Alors que d’habitude c’est le dimanche qui est privilégié pour taquiner le goujon et tenter de ramener quelques poissons pour le plaisir ou la soupe dominicale, c’est demain samedi que plus de 35 600 candidats, soit plus de 5 200 pour les régionales et plus de 30 400 pour les municipales, iront à la pêche aux voix. Une effervescence électorale garantie sur les bords de la lagune Ebrié, après une semaine de campagne presque sans souci majeur!
Entre militants sur le terrain, les frictions n’ont pas manqué mais tout a été contenu dans des proportions du civilement et politiquement correct. En attendant la Coupe d’Afrique des nations 2023, la fête du foot africain que la Côte d’Ivoire accueillera du 13 janvier au 11 février 2024, les quartiers et communes d’Abidjan, de Yamoussoukro, de Bouaké, pour ne citer que ces villes et les 33 régions dont celles du Cavally, du Bélier, d’Agnéby-Tiassa, du Gbèkè, du Haut-Sassandra, du Tonkpi, etc., vibreront au rythme de scrutins locaux qui jetteront dans l’arène, des politiciens aux couleurs de partis politiques, mais surtout d’indépendants qui se sont émancipés du corset partisan pour aller à l’assaut des urnes. Ces derniers n’auront, certes pas la tâche facile face aux machines électorales bien rôdées des partis, mais ils sont déterminés à faire parler leur popularité et leur proximité avec les populations. Comme quoi, l’heure sera décisive, avant le grand tournant de l’élection présidentielle de 2025.
Le grand absent de ces élections sera, sans aucun doute, le sphinx de Daoukro, l’ancien président ivoirien Henri Konan Bédié, qui a tiré sa révérence rien que le 1er août passé. Mais son parti, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire, le mythique PDCI-RDA, n’occupera pas moins le terrain. Que ça soit avec le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire, le jeune PPA-CI de l’inusable Laurent Gbagbo qui signe son retour politique, avec lequel il est en couple et sera donc en tandem dans certaines zones, ou seul, le parti du bélier, pour se maintenir sur le podium, n’a pas droit à l’erreur. Le PDCI joue gros, pour ne pas dire sa survie, sans HKB.
De même, son nouvel amant, le PPA-CI, qui né le 17 octobre 2021 affronte déjà, âgé de moins de 3 ans, son baptême du feu, lors de cette traversée, doit souquer ferme pour ne pas se faire croquer par les vieux crocodiles intraitables et insatiables du marigot politique ivoirien. L’ancien président Laurent Gbagbo, lui qui, s’il en a l’opportunité, n’écarte pas de reconquérir le fauteuil présidentiel d’où l’a chassé, par les urnes, après la présidentielle houleuse de 2010, Alassane Ouattara, n’a qu’une envie: recouvrir le PPA-CI de gloire et lui donner la combativité qu’il avait impulsée au Front populaire ivoirien (FPI) lorsqu’il en était le leader incontesté!
En tout cas, la partie ne sera pas des plus faciles pour les deux partis en face d’un RHDP plus que jamais affamé et qui prépare 2025. Le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix, ne fera pas de cadeaux à ceux d’en face. S’il s’est allié au FPI, ce n’est certainement pas pour les beaux yeux de son président Pascal Affi N’Guessan, mais certainement pour tenter de se tailler le morceau léonien, ramasser même les miettes du festin, si affinités.
Raison pour laquelle, tous ont été lancés dans la bataille, du président de l’Assemblée nationale Adama Bictogo, au Premier ministre Patrick Achi et son épouse, en passant par les membres influents du gouvernement, dont Kandia Kamissoko Camara, Anne Désirée Ouloto, et Mamadou Touré. Le RHDP qui se targue d’un bilan socio-économique impressionnant et connaissant l’importance des locales, va pour tout rafler ce samedi. Seulement, ceux d’en face répondent aux ouailles d’Alassane Ouattara très en verve, qu’«on ne mange pas les ponts» et que les populations ont faim, sans oublier leur soif de réconciliation nationale véritable.
Et entrés dans la danse sans complexe aucun, les indépendants comme Yasmina Ouégnin qui aura pour adversaire direct son camarade du PDCI, le maire sortant de Cocody Jean-Marc Yacé, comptent jouer plus que les arbitres entre le RHDP, le PDCI et le PPA-CI. Ils veulent «goûter aussi», comme le chante Roseline Layo, dans «Donnez un peu»! En tout cas, au soir de ce samedi, comme on le dit à «Babi»*, chacun va chercher à montrer à son vis-à-vis, «qui a mis l’eau dans coco».
Pourvu que le calme et le fair-play soient les valeurs phares de ces votes, car, pour faire comme l’artiste camerounais Zao, les Ivoiriens doivent chanter en chœur: «élections, c’est pas la guerre»!
Par Wakat Séra
*petit surnom d’Abidjan
