Comment gérer les marchés, maquis et bars, en ces temps où le Covid-19 fait des ravages dans le monde entier, sans distinction entre puissants ou misérables? C’est un véritable casse-tête dans un Burkina où le nombre de cas testés positifs ne cesse de grimper. Que ce soit à Rood-Woko, le marché central de Ouagadougou où dans les «Yaars», les petits marchés de quartiers, non seulement les commerçants ne veulent même pas entendre parler de la fermeture de ces endroits qui attirent au quotidien un monde fou, mais ils restent comme sourds aux appels au respect des gestes barrières. Des étals de bouchers et des poissonniers, aux stands de condiments et autres aliments, en passant par les rayons de friperies, les habitudes n’ont guère changé. C’est en toute insouciance que vendeurs et acheteurs sillonnent les allées exiguës de ces marchés, se hélant et marchandant les prix des denrées. Les poignées de main, accolades et autres attouchements de salutation s’échangent en toute tranquillité, bien entendu entre éternuements ou quintes de toux causés par les odeurs fortes et mixées d’épices, de transpiration et de froissements des vêtements. Tout le monde se touche et touche à tout, dans un environnement supposé très à risque avant même la survenue de la maladie à coronavirus.
Alors que dans les pays dotés d’une force de riposte mieux élaborées et donc plus performante les rues se vident et que les sorties de chez soi sont rigoureusement réduites, voire interdites, et soumises à l’obtention d’une attestation, en Afrique et au Burkina Faso en particulier, tout va bien. Et, plus que de la mort violente que pourrait provoquer le Covid-19, c’est de la mort économique qui viendrait de la non fréquentation des marchés, gares et véhicules de transport en commun toujours pleins, maquis, bars et restaurants qu’ont peur les opérateurs économiques, de secteur structuré ou de l’informel. Mais, il faut le reconnaître, la mise en berne de ces activités économiques, équivaudrait bien à une mort subite ou tout au moins une agonie collective. Tant de personnes vivent du marché et des transports en Afrique! Le pire, c’est que, contrairement à l’Europe où des mesures sont prises par le gouvernement pour accompagner les secteurs et autres entreprises touchés par les conséquences de l’épidémie. Comme on le dit ici avec une bonne teinte d’humour, «c’est chacun s’assoit et Dieu le pousse». Pourtant, comme l’a dit si judicieusement Emmanuel Macron pour la France, «le Burkina est en guerre». Et cette guerre que la Chine est sur le point de gagner sur le Covid-19, les Burkinabè peuvent et doivent la gagner aussi, en changeant de comportement et en adoptant les gestes de combat, prodigués par l’OMS et les structures de santé habilitées à le faire. Et si les Burkinabè ont le devoir de se protéger chacun, pour protéger les autres, le gouvernement doit sortir également des tatonnements et de la crainte des retombées de mesures impopulaires, pour rassurer tout le monde.
Confinement, sensibilisation et discipline doivent constituer les piliers de cette lutte contre le coronavirus. Toute autre option serait synonyme de capitulation et donc suicidaire.
Par Wakat Séra