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Coup d’Etat manqué de 2015: « J’ai tiré en l’air et dispersé des manifestants » (sergent-chef Ali Sanou)

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Une vue des accusés dont les deux généraux Djibrill Bassolé (costume) et Gilbert Diendéré (tenue militaire) (Ph. Wakat Séra)
Le sergent-chef Ali Sanou (DR)

Le procès du coup d’Etat manqué de septembre 2015 s’est poursuivi ce mardi 17 juillet 2018 avec l’interrogatoire à la barre du sergent-chef Ali Sanou, contre qui pèsent quatre chefs d’accusation dont « l’attentat à la sûreté de l’Etat ». Face au tribunal militaire, le sous-officier qui a été radié après le procès de l’attaque de la poudrière de Yimdi, dit ne pas reconnaître les faits qui lui sont reprochés, dans ce putsch manqué qui a fait 14 morts .

Même si Ali Sanou réfute les accusations portées contre sa personne, il a dit avoir effectué des sorties avec des éléments de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP) sous les ordres de son supérieur, l’adjudant-chef major Eloi Badiel, accusé d’avoir « ordonné l’arrestation » des autorités de la transition, le 16 septembre 2015.

Le sergent-chef Ali Sanou a reconnu qu’il s’est rendu à Boudry et à Zorgho où il a reçu l’ordre d’escorter « une personnalité ». A la question de savoir ce qu’il a fait à la radio Laafi, il dit n’avoir pas « accédé à la cour » de l’organe de presse, dit ne pas être comptable de son saccage.

Au niveau de hôtel Laïco où il s’est également rendu, il a reconnu qu’il a fait usage de son pistolet SAPL, une arme à balles de caoutchouc, pour « tirer en l’air et disperser des manifestants (civils) ». Mais insiste-t-il, « aucun soldat n’a tiré » à partie du véhicule V6 qu’il avait à sa disposition, devant l’hôtel où il devait avoir lieu une rencontre pour tenter de résoudre la crise au RSP.

Le sergent-chef Ali Sanou a demandé « pardon » devant la barre du tribunal militaire à une des victimes qu’il a vexée « involontairement » devant un bar à Ouagadougou. Après plusieurs relances de Me Neya, un avocat de la partie civile qui voulait savoir exactement l’acte que le sous-officier a commis et qui l’amène avoir des regrets,  M. Sanou, a affirmé, presqu’à voix basse, qu’il « a donné un coup d’une cordelette à une personne » qui devait être son « aîné ».

A en croire le sergent-chef qui dit parler « en toute sincérité », c’est à la rencontre entre des éléments du RSP et le président sénégalais Macky Sall, en sa qualité de médiateur de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au moment des faits, qu’il a « su qu’il y avait un problème » et que les autorités de la transition avaient été arrêtées. Pour ce qu’il a compris de cette entrevue, des mesures ont été prises comme, entre autres, la réinstallation de Michel Kafando comme président de la Transition avec comme vice-président le général Gilbert Diendéré, et la sortie de tous les militaires du gouvernement.

Quant aux raisons qui l’ont fait partir en Côte d’Ivoire, Ali Sanou a laissé entendre qu’il a pris cette décision pour « éviter quelque chose » sans préciser exactement ce dont il s’agissait. « Le 29 septembre matin, j’ai reçu un sms me disant que si 10h me trouve au camp, j’allais être considéré comme un rebelle et traité comme tel », a révélé le sergent-chef.

Au studio Abazon appartenant au rappeur burkinabè, Serge Bambara alias Smockey, l’un des fondateurs du mouvement « Le balai citoyen » qui a pris une part active lors des manifestations fin octobre 2014 et sous la transition, Ali Sanou nie avoir « tiré » une roquette dans l’enceinte du bâtiment d’arrangement de l’artiste qui est parti en fumée.

Les éléments de l’ex RSP ont-ils reçu de « l’argent qui devait les motiver à soutenir le putsch manqué », a demandé le parquet. Selon Ali Sanou, ce qu’ils ont reçu, c’est une gratification que l’ex-président Blaise Compaoré, octroyait aux ex-gardes de sécurité présidentielle et qui était qualifié de « merci papa ».  « C’est une somme de 30 000 francs CFA/personne et je pense que c’était un droit ». Pour lui, cela ne visait nullement à aller combattre qui que ce soit mais cela était servi aux soldats pour qu’ils « inscrivent leurs enfants à l’école » à l’orée du mois d’octobre. Selon ses termes, les éléments du RSP recevaient le « Merci Papa » sous les présidences de Blaise Compaoré et de Michel Kafando.

Le sergent-chef Ali Sanou, a demandé au tribunal militaire de l’aider à retirer ses objets matériels notamment son passeport burkinabè son passeport et une montre que les gendarmes auraient « confisqués ».

Il a également présenté ses « condoléances » aux morts du putsch manqué de 16 septembre de 2015 et souhaité « prompt rétablissement » aux blessés.

Par Bernard BOUGOUM