Un coup d’Etat déjoué en Guinée équatoriale et une tentative de déstabilisation au Burkina Faso. C’était les plats très peu alléchants qui s’étaient invités à la table de fin d’année des Equato-Guinéens et des Burkinabè. Si la nuit de Noël, à en croire les autorités de Malabo, a failli être fatale au régime de Teodoro Obiang Nguema, du fait de mercenaires venus de l’étranger pour l’attaquer, au Burkina Faso, c’est l’année 2017 qui aurait pu s’en aller avec le pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré, dans un projet de déstabilisation dont le cerveau présumé, interpellé le 29 décembre, est un colonel de l’armée burkinabè. Dans les deux cas, les enquêtes sont en cours pour évaluer toutes les implications dans ces différentes actions, et surtout procéder au démantèlement des réseaux utilisés, à l’interne comme à l’international, par les présumés «putschistes». Des auditions de cadres de l’armée, et semble-t-il dans le milieu des Organisations de la société civile burkinabè sont menées par la gendarmerie burkinabè, tout comme les forces de sécurité et services de renseignement équato-guinéens sont sur les dents pour mettre hors d’état de nuire, les «mercenaires» et leurs commanditaires dont le portrait-robot dressé par le pouvoir renvoie tout naturellement aux opposants de Teodoro Obiang Nguema. En Guinée équatoriale, la chasse a été lancée même hors des frontières nationales. Et les représentations diplomatiques en territoire équato-guinéen expriment du reste toute leur préoccupation par rapport aux dénonciations d’implications tous azimuts émises par Malabo. Les pays voisins, tout comme l’opposition qui craint que l’occasion soit belle pour le pouvoir de chercher à l’anéantir, ne cachent pas leurs inquiétudes face aux représailles contre les auteurs et commanditaires de ce coup d’Etat contre Teodoro Obiang Nguema.
En attendant d’autres rebondissements dans une de ces nouvelles affaires qui empoisonnent le quotidien des Burkinabè, le présumé cerveau vient d’être déposé à la Maison d’arrêt et de correction de l’armée (Maca), ce 3 janvier 2018. Ironie du sort, il y retrouvera, le Général Gilbert Diendéré, lui aussi présumé cerveau d’un coup d’Etat, celui de septembre 2015 qui a failli mettre entre parenthèses, la transition politique que traversait le Burkina Faso suite à l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Les retrouvailles entre anciens et nouveau pensionnaires de la Maca risquent d’être des plus électriques. Barry le nouveau devant se retrouver face à des «camarades de prison», des éléments de l’ex-régiment de sécurité présidentielle (RSP), corps dont il a fortement contribué à la dissolution. Du reste, Auguste Denise Barry et les ex-RSP, c’était du chien et chat. Le colonel fraîchement écroué, tout puissant ministre de la Sécurité à l’époque de la Transition, a d’ailleurs été démis de ses fonctions, à la suite d’une énième crise avec le RSP du Général Diendéré. Une chose est certaine, cette tentative de déstabilisation que certains ont encore du mal à prendre au sérieux, et derrière laquelle d’autres voient des mains encore invisibles, vient corser davantage l’équation de la cohésion au sein de l’armée burkinabè mais surtout celle de la stabilité du régime Kaboré, malmené par une fronde sociale qui, loin de faiblir, prend de la force comme un cyclone au fur à mesure de son évolution.
Ainsi, l’Afrique n’a pas définitivement tourné le dos aux coups d’Etat. Le constat est amer. Qu’elles soient vraies ou montées de toutes pièces à des fins inavouées, ces tentatives de déstabilisation, sont la preuve que la démocratie sous les tropiques a encore du chemin à faire, un sentier sinueux, parsemé d’obstacles dont les plus coriaces sont les putschs et autres insurrections populaires, spontanés ou minutieusement concoctés.
Par Wakat Séra