Les obsèques du Premier ministre ivoirien, Amadou Gon Coulibaly, 61 ans, décédé le mercredi 8 juillet dernier se poursuivent, marquées par un deuil national de 8 jours, mais surtout des hommages dignes du rang de ce grand homme d’Etat que fut celui qui devait défendre les couleurs du Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix (RHDP), lors de l’élection présidentielle prévue pour octobre prochain en Côte d’Ivoire. D’Abidjan, la capitale à Korhogo, la ville de ses ancêtres, AGC dont chaque communauté ethnique est «venue prendre sa part de deuil», a été pleuré comme un digne fils de la Côte d’Ivoire, le pays qu’il a servi avec engagement et loyauté durant sa vie, avant de déposer les armes, lâché par son cœur.
S’il n’a pas pu prendre le fauteuil présidentiel qui l’attendait en tant que dauphin de son «père» Alassane Ouattara, le Premier ministre a eu droit à des funérailles de haut rang. Et c’est dans la stricte intimité familiale que le Lion de Korhogo rejoindra sa dernière tanière ce vendredi, sourd au vacarme des vivants, loin des dossiers de la république et désormais intouchable par les intrigues politiques.
Même si certains de ses camarades de parti, par des manœuvres, bien discrètes ou plus ou moins grossières, n’ont pas hésité à enjamber son cadavre encore chaud pour essayer de récupérer le costume de dauphin qu’il a laissé, Amadou Gon Coulibaly ne prendra plus ces coups qui font très mal au moral et que les politiciens savent si bien se donner entre eux. Une chose est certaine, la politique a cheminé, main dans la main, avec le deuil. Car, sans verser dans le cynisme, et tout en respectant les us et coutumes propres à chaque groupe ethnique, on peut sans risquer de se tromper dire que les hommages, retransmis en direct par la Radiodiffusion et télévision ivoirienne (RTI), prenaient souvent des airs de discours politique.
Les soutiens indéfectibles au chef de l’Etat, Alassane Ouattara, q les discours sonnaient comme des clins d’œil, surtout en ces moments où il est de plus en plus question de lutte de clans au sein du RHDP où bat son plein la guerre des positionnements. Car il faudra bien que Alassane Ouattara, le seul capitaine à bord du bateau RHDP, trouve un remplaçant à son «fils» qu’il avait imposé comme candidat à sa succession, choix qui passait déjà très mal au sein du parti et qui par la suite a provoqué une cascade de démissions.
En tout cas, le deuil national prenant fin avec l’inhumation du Lion de Korhogo, la politique reprendra tous ses droits et le RHDP, qui n’avait pas prévu de plan B, à côté de la désignation de Feu Amadou Gon Coulibaly comme son porte-étendard pour la prochaine joute présidentielle, devra lui trouver un remplaçant au plus vite. A moins que dans un scénario de revirement et de reniement de sa parole donnée, Alassane Ouattara redescende dans l’arène pour la course à sa propre succession.
Et ça, ce sera une autre paire de manches. Comment réagiront l’opposition politique, la société civile et surtout les partenaires internationaux traditionnels de la Côte d’Ivoire qui scrutent de très près la situation en Guinée voisine où il est prêté à Alpha Condé, le désir de tenter un troisième mandat présidentiel? Même dans son propre camp, Alassane Ouattara risque de se buter aux ambitions de jeunes loups qui peuvent facilement perdre patience, à force de mâcher le mors, en attendant éternellement dans l’antichambre du pouvoir.
Par Wakat Séra