Aboudramane Sangaré, n’est plus. L’un des pères fondateurs, avec l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo et de son épouse Simone, du Front populaire ivoirien (FPI), parti de l’opposition, a été emporté, ce samedi 3 novembre 2818 par un cancer de la prostate. L’ancien pouvoir ivoirien n’avait pas fini de pleurer la disparition d’un de ses piliers, Marcel Gossio, 67 ans, ex-puissant directeur général du Port autonome d’Abidjan, décédé lui le dimanche 21 octobre dernier. Certes, l’ancien DG du port lui faisait partie de l’autre frange du FPI, celle dite aile Affi N’guessan, mais avec Aboudramane Sangaré qui a maintenu allumé le flambeau des idéaux du locataire de la prison de Sheveningen depuis le 30 novembre 2011, ils étaient tous des piliers de ce parti qui a toujours donné du fil à retordre aux pouvoirs qui se sont succédé sur les bords de la lagune Ebrié.
De Félix Houphouët Boigny à Alassane Ouattara, en passant par Henri Konan Bédié, et l’éphémère règne de Feu Robert Guéi, tous les dirigeants ivoiriens ont porté le FPI comme un gros caillou dans leur chaussure. Et c’est peu de le dire, Aboudramane Sangaré qui était presque le frère jumeau de Laurent Gbagbo-le premier avait 72 ans et le deuxième en a 73- était l’un des durs de ce FPI qui constituait le poil à gratter de ses adversaires qui ne lui laissaient non plus aucun répit.
«Le gardien du temple», surnom de Aboudramane Sangaré, après avoir rencontré son alter ego Laurent Gbagbo sur les bancs de l’université d’Abidjan ne s’en détachera plus jamais. Leurs cheminements, en plus de se croiser sur le campus se sont logiquement entremêlés, et même confondus sur le plan politique. C’est donc en toute logique que dès qu’il est devenu chef de l’Etat, le «Woddy de Mama» a fait de son binôme, son missi dominici pendant deux ans. Et le ministre des Affaires étrangères, durant deux ans ne quittera jamais son compagnon de tous les temps. Que ce soit dans les geôles de Feu Houphouët Boigny ou des décombres du bunker présidentiel atomisé, d’où a été sorti le couple Gbagbo le 11 avril 2011, «l’ami Sangaré» était toujours là. Il goûtera du reste la fraîcheur des prisons de Alassane Ouattara pendant que le colis de son presque «frère jumeau» atterrissait à La Haye. Relaxé, il était toujours là et c’est en fidèle des fidèles de Laurent Gbagbo que «le gardien du temple» a interdit l’implication du FPI dans les activités politiques ivoiriennes.
Et cette fatwa, qui court toujours et ne devrait prendre fin qu’avec la libération de Laurent Gbagbo des liens de la Cour pénale internationale, qui a été brisée par Affi N’guessan, provoquant du coup l’implosion du FPI. Malgré tout, la fidélité de Aboudramane Sangaré à la ligne dure de Gbagbo ne faiblira point. Elle a été, du reste, saluée par Simone Ehivet Gbagbo, à sa libération, le 8 août 2018, des suites de la grâce présidentielle intervenue deux jours plus tôt.
Mais après le décès de celle que Simone Gbagbo appelait affectueusement «l’ami de tous les jours», n’est-ce pas la ruine du «temple» qui se profile si Laurent Gbagbo demeure en prison? Question légitime lorsqu’on met dans la balance, le goût connu et reconnu pour le leadership de celle qui portait le surnom redoutable de «la dame de fer».
D’ailleurs, comme pour apporter de l’eau au moulin de ceux qui pensent au grand coup que pourrait prendre l’union forte autour du FPI Gbagbo, l’ex première dame vient de convoquer un Secrétariat général extraordinaire alors que le grand patron du FPI original, depuis sa cellule de la prison 5 Etoiles de La Haye, vient d’ordonner la suspension de toute activité du FPI jusqu’à la fin des funérailles de Aboudramane Sangaré. Simple incompréhension ou prémices d’une autre crise ouverte sur le premier parti de l’opposition ivoirienne? Question à un kilo d’attiéké, le fameux plat à base de manioc qui constitue la spécialité culinaire la mieux prisée en Côte d’Ivoire.
Par Wakat Séra