Le ministère de l’Education nationale, de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues nationales (MENAPLN), dans une note en date du 30 décembre 2020, a recommandé, des mesures restrictives allant de l’annulation « des kermesses (à) d’autres activités pouvant occasionner des regroupements » au sein des établissements d’enseignement scolaire pour contrer la propagation de la Covid-19, qui malgré le changement d’une nouvelle année, continue sa triste randonnée dans le monde. Face à cette décision, nous avons fait un tour, le mardi 5 janvier 2021, au Nelson Mandela, l’un des grands établissements publics situé en plein cœur de la ville de Ouagadougou, portant le nom du premier président noir de l’Afrique du Sud, pour avoir les avis du personnel et des élèves sur la question. Si certains approuvent la décision du gouvernement, d’autres par contre estiment que la mesure va à l’encontre de l’épanouissement de l’élève.
A 8H20 environ, nous étions déjà dans l’enceinte du Nelson Mandela. Dans la cour de ce lycée, pour ce premier jour de la rentrée scolaire après les congés de Noël, la quasi-totalité des élèves était déjà en classe. D’autres élèves, dans leurs tenues de sport et sous la supervision de leur professeur d’Education Physique et Sportive, animaient le terrain de sport. Seuls quelques élèves, pour quelques motifs qu’eux seuls connaissent, dans leur tenue scolaire, sillonnaient le long du mur à la devanture du Lycée.
A l’intérieur de la cour, en face d’une salle, où on pouvait lire sur la devanture et en haut de la porte, « Bureau de la conseillère principale d’éducation », il y avait un groupe d’hommes et de femmes. Après des salutations d’usage, nous nous sommes présentés et avons décliné l’objectif de notre présence.
Une dame du nom de Minata Konaté Sanou, la cinquantaine environ, que nous avions au préalable devinée être la conseillère principale d’éducation du Lycée Nelson Mandela, non seulement, a bien voulu nous faire venir des élèves parmi lesquels figurait le délégué général du Lycée Nelson Mandela, mais aussi répondre à nos questions.
Le délégué général des élèves, Ives Roland Yanogo, en classe de première A, fut notre premier intervenant. D’un ton sûr, Ives Roland a affirmé qu’en ce qui concernent « les interdictions des kermesses au niveau des écoles, ils (élèves) ne peuvent pas contredire cela, mais d’une autre manière, (il) peut dire que ce n’est pas par cela qu’on pourrait stopper la Covid-19 ». « Etant donné que les élèves sont déjà ensembles dans les classes, ça revient à la même chose parce qu’aux Kermesses se sont les mêmes élèves qui sont ensembles. Dans le lycée, ils se taquinent, ils sont ensembles, donc je ne pense pas que l’interdiction des kermesses contribue à grande chose pour stopper la Covid-19 », s’explique-t-il.
Cependant, même si les élèves ne veulent pas aller contre la mesure gouvernementale, ils soulignent que cela va à l’encontre de leur épanouissement. Pour leur délégué, « les kermesses aussi sont des instances d’épanouissement pour les élèves », d’où leur importance.
Par contre, une autre élève de la même classe de première A du nom d’Alima Nombré trouve sans équivoque la question posée. « Concernant les kermesses, si vraiment l’Etat a décidé qu’on les arrête je crois que c’est une bonne solution, parce que déjà, ça va nous éviter plusieurs regroupements », affirme-t-elle, saluant la décision. Elle n’est pas du même avis que ceux qui pensent que comme il n’y a pas un cas positif de covid-19 signalé à la date du 5 janvier 2021 au sein du Lycée Nelson Mandela, que les regroupements soient encore permis. Car pour elle « les élèves du Nelson Mandela ne sont pas internés. Et comme chacun repart chez lui, on ne sait pas qui est qui, ils peuvent rapporter la maladie ».
Comme Mlle Nombré, Farida Sawadogo, élève de première D, trouve que cette mesure interdisant les regroupements au sein des établissements scolaires « est une bonne idée ». Mais, elle estime que les kermesses, aussi, sont « parfois des occasions pour faire de nouvelles connaissances, et acquérir beaucoup des choses » et qu’il « faut souvent se divertir ».
L’interdiction des réjouissances dans les écoles entrant dans le cadre de la lutte contre la propagation du Coronavirus, est la bienvenue pour la Conseillère principale du lycée Nelson Mandela, Minata Konaté Sanou. « Vraiment moi je suis très satisfaite par rapport à cette mesure, parce qu’à vrai dire, nous souffrons énormément quand les élèves organisent des kermesses. Ce n’est plus comme dans le temps (où) les élèves respectaient le personnel de l’éducation. Actuellement, il n’y a plus de respect. Les élèves ne respectent pas ce que vous dites, (ou) ce que vous faites », déclare-t-elle, l’air soulagé par la mesure du ministère de l’Education nationale.
Malgré les multiples « conseils nécessaires » et la lecture du règlement intérieur en classe, que les Conseillers prodiguent quotidiennement aux élèves, à en croire madame Konaté, « les élèves ne veulent pas (les) respecter ». « Pour eux, ce qu’ils décident c’est ça qui marche, (et) surtout l’Association Estudiantine des Scolaires de Ouagadougou (AESO) qui nous met vraiment mal à l’aise. Quand l’AESO décide de quelque chose, c’est ça qui va se passer. Même s’il sait que c’est l’élève qui a déconné, il va tout faire pour le défendre dans la négativité », poursuit-elle.
Madame Konaté qui semble être dépassée par les faits de ces élèves nous a relaté que lors de la commémoration chaque 5 décembre du décès de Nelson Mandela, les élèves exagèrent dans la célébration. « Ce jour-là, moi-même je me déplace pour que les élèves n’amènent pas la liqueur. Ils vont amener la bière (et) ils vont s’arranger pour (la) cacher. Dès que je vais partir, ils vont sortir la bière, le whisky, (et) toute sorte de liqueur qu’ils boivent », déplore-t-elle dans son argumentaire pour soutenir la décision contre la propagation du virus à couronne.
Elle ajoute même que lors de ces retrouvailles entre élèves, leurs tenues laissent à désirer. « (Quant à) l’habillement, ils vont changer de tenues dès que nous (superviseurs) ne sommes plus là et faire du n’importe quoi. Cela a fait que cette année, on ne l’avait pas encore organisé et ils sont venus nous talonner. Nous leur avons dit d’attendre au cours du deuxième trimestre on va voir. (Et voilà que) la mesure est tombée, on est soulagé. Parce que ce sont des boîtes de jour qu’ils organisent, ce n’est pas pour commémorer la mort de Nelson Mandela, c’est autre chose qu’ils font. Ça nous met mal à l’aise. Toute l’administration parle mais ils n’écoutent pas », avancé Mme Konaté.
Certains élèves interrogés, ont dit ne pas être au courant de ces mesures prises par leur ministère en charge. Ils se réservent néanmoins de se prononcer, avant de se rassurer que cette information est avérée.
A ce jour, selon les derniers chiffres de la maladie à coronavirus au Burkina Faso, le nombre de cas actifs s’élève à « 2 000 ». A la date du 5 janvier 2021, le Burkina Faso enregistre 7 563 contaminations.
Oumpounini MANDOBIGA (stagiaire)