Ce mercredi était, sans aucun doute, jour de joie dans la famille Erdimi avec la nouvelle de la libération en Egypte de l’opposant aux régimes des Deby. C’est pourtant sur intercession du président de la transition, le général Mahamat Debby Itno, que celui qui, de premier directeur de cabinet d’Idriss Deby Itno est devenu l’un des opposants les plus virulents et les plus craints de l’ancien président tchadien, est sorti de prison, bénéficiant d’une grâce présidentielle de la part du chef de l’Etat égyptien, le maréchal Abdel Fattah al-Sissi. Sortir son frère jumeau des geôles du pays des pharaons constituait l’une des conditions du chef rebelle Timan Erdimi qui vivait en exil au Qatar, pour sa participation au Dialogue national inclusif souverain (DNIS). Initiée par l’actuel homme fort de N’Djamena pour mener le Tchad vers une sortie de transition couronnée d’une nouvelle constitution et d’élections ouvertes, cette trouvaille était sensée rassembler, sous un grand arbre à palabre, toutes les composantes de la société tchadienne, des groupes politico-militaires aux partis politiques en passant par les religieux, les coutumiers, etc. Mais à peine lancée, le samedi 20 août, en grande pompe mais surtout avec ses imperfections organisationnelles, la machine s’est grippée dès les jours suivants.
Le nombre jugé pléthorique des participants et la non représentativité de certains, le dessein prêté au Dialogue de chercher à maintenir au pouvoir le chef de la junte militaire, le quota jugé excessif accordé aux mouvements et partisans du pouvoir, la contestation de la composition du présidium des travaux, la mise à l’écart, orchestrée selon les détracteurs du dialogue de partis comme «Les Transformateurs» de Succès Masra et de la coalition de l’opposition Wakit Tama, etc., ont constitué des boulets trop lourds au pied du DNIS. Et le Dialogue a marqué le pas au moins trois fois déjà, malgré l’implication active de pompiers tel le conseiller en charge de la sécurité nationale de l’émir du Qatar, Mohamed Bin Ahmed Al Mesned; l’ancien chef de la diplomatie burkinabè, Djibrill Bassolé qui était aussi représentant spécial de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) et médiateur conjoint de l’Union africaine et des Nations unies dans plusieurs crises en Afrique; et le Mauritanien Moustapha Ould Limam Chafi, conseiller spécial du président nigérien Mohamed Bazoum. Des crises importantes comme les manifestations interdites marquées par les arrestations musclées des militants du parti d’opposition «Les Transformateurs», qui ont suscité les condamnations de la communauté internationale, ont fortement hypothéqué la suite du processus. Sauf qu’un autre pompier, notamment le groupe dit des religieux et des ainés qui essaient de ramener au palais du 15 janvier les artisans du boycott du Dialogue est entré en jeu et dit avoir trouvé un accord avec ceux-ci, y compris la coalition Wakit Tama.
Si Wakit Tama, le groupe de l’appel du 1er- juin, et les partis «Les Démocrates» et «Une Nation pour tous» marquent leur accord pour aller au Dialogue, et isolent ainsi «Les Transformateurs», leurs conditions trouveront-elles oreille attentive auprès des autorités de la transition? Car, les réticents exigent la mise en place d’un nouveau présidium et que le quota des participants, notamment ceux ayant droit de vote, soit ramené à 800 au lieu du plus du millier à l’origine. En tout cas, les patrons de la transition, pour sauver le bébé DNIS, ont intérêt à lâcher également du lest. Toute chose qui pourrait bien remettre à plus tard, la reprise du dialogue prévue pour ce jeudi. Reprendra ou reprendra pas? C’est le gros doute qui plane autour du Dialogue national inclusif souverain qui va de rebondissement en rebondissement.
Par Wakat Séra