20 ans de prison ferme pour le général Jean-Michel Mokoko! Le verdict est tombé et sans surprise. L’ancien chef d’état-major à la barre, condamné pour atteinte à la sûreté intérieure et détention illégale d’armes et munitions de guerre, devra purger ses années de détention avec ses sept co-accusés qui partagent la même peine que lui, même si eux ont été jugés par contumace. Certes, la justice a prononcé sa sentence. Mais l’opinion reste peu ou prou convaincue de la justesse de cette justice dite aux ordres et qui n’a fait que satisfaire la dernière lubie du prince d’Oyo, la ville présidentielle. En effet, si le couperet judiciaire est tombé aussi raide et lourd, ce n’est que parce que Denis Sassou Nguesso a opté de rayer un adversaire politique trop sérieux de la course à la présidentielle. Certains pensent même à des règlements de compte personnels entre l’homme fort de Brazzaville et son ancien proche collaborateur et conseiller, évoquant des bisbilles qui tirent leur source d’une affaire qui n’a rien de politique. Tout compte fait, le général Mokoko derrière les barreaux pour une vingtaine d’années, c’est un souci de moins pour le président congolais qui, envers et contre tous, a charcuté la constitution pour s’offrir un troisième mandat, et si affinité, s’ouvrir la voie de la présidence à vie.
Du reste, c’est ce troisième mandat qui a creusé ce fossé qui n’a fait que s’élargir entre le président et celui qui veillait sur son armée. La pomme de discorde est née depuis 2016, lorsque le désormais «général prisonnier» s’est prononcé ouvertement contre le projet de changement de constitution du chef de l’Etat congolais. Si cette prise de position, plus ou moins courageuse à l’époque, a valu au général une once supplémentaire de popularité, elle a annoncé les débuts de sa descente aux enfers. En Afrique, tout comportement de ce genre allant contre les intérêts du chef est un crime passible de la peine la plus extrême. Et le général Mokoko en a pris pour son grade. La République du Congo est loin de faire exception à cette règle qui rend systématiquement indésirable, le candidat à la succession du chef. Comme dans les républiques africaines qui se confondent facilement avec des monarchies de fait et dans le fonctionnement, le roi ne cède son trône qu’à la mort. Bien d’autres pays sont passés par cet embastillement sans autre objet de candidats potentiels, empêcheurs de gouverner en rond. Et la coutume se perpétue car bien des pays sont sur cette voie. Le général Mokoko, originaire de la même région que Denis Sassou Nguesso paie pour sa témérité de politicien, opposant au dessein présidentiel.
Agé actuellement de 71 ans, au mieux des cas, le général Mokoko sortira de prison après avoir fêté son 91è anniversaire! Avec cette condamnation il peut donc dire adieu à toute ambition de s’asseoir sur le fauteuil de Sassou qui aimerait bien y mourir où le céder à un des siens, à en croire les bruits venant de la faune politique congolaise. Mais est-ce vraiment foutu pour le général qui voulait devenir calife à la place du calife? On peut être tenté de répondre par la négative, tant l’impopularité réelle de M. Nguesso pourrait faire prédire un autre scénario à cette histoire qui empoisonne l’actualité politique sur les bords du fleuve Congo. En attendant, sauf retournement de situation, c’est foutu pour le général qui voulait devenir président.
Par Wakat Séra