du bimensuel  « Mutations »: une association professionnelle de media donne de la voix

Condamnation du bimensuel  « Mutations »: une association professionnelle de media donne de la voix

0

Dans une affaire qui l’oppose à un magistrat, le bimensuel « Mutation » a été « lourdement » condamné, ce qui suscite cet écrit de l’Union de la presse indépendante du Faso.

Le bimensuel  « Mutations » poursuivi par le Magistrat Dabonné Eric pour des faits de diffamation a été reconnu coupable et condamné par le tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso, le 19 mars 2018, à payer la somme de dix sept millions cinq cent mille francs (17 500 000 F CFA) à raison d’une amende ferme de 6 millions, 10 millions pour les dommages et intérêts et 1,5 millions pour les frais non compris dans les dépens. Le journal et son conseil ont fait appel de la décision.

Comme on peut le constater, une telle amende parait lourde et au-dessus des capacités d’un organe de presse burkinabè au regard d’un contexte économique hostile, de la rareté de ressources et de la précarité économique que vivent les entreprises de presse.

L’ensemble des patrons des médias ont toujours essayé de faire comprendre que les amendes trop lourdes adoptées par le législateur burkinabè  comme contrepartie à la dépénalisation étaient une grave menace pour la profession et la liberté de la presse. Ces amendes trop souvent surévaluées sont préjudiciables aux journaux car  les condamnations pécuniaires exorbitantes porteraient, sans aucun doute, un coup dur à l’existence du média incriminé d’une part, mais aussi à l’entreprise employant des travailleurs participant à l’essor économique nationale d’autre part.

Toutefois, en dépit des difficultés et de environnement austère auxquels sont assujetties les entreprises de presse toutes choses rendant problématique et complexe la tâche aux professionnels des médias, ceux-ci continuent de se sacrifier pour mener au quotidien leur mission de collecte et de diffusion de l’information afin d’assurer le droit à l’information des populations dans l’optique de contribuer au renforcement de notre démocratie.

Aussi, tirant expériences de la condamnation du confrère « Mutations » et des divers autres procès contre les médias et leur acteurs, il convient d’insister sur le fait que les poursuites judiciaires contre les médias autant celles-ci peuvent être compréhensibles et justifiées pourraient aussi, si elles sont abusives, disproportionnées et ne visent pas que la réparation d’un préjudice,  dans le même temps, contribuer à fragiliser la presse et compromettre dangereusement la démocratie et l’Etat de droit au Burkina. Il est donc nécessaire pour le public et tous les justiciables, en général, d’intégrer les différents recours non juridictionnels existants qui sont des voies aussi efficaces de règlement et de réparation des cas de préjudices. Il s’agit notamment de :

–         l’usage du droit de réponse encadré par les dispositions des différentes lois portant régime juridique de toutes les catégories de la presse au Burkina (écrite, en ligne, audiovisuelle et sonore),

–         la saisine de l’instance de régulation à savoir le Conseil supérieur de la communication (CSC),

–         la saisine du tribunal des pairs et d’autorégulation à savoir l’Observatoire burkinabè des médias (OBM).

En tout état de cause, l’UNPIF :

–         observe une réserve face à la lourde condamnation pécuniaire du journal « Mutations » en attendant la suite du dossier en appel,

–         apporte son soutien aux confrères de Mutations dans ces moments difficiles,

–         rappelle aux professionnels des médias leur responsabilité sociale comme socle de la profession et invite à un sens élevé du professionnalisme seul gage d’une presse indépendante, libre et crédible au service des populations.

                                                                                                                                             

                                                                                    Ouagadougou, le 28 mars 2018

                                                                                           Le président                                                          Traoré Souleymane