Le Festival panafricain de cinéma et de la télévision de Ouagadougou touché par la redoutable deuxième vague du Covid-19! Ouagadougou, la Mecque du cinéma africain, depuis 1969, soit maintenant 52 ans, n’accueillera donc pas, cette année, ces milliers de visiteurs, nationaux et internationaux. Ils n’auront pas l’opportunité de prendre d’assaut la rue marchande et ses maquis enveloppés par la fumée, et le fumet, des succulents «poulets bicyclette», marque de fabrique du Burkina. Ils ne pourront pas, casques scotchés aux oreilles, visionner les courts ou longs métrages, ou les documentaires, de belle facture, mis sur le Marché international du cinéma et de l’audiovisuel africains, le Mica. Ils n’auront pas non plus l’occasion de se vautrer dans les fauteuils des salles obscures du Ciné Burkina, du Ciné Nerwaya, ou de Canal Olympia, encore moins de s’installer sur les chaises défoncées des salles ouvertes des quartiers populaires, communément appelées «cinéma coco taillé».
De même, les jurys n’auront pas à vivre cette poussée d’adrénaline et le plaisir de faire fumer leurs méninges, pour désigner un successeur au dernier vainqueur de l’Etalon d’or de Yennenga 2019, le Rwandais Joël Karekezi, le réalisateur de «The mercy of the jungle». Et le grand public, si friand des films africains qui racontent leur quotidien et dans lesquels ils reconnaissent leurs propres héros, tout comme ils s’identifiaient, autrefois, à Bruce Lee, John Wayne ou autres, Jean-Paul Belmondo, Eddy Murphy et Terminator (Arnold Schwarzenegger). Car, du cinéma de case, le cinéma africain, offre aujourd’hui, que ce soit sur le petit écran, en témoigne le succès prodigieux de Nollywood, ou sur le grand, des produits de qualité, embrassant tous les genres, allant du romantique à l’érotique, en passant par la comédie, la fiction et même le western.
Le continent noir et les millions de fans et acheteurs et vendeurs du cinéma africain, à travers le monde, seront privés de Fespaco cette année. Le Covid-19 est passé par là, et sa deuxième vague, qui met l’Afrique à rude épreuve, affolant les compteurs des cas confirmés et des décès, ne présage rien de bon. Au Burkina, du 19 au 26 janvier 2021, 865 nouveaux cas ont été enregistrés, pour 15 décès, portant le total des cas à 10 217 et celui des décès à 120. La moyenne du nombre de nouveaux cas observés par jour au cours de la semaine est de 108 contre une moyenne de 128 nouveaux cas entre la période du 1er décembre 2020 au 18 janvier 2021 et une moyenne de 15 nouveaux cas par jour au cours de la période de mars à fin novembre 2020. Constat, certes pas désespéré, mais préoccupant, de l’exécutif burkinabè.
Plus ou moins épargnée par les ravages du Covid-19, alors que le pire lui avait été prédit lors de la première vague, l’Afrique est désormais dans l’œil du cyclone. Les variants du virus, britannique ou sud-africain, sont, plus que jamais, menaçants. C’est ainsi que le couperet est tombé, ce vendredi 29 janvier, avec la décision du gouvernement burkinabè, de reporter à une date ultérieure, la 27è édition du Fespaco, initialement prévu pour se tenir, du 27 février au 6 mars prochain. Désolation dans les rangs des acteurs du tourisme et de l’hôtellerie, secteurs qui, à l’instar de l’économie burkinabè en berne, subissent ce nouveau coup dur, alors qu’ils comptaient sur la fête biannuelle du cinéma, pour se refaire une petite santé financière. Le Covid- 19 a donc encore frappé. A la suite de ce report, quel sort pour tous ces autres événements d’envergure internationale, qui font vivre de nombreux prestataires et sont la fierté du Burkina culturel?
C’est clair, l’Afrique est au creux de la vague et le Covid-19 n’a pas fini de faire des…vagues. Et on espère toujours le vaccin qui se met difficilement en place sur un continent, où tout est priorité et qui continue de compter, au quotidien, ses milliers de morts de paludisme, notamment les enfants et les femmes enceintes. En tout cas, pour éviter des mesures drastiques pour une économie africaine informelle, il importe de renforcer le respect des gestes barrière dont les plus simples, faut-il encore le rappeler, sont le lavage régulier des mains au savon et le port des masques dans les lieux publics. Et le salut viendra, peut-être, de la protection qui doit être individuelle et collective. Le virus est bien là, ce n’est pas du cinéma!
Par Wakat Séra